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lundi 4 décembre 2023

(Pr) Un cadeau: l'espérance ravivée

Lectures bibliques: 1 Samuel 1, 1-20 + 26-28;  Matthieu 11, 28-30

Le petit Toto pleure à chaudes larmes. Une dame secourable lui demande pourquoi. «Eh ben, j’ai perdu mes lunettes, et je ne peux pas les chercher... avant de les avoir retrouvées!»


Eh bien, il en va de même pour l’espoir, et la confiance, et la foi. Difficile de les chercher quand on ne les a pas. Alors, si vous vous sentez au fond du trou; si vous désespérez; si vous trouvez la vie injuste ou insupportable, alors cette histoire est pour vous (et sinon, je vous fais confiance: vous en prendrez bien quelque chose!!).

 

Il y a bien longtemps vivait, dans un pays d’Orient, un peuple. Ce peuple avait connu des années glorieuses, mais c’est bien fini: tout à coup la guerre, la défaite; on leur prend leurs richesses, on emmène leurs élites en exil. Rien ne va plus.

Ce peuple, c’est Israël, au 6è siècle avant notre ère; plus précisément Juda, et Jérusalem, conquis par Babylone. Cette conquête est une catastrophe pour ce peuple qui se considérait comme protégé par Dieu. Plus personne n’a le moral. Il semble que Dieu les ait abandonnés.

C’est dans ces temps sombres qu’a été rédigée l’histoire de Samuel, dont nous venons d’entendre le début. Samuel, qui avait vécu quelque 500 ans plus tôt. Samuel, qui est l’une des grandes figures de l’histoire d’Israël, un moment lumineux dans le gris des temps anciens. Samuel, qui a toujours été fidèle à Dieu, contrairement aux dirigeants, aux rois plus récents.


La naissance même de Samuel est riche de beaucoup d’enseignements et de promesses. Au 6è siècle on se souvient, tout à coup, comment cet homme extraordinaire a été conçu. Car Samuel est le résultat de la rencontre de trois personnes, sur lesquelles je vous propose de nous arrêter un peu ce matin. Il s’agit d’Anne, sa mère; de son père, Elqana; et de Dieu.

Anne, c’est elle qui est au fond du trou. Elle est stérile, donc en ce temps-là considérée comme maudite, et punie par Dieu. Savez-vous qu’à l’époque, un mari avait le droit de répudier son épouse en cas de stérilité. On considérait que la seule valeur pour une femme, c’était la maternité. Ben bravo! Heureusement que ça a bien changé!

Comble de malheur pour Anne, il y a Peninna, sa coépouse (soit l’autre femme d’Elqana, qui est donc polygame). Peninna qui en rajoute joyeusement. Elle se moque d’Anne et l’humilie, ce qui est hélas très courant en ce temps-là.



Accablée par sa malchance et par cette espèce de mobbing, Anne présente les symptômes de la dépression: elle pleure à longueur de journée, elle ne mange plus, ne peut plus rien dire ni rien faire…

 

Elqana, lui, réagit comme beaucoup d’entre nous (et je me projette volontiers dans ce rôle!): il souffre de voir celle qu’il aime dans cet état, mais il est impuissant à l’aider. C’est un homme plein de bonne volonté, mais un peu maladroit. Il n’a que son affection à offrir à Anne. Il lui donne un morceau de viande deux fois plus gros, et lui demande si son amour ne vaut pas mieux que 10 enfants (entre parenthèses, rappelons qu’il est très rare, à l’époque, qu’un mari aime sa femme)…

C’est pourtant cet époux gaffeur qui permettra le salut. Mais sans qu’il le veuille! Ses tentatives de consolation font l’effet inverse, et Anne ne supporte plus. Elle se lève et s’en va, c’est la goutte qui fait déborder le vase.

Cette réaction va l’amener auprès du 3ème personnage de notre histoire, Dieu. Lui, il est là, fidèle, même si on l’oublie. Il est tout proche, mais discret. Il n’intervient pas si on ne lui demande rien.

Anne va donc déverser sa peine devant lui. En hébreu, le verbe utilisé ici a un sens très fort, celui de s’épancher, de se répandre. Son cœur déborde de chagrin et d’humiliation, comme un fleuve en crue. 

Alors, le miracle se produit. Anne va se transformer complètement. Elle pourra se relever, son visage a changé, elle peut de nouveau se nourrir.

