Pour vous y retrouver

Bonjour! Bienvenue sur ces pages, que j'ai plaisir à ouvrir pour vous!
Vous trouverez sur ce blog différentes sortes de contributions:
- annonce (An),
- billet (Bi),
- citation (Ci),
- confession de foi (CF),
- conte (Co),
- formation d'adultes (FA),
- humour (Hu),
- image (Im),
- liturgie (Li),
- poésie (Po),
- prédication (Pr),
- réflexion (Ré),
- sciences bibliques (SB),
- vulgarisation (Vu).
Bonne balade entre les mots!

Ces œuvres sont mises à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution - Partage dans les Mêmes Conditions 3.0 non transposé.

Ce blog fait partie d'un réseau de sites réformés "réseau-protestant.ch" qui vise à coordonner et rendre visibles et lisibles les publications web de la galaxie du protestantisme de Suisse romande. Voir sur ce blog la page https://textesdejjcorbaz.blogspot.com/p/blog-page.html>.

dimanche 23 mai 2021

(Bi) Après Pentecôte, le temps de l'E... quoi?

 Après Pentecôte

 

Traditionnellement, pour les chrétiens*, le temps qui suit Pentecôte est appelé temps de l’Eglise. Pas tellement dans le sens de l’Eglise-institution (laquelle d’ailleurs n’a guère la cote aujourd’hui). Mais plutôt avec l’accent sur la communauté rassemblée par le Christ vivant. Sur les disciples d’hier et d’aujourd’hui, voire de demain, qui font corps autour de la fabuleuse nouvelle de Jésus, mort par passion pour nous, mais vivant à tout jamais de cette passion même.

 

En effet, le jour où le Saint-Esprit est donné aux apôtres, que nous célébrons à Pentecôte, est aussi le jour où sont mentionnées pour la première fois les réunions des croyants, mangeant ensemble et priant leur amour, rayonnant la joie de la communion, à la suite de l’émotion suscitée par ce souffle étonnant qu’ils ont reçu. Mais aussi vivant une solidarité stupéfiante (« ils vendaient leurs propriétés et leurs biens et répartissaient l’argent ainsi obtenu entre eux tous, en tenant compte des besoins de chacun »).

  


Aujourd’hui, n’aurions-nous pas besoin d’un petit grain de cette folie communautaire et solidaire ?

 

Plus que jamais, en ces temps d’individualisme exacerbé ; en ces jours de confinement, de contacts restreints et de gestes barrière imposés par la situation sanitaire ; en ce siècle où tant de forces mauvaises tendent à nous séparer les uns des autres, plus que jamais il me semble essentiel de cultiver en nous cette dimension « sociale » de l’Eglise. Nous rapprocher les uns des autres, spirituellement quand ce n’est pas possible physiquement ! Nous embrasser, nous serrer dans les bras mutuellement, au moins par le regard et les paroles, en respectant bien sûr  les distances quand la pandémie nous interdit de passer à l’acte ! Tenir compte des besoins de chacun. Si nous pouvons communier avec Jésus dans la prière, sans qu’il soit présent, pourquoi ne ferions-nous pas de même avec les croyants qui sont à quelques mètres de nous ?

 

Pentecôte, côte à côte (et cette proximité, elle, elle a la cote !). Un temps pour grandir ensemble au soleil de Dieu.

 

 

Jean-Jacques Corbaz

 

 

* merci de rajouter tous les « e » qu’il vous plaira pour rendre mes lignes épicènes ! 

 

 