Que s’est-il passé? Eh bien, trois fois rien: Héli, le prêtre, lui donne l’assurance que Dieu l’entend, que sa prière a touché le cœur du Seigneur; qu’il est un Dieu qui se souvient de nous; qui nous aime, qui nous connaît.

Mais, vous avez remarqué? Même Héli commence par une longue méprise. Littéralement: il méprise Anne, croyant qu’elle a trop bu. Comme pour bien marquer que Dieu seul voit clair en nous. Et que les humains, face à la dépression, sont toujours d’une maladresse ahurissante.


Mais Héli, quand il finit par comprendre Anne, se fait l’interprète de Dieu: il lui annonce que le Seigneur lui fera grâce. Dieu se souvient d’elle.

Dès lors, Anne peut guérir, et l’enfant va naître. Et cette femme qui n’avait rien, et cette femme qui n’était rien devient celle par qui sera offerte à Israël la lumière d’un espoir immense!

Ce fils qu’elle a reçu, elle le donne. Avant même qu’il ne soit conçu, avant même qu’Héli ne lui annonce que sa prière sera exaucée. Elle donne ce fils, et c’est lui qui sortira Israël de l’obscurité en choisissant comme roi David. L’étoile dans la nuit.

Vous êtes au fond du trou; vous désespérez, trouvez la vie injuste ou insupportable; vous tournez en rond dans l’obscurité de temps cruels. À vous, gens d’Israël sous l’Exil; à vous, persécutés sous Auguste et Ponce Pilate; comme à vous, gens du 21è siècle ici ou plus loin, à vous Dieu redit sa promesse: il est là, il se souvient de vous; il connaît votre peine, prêt à la porter avec vous, pour vous permettre d’aller mieux.

Vous dites «on est bien peu de chose»; comme Anne, stérile, vexée, humiliée. Oui, on est bien peu de chose, mais ce peu, ce trois fois rien, parce qu’il est vécu devant Dieu, parce qu’il est ouvert à ses promesses, ce trois fois rien peut devenir l’étincelle qui allume des feux de joie.

Parce qu’il est ouvert à un Dieu qui se souvient, mais aussi parce qu’il est accompagné de cette volonté de don. Anne ne veut pas cet enfant pour elle seulement, mais pour Israël et pour le monde.

Quand nous nous trouvons face à la détérioration des choses; dans la peur de ne plus rien avoir, notre réaction est souvent la défense, le repli. Chez Anne, c’est le contraire, c’est le don. Bien sûr, son attitude nous paraît un peu surhumaine. Les personnages de la Bible sont parfois idéalisés!

Il m’est arrivé plusieurs fois, en préparant un baptême, que les parents me disent qu’ils ont aimé ce passage biblique. Ils y ont lu un écho de leur immense reconnaissance d’avoir reçu ce petit être, après des mois ou des années d’insuccès. Ils me disent: “Avoir cet enfant, pour nous, c’est un miracle! C’est un cadeau du Ciel!”.

J’aime cette attitude positive, qui rejoint celle de notre histoire. Et je souhaite que chacun(e), présent ce matin, puisse s’en inspirer pour apprécier les bienfaits de la vie, quels qu’ils soient.

Dieu se souvient. Remarquez ceci encore: Anne aurait pu seulement pleurer. Mais elle va prier. Elle pleure devant Dieu et non pas sur elle-même. Parce qu’elle ose exprimer ses sentiments, et sans craindre le ridicule face à Héli; parce qu’elle se confie à Dieu (dans la dimension de la confiance comme dans celle de la confidence), alors elle recevra la réponse qui change tout: Dieu se souvient de toi. Et elle s’en sortira. Amen


Jean-Jacques Corbaz 


vendredi 1 décembre 2023

(Po) Qui de nous deux


  Qui de nous deux
   (chanté par Marc Ogeret)

Je suis là près de toi et j’ai le coeur serré
Je fais semblant de lire un livre un peu fané
Toi, tu rêves à demi, je t’entends respirer
Je voudrais te parler, je voudrais oublier
Qui de nous deux partira le premier
Qui de nous ira vers les cyprès dormir près du soleil entre les oliviers
Qui de nous restera le dernier à regarder le ciel
Tout au long des années entre les oliviers.


Les enfants au jardin s’amusent avec l’été,
Il y a Frédérique, Nicolas et Zoé,
Je les entends courir, je les entends crier
Je voudrais les rejoindre, je voudrais oublier
Qui de nous deux partira le premier
Qui de nous ira vers les cyprès dormir près du soleil entre les oliviers
Qui de nous restera le dernier à regarder le ciel
Tout au long des années entre les oliviers.