(Pr, Bi) Pentecôte : une fête étrange

Méditation : les gémissements de l’Esprit

 
La fête de Pentecôte est certainement l’une des plus étranges de l’année chrétienne.
J’entendais l’autre jour des jeunes discuter dans le train de ce week-end particulier dont le principal intérêt à leurs yeux - et la seule chose qu’ils en comprenaient - est qu’il se prolonge par un lundi de congé.
Le terme de Pentecôte signifie littéralement 50 jours après Pâques. Il s’agissait dans le judaïsme ancien de la fête des moissons[1]. La tradition rabbinique y a ajouté une autre dimension en en faisant également la fête du don de la loi aux Israélites. On y célébrait donc à la fois la prodigalité de la nature nourricière et la bonté de Dieu qui offre à son peuple les nourritures tant terrestres que célestes.
Dix jours après l’Ascension de Jésus auprès de son Père,[2] c’est lors de cette fête que le Saint-Esprit se mit à animer les premiers chrétiens pour la première fois,
Mais l’Esprit – ou le Souffle – divin est déjà présent dès le début de la Bible, puisque le livre de Genèse nous dit qu’avant même la création du monde, le souffle de Dieu agitait déjà la surface des eaux.[3]
Il s’agit là de l’entité la plus mystérieuse de la trinité, à côté du Père et du Fils. Mais elle n’en est pas moins essentielle, puisqu’on dit du Saint-Esprit qu’il est la présence agissante de Dieu dans nos vies et dans notre monde.
Alors, la question se pose immédiatement : que fait-il donc, cet Esprit divin censé être ainsi à l’œuvre ?
Il est vrai qu’on pourrait être tenté de répondre qu’on voit surtout ce qu’il ne fait pas : il n’arrête pas les guerres, il n’empêche pas les catastrophes naturelles, il laisse faire les injustices et se développer les maladies, il ne supprime ni les souffrances, ni les douleurs, ni les violences, ni la méchanceté, toutes choses dont nous serions tellement heureux d’être débarrassés.
Face à toutes nos attentes à son égard, on dirait qu’il continue de planer, très loin au-dessus de nos têtes et de nos soucis, indifférent à nos misères…
 
Le mode opératoire du Saint-Esprit
Le récit des Actes des Apôtres qui raconte la première Pentecôte décrit en fait très bien le mode opératoire du Saint-Esprit[4] : il agit à l’intérieur des croyants. S’il ne transforme pas le monde, il transforme des êtres humains. Il les rend témoins actifs de l’amour infini que Dieu porte à chacune de ses créatures.
Et le moins que l’on puisse dire, c’est que cela ne va pas de soi. Déjà, lors de cette toute première effusion de l’Esprit parmi les apôtres, ceux qui en furent spectateurs se moquaient d’eux en les traitant de soûlons.
Peut-être entendrait-on aujourd’hui des mots tels que ʺdoux rêveursʺ ,ʺidéalistesʺ ou ʺnaïfsʺ.
Mais même parmi les chrétiens, l’action du Saint-Esprit a eu du mal à être comprise. L’apôtre Paul aura ainsi fort à faire pour convaincre les Corinthiens qu’il ne s’agissait pas d’entrer en compétition pour savoir lequel d’entre eux était le plus inspiré, comme s’il était possible d’obtenir une dose plus puissante de Saint-Esprit qu’un autre. La marque de l’Esprit, c’est l’amour, leur expliquera-t-il.
Et l’amour est par essence à l’opposé de toute comparaison, de tout classement.
 
Les gémissements de l’Esprit
Une fois posées ces quelques balises, j’aimerais m’arrêter maintenant sur une des caractéristiques de l’Esprit Saint qui m’avait échappé jusqu’à ce jour. Je l’ai trouvée dans la lettre que Paul adressa aux Romains. Il leur écrit ceci : « L’Esprit nous vient en aide dans nos faiblesses, car nous ne savons pas prier comme il faut, mais l’Esprit lui-même intercède pour nous par des gémissements inexprimables. »[5]
Ainsi donc, d’après Paul, une des particularités de L’Esprit de Dieu, c’est qu’il gémit. Plus précisément, qu’il porte par ces propres gémissements notre faiblesse humaine vers Dieu.
Cette action du Saint-Esprit, qui part du plus profond de nous-mêmes pour aller jusqu’à Dieu, a de quoi nous étonner. Car d’habitude on imagine plutôt que le souffle divin intervient dans l’autre sens, qu’il descend du ciel pour remplir les humains de la présence divine.
Mais ici, le mouvement va bel et bien de bas en haut. Le Saint-Esprit fait monter notre détresse jusqu’à Dieu.
D’autre part, notons qu’il le fait par le biais de sons inarticulés. Le contraste avec la foison de langues que les apôtres se mirent à parler au jour de Pentecôte est singulier.
Ainsi, lorsqu’il descend, le Saint-Esprit se manifeste par des paroles qui rejoignent le cœur de chacun, d’où qu’il vienne. Mais lorsqu’il monte du plus profond de nos marasmes humains, il semble alors ne plus avoir de mots.
On sait que le fait de ne pas pouvoir mettre de mots sur nos maux est l’un des aspects les plus angoissants de nos souffrances.
Pouvoir nommer ce qui nous meurtrit, c’est une façon de l’extérioriser, de le contenir.
Par ses gémissements, l’Esprit nous rejoint donc dans ce niveau infra-verbal, là où la souffrance nous broie et nous laisse sans voix, comme en écho au grand cri poussé par Jésus juste avant d’expirer.
Mais Paul nous encourage: grâce aux gémissements de l’Esprit, nous dit-il, les nôtres ne sont pas que des cris de douleur qui se perdent dans la nuit, mais ils sont déposés devant Dieu.
Et ils nous conduisent ainsi à une transformation intérieure marquée par ce que Paul appelle la libération.
Pour illustrer sa pensée, il utilise alors l’image de l’accouchement.[6] De même que la mère se trouve libérée de ses souffrances et apaisée suite à la naissance de son enfant, de même en sera-t-il pour nous.
Mais pas que pour nous, car il est encore un troisième gémissement qu’il nous faut entendre.

En écho aux gémissements de la création
Ce troisième gémissement, c’est celui de la création, dont l’apôtre nous parle en disant ceci : « La création tout entière souffre et gémit. »[7]
Il est frappant de redécouvrir aujourd’hui ces lignes écrites il y a près de 2000 ans et qui résonnent si forts dans notre contexte contemporain. Notre époque est en effet caractérisée par la crise écologique, par la maltraitance dont la nature est victime de la part de l'espèce humaine.
Il est évident que lorsqu’il parlait des gémissements de la création, Paul les entendait autrement que nous. Alors que nous songeons aux désastres écologiques de notre époque (diminution drastique de la biodiversité, déforestation, fonte des pôles, etc…), lui devait se référer aux cataclysmes et aux déchaînements des éléments naturels auxquels il a dû faire face, notamment lors des nombreux naufrages auxquels il a miraculeusement survécu[8]. Il a eu tout loisir alors d’entendre les gémissements du vent dans la tempête, le fracas des vagues et les grondements du tonnerre.
Cela ne nous interdit pourtant pas d’y ajouter le tumulte des icebergs qui s’effondrent dans l’océan Arctique, le crissement des glissements de terrain, les crépitements des incendies de forêts et les cris désespérés des animaux qui en sont victimes.
Quoi qu’il en soit, que ces gémissements soient dus ou non aux actions humaines sur la planète, il est significatif de voir Paul englober la création dans le projet de salut divin. 
 
La souffrance comme un creuset
Car le projet de Dieu est bien un projet de salut universel, et ce aussi bien pour les humains que pour la création. Paul affirme en effet qu'aussi bien la création que chacun d’entre nous serons libérés des souffrances qui nous font gémir.
C’est là l’espérance chrétienne, forgée précisément sous l’action des gémissements de l’Esprit Saint.
Pour Paul, nos souffrances apparaissent ainsi comme une sorte de creuset.
Bien qu’elle n’ait aucun sens ni aucune justification en elle-même, la souffrance fait malheureusement partie de chacune de nos vies.
Mais à ce titre, elle est aussi un des lieux privilégiés de l’action divine.
Car, de même que le Christ est passé par un chemin de souffrances pour aboutir à la vie nouvelle du matin de Pâques, de même, nos chemins de douleurs ne seront pas sans issue.
Cela n’empêche hélas ni la souffrance, ni les gémissements, ni la révolte, ni l’angoisse. Mais cela nous donne une force de résistance, voire de résilience qui nous redonne la parole et nous pousse à l’action, pour transformer nos souffrances et celles de la création en autant de combats pour la vie.
 
Entre gémissements et espérance
Car si les gémissements de l’Esprit nous ouvrent une perspective, ils nous confèrent également une responsabilité.
« La création attend avec impatience la révélation des fils de Dieu » [9], écrit encore Paul.
Je l’ai rappelé plus haut, l’Esprit intervient dans le cœur des humains pour les transformer, plutôt que dans le cours des choses.
S’il porte nos gémissements jusqu’à Dieu pour que s’opère en nous cette transformation, c’est à nous qu’il incombe désormais de soulager la création de ses propres gémissements, pour lui apporter ce soulagement qu’elle attend – nous dit encore Paul – elle aussi avec impatience.
Cette attente, elle est particulièrement palpable aujourd’hui.
Comment ferons-nous pour montrer qu’une vie humaine respectueuse du vivant est possible, pour le bonheur des humains et le salut de la création toute entière ?
C’est la question qui nous est posée en ce jour de Pentecôte.
Inspirés par l’Esprit qui transforme nos gémissements en espérance, et donc en paroles et en actions salutaires. 
Joyeuse fête de Pentecôte à vous !