Chaque jour un peu plus, moi j’apprends à t’aimer,
Chaque nuit un peu plus vient nous réinventer.
Le vent t’a fait si belle, si douce les années,
Je voudrais te le dire, je voudrais oublier
Qui de nous deux partira le premier
Qui de nous ira vers les cyprès dormir près du soleil entre les oliviers
Qui de nous restera le dernier à regarder le ciel
Tout au long des années entre les oliviers.


Daniel Thibon  

 

L'interprétation de Marc Ogeret:

https://www.youtube.com/watch?v=CbdnuGvCKoI

 

 

 

(Li, Po) Cantique : Abba, Vent de liberté (musique : Alléluia 43-12)


Viens souffler sur ton Eglise,
Vent de liberté !
Ouvre nos cœurs aux surprises
De ta nouveauté !
Quand nos vies sont engourdies,
Chante et danse ta folie,
Viens souffler sur ton Eglise,
Vent de liberté !

Quand nous manquons de tendresse,
Prends-nous par la main !
Ouvre nos cœurs aux promesses
De tes lendemains !
Quand nous pleurons, dans la nuit,
Ressuscite notre vie !
Quand nous manquons de tendresse,
Prends-nous par la main !

Fais de nous des sœurs, des frères,
Quand nous avons froid !
Rends-nous proches et solidaires,
Unis par la foi !
Brûle en nous, Esprit de feu,
Souffle tonique et joyeux !
Fais de nous des sœurs, des frères,
Unis par la foi !


Jean-Jacques Corbaz



 

Ou la version traditionnelle interprétée par Sam Gabrieli:

https://youtu.be/SvkJOKzM8ds?feature=shared



jeudi 30 novembre 2023

(Po) Bergers dans la nuit

Bergers noirs dans la nuit
Moutons blancs, moutons gris
Là-devant, un chien veille
Un soir aux soirs pareil.

Un Dieu absent, très loin
Nos soucis, nos besoins
La vie qu’il faut tirer
Et nos bras fatigués.

Bergers gris dans la nuit
Le troupeau s’est assis
Même le feu sommeille
Un soir aux soirs pareil.

Espère en Dieu, mon coeur
Le noir te fait-il peur?
Il faut se reposer
Bientôt viendra l’été.

Bergers blancs, dans la nuit
Sous la lune qui luit
Et la lumière éveille
Nos désirs de soleil.

        *    *

Un chant perce les cieux
Voici la voix de Dieu
Dieu, tout proche soudain
Dieu se fait mon voisin.

Bergers gris dans le noir
Et Dieu dans ce bébé
Qui nous aide à aimer
S’allume un feu d’espoir.

Bergers blancs, bergers noirs
Bergers gris dans le soir
Chiens, moutons rassemblés,
Venez! jouez! Chantez!
Car, sans désir de gloire
Un Sauveur nous est né.


Jean-Jacques Corbaz, décembre 1977   



(Li, Po) Etoiles de l’Avent 1°

Regarde: le ciel est tout brillant d’étoiles,
Et ton sourire en allume une encore,
Et puis d’autres, là-bas, par où viendra l’aurore
Qui redisent à l’espoir qu’il faut rester vivant.

Regarde: le ciel est tout brillant d’étoiles,
-Mais dis-moi, celle-ci vient de naître à l’instant:
Serais-je un nouveau mage, est-ce un nouveau Noël?
Des feux sur la montagne, ou de lointains soleils?

Tu les vois? Partout c’est tout brillant d’étoiles,
Là où le ciel touche à la terre debout,
Les Alpes, le Jorat, le Pèlerin, Jaman,
Et jusqu’à Maracon, cent lueurs qui s’entoilent,
Pour appeler ce Dieu descendu parmi nous.

Magie d’un soir, les feux de l’Avent.



Jean-Jacques Corbaz, novembre 1984 



 


(Li, Po) Il vient bientôt - pour l'Avent

Va
Il y a dans le monde un frémissement clair
Va lui dire
Un peuple gonflé d’une forte espérance
Va
Appelle!

Crie:
Tout ce que tu as fait est prêt à danser de joie
Chante:
On n’attend qu’un orchestre qui rythme nos pas
Prépare la danse
On est là, on n’attend plus que toi!