Christian Vez
 

[1] Deutéronome 16,9-11
[2] Actes des apôtres 2,1-13
[3] Genèse 1,2
[4] Actes 2, 1-13
[5] Romains 8,26 (Vous trouverez ci-dessous la réécriture que j’ai faite de ce passage étonnant qui se trouve dans l’épître aux Romains, chapitre 8, versets 18 à 27.)
[6] Romains 8, 22
[7] ibid
[8] 2 Corinthiens 11,26
[9] Romains 8, 19 (on peut bien sûr ajouter aussi les filles !)
 
Romains 8, 18 - 27
 
J’estime que les souffrances que nous connaissons actuellement ne font pas le poids face à l’intensité de la présence de Dieu qui se manifeste en nous et entre nous.
C’est un fait : la création soupire avec impatience pour que cette présence se manifeste par le biais des enfants de Dieu. Si elle s’est retrouvée livrée au pouvoir du néant, ce n’est certes pas de sa faute, mais par le bon vouloir de Celui qui l’y a livrée. Mais elle garde pourtant une espérance. Car elle sera elle aussi libérée de son carcan. Et elle aura également part à la libération et à la plénitude des enfants de Dieu.
Nous le voyons bien : la création tout entière souffre et gémit, telle une femme en train d’accoucher. Et elle n’est pas la seule : nous aussi, qui avons commencé à vivre du Souffle divin, nous gémissons également en attendant la plénitude de notre adoption divine et la délivrance de notre condition humaine.
Si nous avons déjà été sauvés de nous-mêmes, c’est pourtant encore une espérance qui ne tardera pas à s’accomplir pleinement.
Mais voir ce qu’on espère, ce n’est plus espérer. Comment espérer en effet ce qui est déjà sous nos yeux ? La seule manière d’espérer vraiment, c’est de tendre vers l’accomplissement de cette espérance avec persévérance.
D’ailleurs, le Souffle divin nous aide dans cette tâche, nous qui sommes encore si maladroits dans notre relation nouvelle avec Dieu. Il porte nos gémissements et nos balbutiements auprès de Dieu et s’en fait l’interprète et ne cesse de nous accorder au désir de Dieu pour nous.

(Réécriture de Christian Vez)
 
  

lundi 17 mai 2021

(Bi) Pentecôte, le Saint-Esprit offert

Ce mot de «Saint-Esprit» intrigue souvent. J’ai mis du temps (et des années d’études en théologie!) pour commencer à comprendre ce qu’il désigne.



Pour le dire avec une image: Jésus a traversé notre temps comme un météore. Ou, si vous voulez, comme un caillou lancé dans un lac. Plouf! La pierre a disparu. Elle est devenue invisible, mais il reste une trace de son passage: il reste les cercles, concentriques, qui entourent le point où le caillou a traversé la surface.


Vous le savez, ces cercles se déplacent. Ils grandissent! Ils ont toujours le même centre, mais ils vont porter de plus en plus loin le mouvement de l’eau, animée par mon projectile. Ce n’est plus la pierre qui fait bouger le lac, c’est l’eau elle-même qui transmet à l’eau, plus loin, le mouvement qu’elle a reçu.



C’est cela, le Saint-Esprit, offert à Pentecôte: la force que nous donne le mouvement que le météore Jésus-Christ a provoqué, il y a 2000 ans. La force qui nous permet de nous transmettre les uns aux autres la dynamique qui grandit, qui va toujours plus loin, tout en gardant le même centre: le centre, c’est le Crucifié ressuscité au temps de Ponce Pilate!

Le temps de Pentecôte est un temps donc pour nous parler de l’amour de Dieu. Le temps du téléphone, de la lettre, de la visite, de la prière partagée. Le temps d’un courant qui passe d’un point à un autre, d’une personne à une seconde personne.



Savez-vous, amateurs de paraboles, que le courant électrique circule toujours entre deux pôles différents? D’un pôle positif à un pôle positif, le courant ne passe pas. De même pour le vent: il faut des différences de pressions, ou de températures, sinon c’est le calme plat. De même encore pour les rivières: il faut une différence d’altitude pour que l’eau coule!