Va
Va lui dire: viens!
Va porter nos silences, affraîchir nos partances
Dis-lui qu’on veut danser, regarder vers demain
Va, fils d’homme, va présenter les hommes
Représenter le monde, la nature attendant.
Il vient ouvrir nos bras, nos douleurs, nos erreurs
Il vient filer l’étoile au creux de nos nuits chaudes
Pour qu’un nouvel hiver ouvre un nouvel été.
Va, fils d’homme, il vient bientôt.


Jean-Jacques Corbaz, février 1978   


mardi 28 novembre 2023

(Po, Li) Je regarde le ciel

Je regarde le ciel, où plongent les étoiles,
Et je plonge avec elles, je vole, je me noie,
Cet immense infini m’emporte et m’assouvit
Comme on assouvit sa colère.
Je regarde le ciel, qui me parle de Dieu,
Créateur et Seigneur, puissant, majestueux.

Je regarde le ciel, et j’oubliais la terre,
Et j’oubliais la vie, et ma soif de tendresse,
Main posée sur la mienne, et nos souffles ténus
À la recherche du temps… reçu.
Je regarde le ciel, et j’oubliais la terre,
Où le Dieu tout-puissant est bel et bien venu.

Et puis, fil après fil, lueur après clarté,
L’évangile révèle:
Je regarde le ciel, je regarde la terre,
Et tous les deux m’appellent,
Et je comprends ainsi que Dieu a deux visages!
Et c’est le même chant de liberté
Où le Dieu si humain viendrait ressusciter.

Et ma soif de tendresse rencontre Christ, le frère,
Et ma soif d’infini m’ouvre à son Dieu, son père,
Et tous les deux me renvoient à la terre
Où leur amour a besoin de mes bras
Pour naître, encore une fois.

Je regarde le ciel, je regarde mes bras…
Et je tremble soudain - mais ce n’est pas de froid.

                    *            *

C’est là,
Sans un mot,
Que repose ma prière.

C’est là
Que sans ma vie de mots
Je rejoins le Christ en prière.

C’est là,
Présence nue, confiance discrète,
C’est là,
Porte du Ciel, qui m’invite à la fête,
C’est là qu’en reposant mes forces iront plus loin.

C’est là,
Sans un mot,
Que mon amour se régénère.

C’est là
Que sans ses oripeaux
Me rejoint le Christ en prière.

Et c’est là qu’est mon nom, Seigneur,
Au coeur de ton amour qui m’emmène.
Merci, Seigneur!
Amen


Jean-Jacques Corbaz, août 1980   



(Co) Saarsi, fils de mage - conte de Noël

Il y a très très longtemps, dans un pays d’Orient, vivait un jeune garçon qui s’appelait Saarsi. Saarsi avait souvent la tête dans les nuages - ce qui n’était pas étonnant, à cause du métier de son papa. Le papa de Saarsi était mage.

Comment? Vous ne savez pas ce que c’est comme travail, d’être mage? Eh bien, un mage passe tout son temps à regarder le ciel. Il observe les étoiles, comment elles se déplacent, quels dessins elles forment entre elles. Et puis, il écrit dans de gros cahiers, pour se rappeler ce qu’il a vu. Il calcule, c’est très compliqué, pour savoir à quelle vitesse les étoiles bougent, dans le ciel…

Un jour, le papa de Saarsi rentre du travail tout excité. «Elle est arrivée!» dit-il gaiement. 

«Elle est arrivée?» demande la maman de Saarsi. «Mais qui est arrivée? La nouvelle voisine?»

«Mais non, l’étoile du Roi, voyons!» dit le mage. «L’étoile que j’attendais depuis si longtemps! Celle qui annonce un personnage plus grand que tous les autres rois!»

À force de contempler le ciel, le papa de Saarsi était parfois dans la lune! Oh, pas pour son travail, mais plutôt pour sa famille. Il oubliait souvent que sa femme n’était pas au courant du quart de ses calculs et de ses découvertes! 

Alors, il explique que tous les mages du pays guettent depuis quelques mois une nouvelle étoile, qui doit annoncer qu’un Roi des rois est né.

«Alors, ce personnage fabuleux, ce presque Dieu, c’est un bébé?» demande Saarsi.

«Oui mon garçon. Un tout petit bébé!» fait le mage. «Demain je pars. Pour aller le voir!»

«Oh, papa! supplie Saarsi. Je peux aller avec toi? J’aimerais tellement voir ce petit roi, moi aussi.»

«Non Saarsi, dit la maman. Tu es trop jeune encore. Tu n’as que 10 ans. Le voyage est trop dangereux, trop long, trop pénible, trop cecicela»…

Je ne sais pas si vous êtes comme Saarsi? Quand il y a trop de «trop», il n’écoute plus. Alors, il va se coucher, en rêvant d’un beau voyage à dos de chameau; sur les routes d’Orient. Mais aussi, il cherche dans sa petite tête comment il pourrait convaincre ses parents de le laisser partir.

 


Le lendemain, Saarsi se réveille, les yeux brillants. Il a bien dormi, et sa décision est prise: il partira… en cachette! Il ne sait pas encore exactement comment, mais il montrera à ses parents qu’il est assez grand, assez fort, assez débrouillard; assez tout ce qu’il faudra!

Dehors, son père est prêt. Juste le temps de s’embrasser, et le mage s’en va, au pas souple et balancé de son chameau, chargé de provisions et de cadeaux pour le roi nouveau.

Saarsi appelle: «Maman, je peux aller chez les voisins, jouer avec leur chat?». «Bien sûr, mon chéri, tâche de rentrer au moins pour midi.»

L’enfant n’hésite pas: sans perdre une seconde, il court sur le chemin, légèrement, joyeusement. Il dépasse la maison des voisins. Au loin, il aperçoit le nuage de poussière que fait son père. «Je le rattraperai quand il s’arrêtera pour manger quelque chose ou pour abreuver le chameau. Il ne pourra pas faire autrement que de m’emmener, si loin de chez nous!»

Mais Saarsi n’avait pas pensé qu’un chameau, ça marche vite, et surtout ça marche longtemps, longtemps, sans devoir s’arrêter pour boire. Et quand le soir tombe, c’est presque la nuit, il ne voit plus la poussière de son papa depuis des heures. Il ne voit plus le chemin, il ne voit plus rien, d’ailleurs. Affamé, assoiffé, il s’assied au bord de la route et se met à pleurer. «Papa, attends-moi, je suis trop petit…»

 


 
Il a dormi un moment. Mais soudain, il est réveillé par un formidable «hihaan!»

Un âne! C’est un âne, juste là-bas, sur le chemin! Il y a quelqu’un! Saarsi se redresse. Il a peur: et si c’était un voleur? Mais après tout, il se dit qu’il n’a rien. Rien du tout! On ne peut donc pas le voler!

Il rassemble tout son courage, et s’avance vers l’homme et l’animal, qui campent à l’abri d’un rocher. Il fait tout à fait nuit maintenant, mais il y a un feu qui éclaire! Et puis, sur le feu, mmmh, ça sent bon, il y a de la soupe qui chauffe, et aussi… de la viande!

Saarsi abandonne toute fierté au moment où il voit le vieil homme qui prépare son repas. «Pardon, M’sieu», mais il ne peut pas continuer. Il se remet à pleurer. À pleurer…

Le voyageur, étonné, étend le bras. Il prend Saarsi tout contre lui, et le serre doucement, comme sa maman quand il se fait mal. «Tu as faim? Tu as soif?» - Pas besoin de lui poser deux fois la question!

Après qu’ils ont bu et mangé, Saarsi raconte son histoire. Le vieil homme réfléchit: faut-il ramener cet enfant chez lui? Ce serait beaucoup de temps perdu. Après tout, ils ne doivent plus être très loin de l’endroit où son père s’est arrêté pour la nuit. Il a déjà tellement marché..  Tant pis! L’âne est fort et robuste, il portera bien l’enfant, en plus de sa charge, jusqu’au village où son père se repose, là-bas devant.

D’ailleurs, cette nuit-là a quelque chose d’étrange. Les étoiles brillent plus fort que d’habitude, et il n’y a aucun nuage. On voit le chemin presque comme si c’était le matin.

Alors, ils repartent, au milieu de la nuit. «Dors sur mon âne», dit le voyageur. Mais Saarsi n’a pas sommeil, tout-à-coup. Il est excité comme hier soir, quand il cherchait comment accompagner son père. «Et vous?» demande-t-il au vieil homme, «d’où venez-vous?»

«Je viens de loin, répond-il, de très loin. Ça s’appelle le Caucase. Je suis parti il y a longtemps…»

«Et où allez-vous? Je suis curieux!»