De même, toujours, le courant de Pentecôte circule entre des humains différents, multiples et parfois complémentaires! Il nous rend capables de communiquer, malgré nos diversités; de nous parler de la stupéfiante passion de Christ pour chacun(e); de nous comprendre, à l’image des croyants du livre des Actes. Il nous permet de nous rejoindre, de nous aimer. Comme Dieu l’a fait pour nous, en premier!



Pentecôte est le temps de la rencontre. De l’unité dans la diversité. Le temps du corps du Christ, formé d’oreilles, de bouches, de mains; de cerveaux, de coeurs, de tripes, et même d’autres parties moins glorieuses, et pourtant nécessaires. Si diverses, mais qui toutes vivent parce qu’elles sont reliées par le même sang. Saurons-nous nous regarder ainsi?


Jean-Jacques Corbaz


(voir aussi https://textesdejjcorbaz.blogspot.com/2014/06/vu-fa-sb-pentecote-pour-les-nuls.html)



(Pr) Ascension. Ça ne tient pas debout?!

 9, 16 et 17 mai 2021: «Elie, Jésus et le téléphérique»



Lectures: 1 Rois 19, 9-13; Jean 13, 3-9



Chers amis en Christ, depuis l’Ascension, Jésus nous appelle à nous élever avec lui pour contempler les splendeurs de l’éternité et sa lumière. Pour cela, ce matin, je vous invite symboliquement à la montagne (Ascension, Pentecôte: c’est toujours monter la côte!).

Mais pour rejoindre les sommets, quel moyen de locomotion choisir? Le premier qui me vient à l’esprit, c’est le téléphérique. Car c’est bien pratique! Ça vous emmène sans effort à 3000 m. d'altitude, jusqu'à un endroit où la vue est à couper le souffle. Pas besoin de peiner pendant des heures, grimper des sentiers raides, pierreux, enneigés, malaisés…

C'est beau, la technique!

L’ennui, c'est que nous nous habituons à ce genre de facilité. Nos vies sont truffées de combines pour économiser des efforts. Alors, nous finissons par trouver normal de toujours disposer de solutions rapides et faciles. Nous aimerions une vie pleine de téléphériques, et dans tous les domaines.

Par exemple, pour croire en Dieu. Certains voudraient bien la foi, mais à condition qu'elle nous emmène vite fait jusqu'au sommet, là où tout nous sera révélé d'un coup! Ils attendent du pasteur qu'il soit pour eux un téléphérique de la religion, capable de les déposer en trois phrases sur les hauteurs, où il n'y aurait plus de questions!

Comme disait avec un humour involontaire ce curé pour indiquer le chemin de son centre paroissial: «On peut arriver directement au Christ-Sauveur par un raccourci depuis la gare»...

Hélas (comme disent les Grecs quand ils sont dans la mélasse)! Hélas. Pour vivre une relation avec Dieu qui nous soit réellement bienfaisante... pour en recevoir liberté et paix... eh bien, c'est une construction de longue haleine! C'est un apprentissage qui demande du temps.



Il est arrivé plusieurs fois que des personnes adultes me demandent d’être baptisées. Je ne leur réponds jamais: “Bon, ce sera pour la semaine prochaine”! Je leur propose un parcours de deux ans, plusieurs heures par mois, pour commencer à explorer les dimensions de la foi au Christ. Pour commencer!

Qu’on soit adulte ou adolescent, le catéchisme ne suffit pas pour atteindre le panorama complet de la vie avec Dieu! Certes, ces parcours permettent de découvrir plusieurs sentiers de montagne intéressants -pour rester dans notre image-; certains catéchumènes commencent à voir quelques paysages superbes; mais, pour l'ivresse des sommets, hem, il y a encore de belles parois à gravir!

Cet apprentissage demande du temps, et il importe aussi d’être aidé. Eh bien, l’Eglise (la communauté chrétienne), ça sert à ça! L’Eglise, c’est un groupe de personnes qui cherchent, et qui s’entraident pour progresser dans la découverte de Dieu. Qui s’encouragent et se donnent des tuyaux les uns aux autres.
   