«Tu sais, fait le voyageur, j’aime les gens curieux. Je vais vendre des épices d’Orient en Egypte.»

Et ils continuent de parler, de se raconter leur vie. Jusqu’à ce que Saarsi, épuisé, s’endorme enfin, toujours porté par l’âne, bercé par son pas tranquille.

 

Quand le jour se lève, ils n’ont toujours pas vu le mage et son chameau. A-t-il pris un autre chemin? Ou bien a-t-il continué d’avancer, guidé lui aussi par la clarté des étoiles? Le vieil homme et l’enfant, un peu inquiets, ont quand même envie de poursuivre leur route.

D’autant plus que là-bas devant, ils entendent un bruit bizarre. Comme s’il y avait une bagarre. Oui! Ce sont des hommes qui frappent une femme et sa petite fille. Mais, en entendant les voyageurs, ils ont peur, et ils s’enfuient à toute vitesse, laissant les deux victimes à leur triste sort.

Mais, elles sont étranges, cette femme et sa fille: elles ont la peau brun foncé, presque noire. Saarsi n’a jamais vu quelqu’un comme ça!

Le vieil homme les soigne et les rassure. Elles expliquent qu’elles viennent d’Afrique, et que les méchants voulaient les vendre comme esclaves.

«Restez avec nous! dit le voyageur du Caucase. Je vous protégerai.»

 


 
Et c’est ainsi que Saarsi a découvert le monde. Leur petit groupe a continué de s’agrandir, chaque fois qu’ils rencontraient des gens en difficulté: deux Chinois, qui avaient perdu leur chemin; un Arabe, malade, que l’âne a transporté jusqu’au prochain médecin; une jeune-fille du désert, dont les parents étaient morts de vieillesse; et même un vieux chien, qui n’avait plus de maître, plus personne à aimer…

Un soir, ils sont arrivés dans un village de Judée appelé Bethléem. Et, devant une vieille maison, Saarsi voit trois chameaux qui attendent. Trois chameaux?? Saarsi repense soudain plus fort à son papa. Car un des chameaux ressemble… mais oui! C’est lui! C’est lui!!

Avec tous ses nouveaux amis, il entre dans la cabane. Sur la paille, dans une espèce de panier, il y a un bébé. Et quelques personnes qui le regardent, l’air émerveillé.

«Papa!!!»

Le mage n’a pas le temps de se retourner, Saarsi est déjà blotti dans ses bras. Après tous ces jours de fatigue et de dangers, quel bien ça fait! 


Plus tard, bien plus tard, Saarsi comprendra que c’est ce bébé le Roi des rois que les mages attendaient. Et qu’il avait fait, ce bébé, à peine né, qu’il avait fait la chose la plus extraordinaire: il avait rassemblé dans l’amitié des gens de tous pays, de toutes couleurs; il avait rapproché les mains blessées d’Arabes, de Juifs, de noirs, de jaunes, de blancs; de riches et de pauvres, de petits et de grands…

Et surtout, il avait conduit Saarsi dans les bras de son papa!

Jean-Jacques Corbaz, 17.12.1994    



 
(On peut faire écouter ensuite la chanson «Enfants de Palestine», tiré de « Noël des enfants du monde »)

Paroles: Jacques Lafont                   Musique: Jean Naty-Boyer

Enfant de Palestine, ou enfant d’Israël

D’Amérique ou de Chine, en ce jour de Noël
Que ton regard se pose, sur la terre ou le ciel
Ne retiens qu’une chose, il faut croire à Noël.

Matin couleur de cendre, ou matin d’arc-en-ciel
Qu’importe il faut attendre en ce soir de Noël
Que les fusils se taisent et répondent à l’appel
De cette parenthèse, qui s’appelle Noël

Refrain
Enfant de Palestine, ou enfant d’Israël
D’Amérique ou de Chine, en ce jour de Noël
Que ton regard se pose, sur la terre ou le ciel
Ne retiens qu’une chose, il faut croire à Noël.

Un jour viendra peut-être, un jour au gout de miel
Ou l’on verra paraitre un oiseau dans le ciel
Aux plumes de lumières un oiseau éternel
Colombe pour la terre, un oiseau de Noël.

Refrain
Enfant de Palestine, ou enfant d’Israël
D’Amérique ou de Chine, en ce jour de Noël
Que ton regard se pose, sur la terre ou le ciel
Ne retiens qu’une chose, il faut croire à Noël.

Ne retiens qu’une chose, il faut croire à Noël.