Trop souvent encore, nous cherchons Dieu là où il n'est pas. Comme dans l'histoire du prophète Elie, que nous venons d'entendre. Nous imaginons que Dieu se trouve dans le fracas de la tempête... ou dans le tremblement de terre... ou dans le feu... Mais non: il se tient dans un souffle fragile, un souffle si faible, si ténu que souvent, on ne le perçoit même pas.

Quand nous étions enfants, nous cherchions sans doute Dieu dans les histoires dorées de Noël... dans les anges à plumes... dans une prière magique... dans les miracles inouïs ou les contes extraordinaires... Dans les images donc que la Bible emploie pour nous parler des infinies subtilités de la vie spirituelle; dans les images que la Bible utilise pour nous partager les enthousiasmes qu’elle peut susciter.

Peut-être aussi avons-nous cherché Dieu dans une morale; une obéissance; une Loi, comme les croyants de l'Ancien Testament.

Aujourd'hui, nous avons évolué, et c'est réjouissant! Je nous souhaite de continuer à chercher, du côté d'une amitié solidaire davantage que d'une baguette magique. Chercher du côté d'une lumière, d'un sens à la vie, d'un courage, davantage que d'une rigidité qui interdit, qui tranche ou excommunie. Le Dieu en qui je crois, il n'exclut jamais, son amour passionné est plus grand que toute loi!


Serons-nous capables, comme Elie, de le reconnaître dans le souffle fragile d'une amitié infiniment discrète (plus discrète que ça, tu meurs)? En fait, je me dis que Dieu n'est pas ailleurs que là où nous sommes! Pas besoin de parcourir le ciel! Mieux je connais le Christ, et plus je comprends que le sommet de la montagne, il est à l'intérieur de moi!!

Il ne s'agit donc pas de guetter des anges munis d'ailes emplumées; ni d'être à l'affût de miracles scientifiquement démontrables; ni de preuves de puissance, à l'image de ces foules qui prenaient Jésus pour un roi, le jour des Rameaux. On risquerait alors de passer complètement à côté de l’évangile!

Il s'agit plutôt de discerner, dans nos journées très ordinaires, les signes légers qui parlent de présence et de confiance. Qui insufflent un amour plus fort que la mort, tel celui du Ressuscité.

Ne prions donc pas comme les hommes des cavernes, pour essayer de changer Dieu... pour lui demander telle ou telle chose qu'il ne donnerait pas sinon! Cette prière-là, elle est souvent vouée à l'échec. Entre Dieu et nous, vous pensez, il n'y a qu'une seule personne à fléchir, à améliorer: c'est nous!

Prions donc surtout pour nous changer, nous! Pour mieux devenir capables de favoriser la paix... la confiance... le respect... la solidarité! Et alors, cette prière-là, elle va nous mettre en route! Nous dévoiler quelques paysages nouveaux, au fil de notre ascension!

Vous me direz que je suis dur, ce matin! Car je nous prive (1°) de téléphérique, (2°) d'ailes, et encore (3°) de baguette magique!

Mais, comme je n'ai pas envie de vous laisser à pied, je vous propose un autre moyen de transport!

(montrer l’objet symbolique: un VTT)
 
 

Un vélo. Plus précisément un VTT. De quoi progresser dans la montagne, à la découverte de Dieu, et donc de nous-même! Ou plutôt à la découverte de nous-même, et donc de Dieu!

Peut-être qu’un sceptique, en m'écoutant, se dirait «Mais tout ça, ça ne tient pas debout!» Bien des gens extérieurs à la foi le pensent, à propos de la Bible, à propos de la vie spirituelle: «ça ne tient pas debout!»

Eh bien, mon vélo, lui non plus: tout seul, il ne tient pas debout! Il n'a pas de pied; pas de béquille! Tout seul, il ne tient pas debout, mais si on se met dessus et qu’on pédale, vous verrez comme il tient debout! Et comme il peut conduire très loin! Un de mes anciens paroissiens de Goumoens est même allé à vélo jusqu’en Chine!

C'est la même chose pour la foi chrétienne: si nous la regardons les bras croisés, elle ne rime à rien, et elle ne nous sera d'aucun secours. Mais, si nous y mettons notre force, et notre envie d'avancer, et notre passion, et notre pétillance, alors, elle pourra nous emmener très loin, vers des paysages à couper le souffle! Sans béquille! Elle multipliera notre énergie, comme les pignons de mon vélo!

Allez, bon voyage! Et bonne Ascension, tous les jours de l’année!  Amen

 



Jean-Jacques Corbaz