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dimanche 14 septembre 2014

(Pr) Secte ou cadeau, l'offrande - prédic du 14 9 14

Matthieu 10, 1-8; 2 Corinthiens 8, 1-9 + 13-15; Matthieu 25, 31-40

Une paroissienne me disait un jour: "Pour moi, ce qui caractérise une secte, c'est qu'elle demande de l'argent..."

Oups! J'ai souri, euh... un peu jaune, en pensant à quel point notre Église a besoin de la générosité des siens aujourd'hui. Nous sommes de moins en moins soutenus par l'État, et donc nous devons solliciter de plus en plus le porte-monnaie, ou plutôt le portefeuille de chacun(e). Vous vous souvenez peut-être de ce superbe dessin de Burki, paru dans 24Heures il y a 5 ans:


L'Église Réformée du Canton de Vaud a été longtemps une institution dans notre pays. Les pasteurs étaient salariés par l'État, et les lieux de culte ou les salles de paroisses étaient entièrement pris en charge par les communes. Nous avons pris l'habitude de ce train de vie confortable.

Or, aujourd'hui, la situation a bien changé. Je souhaite vous en parler ce matin, pas tellement pour faire pression sur vous et vous inciter à donner davantage (ce qui est bien peu évangélique!), mais pour que vous puissiez mieux comprendre le pourquoi de nos sollicitations financières! J'aimerais que vous puissiez entendre cette prédication sans culpabiliser. À titre d'information. Et pour cela, je vous invite d'abord à faire un peu d'histoire récente.

En 1970, le peuple vaudois a accepté le "statut des catholiques", stipulant que l'État se charge du salaire d'autant de prêtres de l'Église catholique que de pasteurs protestants, en proportion de la population des deux confessions. C'était très équitable.

Mais ce système nous a joué des tours! Car nos frères catholiques n'ont jamais reçu la totalité de ce à quoi ils avaient droit. En effet, ils n'avaient pas assez de prêtres pour occuper tous les postes que l'État devait leur payer. Le Canton a ainsi économisé environ 36 salaires pendant une trentaine d'années!

Et quand la nouvelle constitution vaudoise est entrée en vigueur, le statut a été modifié: les Églises reçoivent non plus les salaires de X postes, mais des subventions globales. La somme totale versée aux deux Églises sur les dernières années a alors été répartie, toujours en proportion de la population des deux confessions. Attention, la somme totale versée, donc sans les 36 postes catholiques reconnus mais non occupés. Par conséquent nous, réformés, avons perdu ainsi les salaires de 18 pasteurs, juste parce que les catholiques n'utilisaient pas l'entier de la dotation à laquelle ils avaient droit... Et cela, alors que la population du canton, même des protestants, augmente régulièrement. Et que les besoins spirituels croissent eux aussi de manière importante. Ne nous reste que le choix de payer nous-mêmes ces postes, ou de les supprimer...

Regretter le passé ne nous avancera pas. Et revenir en arrière est impossible. Essayons plutôt de trouver du positif dans ce qui nous arrive. Car cette "entrée choc" dans le 21è siècle peut nous amener à progresser dans trois dimensions (au moins!): elle peut nous faire progresser en responsabilité; elle peut susciter en nous davantage d'enthousiasme et de vigueur missionnaire; et enfin elle peut nous faire grandir spirituellement.


Reprenons l'un après l'autre ces trois bénéfices (si j'ose dire... Oui, j'ose: bénéfices!).

D'abord, ce changement de régime financier peut nous enrichir en responsabilité. Il est devenu impossible, aujourd'hui, d'entrer dans l'Église comme dans un hôtel cinq étoiles, tout confort. Chacune des personnes qui s'y engage est invitée à retrousser ses manches: soit en soutenant financièrement les activités de sa communauté chrétienne; soit en assumant des responsabilités dont certaines étaient autrefois du resssort des pasteurs, comme le catéchisme, ou les visites; ou quantités de démarches que seuls peuvent mesurer les membres d'un conseil paroissial. Autrement dit, si nous voulons que l'Eglise vive, c'est à nous de lui en donner les moyens, sans compter d'abord sur les autres.

Ensuite, ce changement peut susciter en nous plus de vigueur missionnaire et d'enthousiasme. En effet, nous aurons avantage à être plus nombreux à partager ces tâches et ce soutien. Il s'agira d'intéresser davantage de monde à nos actions, à notre message. Nous apprendrons à mieux communiquer, à mieux mettre en évidence nos valeurs, nos points forts. Par exemple des promesses de l'évangile vécues dans le respect de chacun(e), sans jugement ou exclusion; la priorité du spirituel sur le matériel; un amour reçu sans conditions. Nous gagnerons à nous présenter comme des artisans de changement, porteurs de projets pour notre société, et non plus comme des gens qui perpétuent un ron-ron que certains considèrent comme légèrement désuet.

Et puis, en faisant cela, nous retirerons automatiquement le troisième bénéfice, celui de grandir spirituellement. Car nous devrons nous remettre en question; ne rien considérer comme acquis; chercher toujours à nous rapprocher des vérités de l'évangile. Nous deviendrons plus pauvres au sens des Béatitudes, c'est-à-dire mieux conscients de nos fragilités; donc plus disponibles à la proximité de Dieu.

Voilà, je suis convaincu que le grand virage que nous prenons en ce début de siècle peut devenir une chance pour nous. Celle de former une communauté chrétienne plus vivante et plus rayonnante, pétillante, stimulante.

Nous l'avons entendu, Jésus disait à ses disciples: "Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement!" Pourrons-nous encore vivre notre foi ainsi, ces prochaines décennies? Ah, je l'espère. À mon sens, il serait regrettable de devoir faire passer les familles à la caisse pour un baptême, un mariage ou un service funèbre. Et ce sera toujours un "plus" pour nous de réaliser l'énorme gratuité du cadeau que Dieu nous offre. Ses promesses de pardon, de salut. Le fait que, chacun(e), nous sommes pour lui infiniment précieux.

Vous commencez à vous en rendre compte sérieusement, j'imagine, cela va changer de manière importante notre manière de vivre l'offrande. Nos engagements financiers pour notre paroisse, notre Eglise, vont être repensés. Et, peut-être, stimulés (je l'espère!)... Je repense à ce vieux pasteur du Midi qui lançait à ses paroissiens, un jour de fête de l'offrande: "Dieu ne s'intéresse pas à ce que vous donnez, mais à ce que vous gardez"!

Bien sûr, il y a (toujours!) la tentation du repli. La tentation de nous dire qu'au fond, nous pourrions diminuer nos versements à la caisse de l'EERV, à Lausanne, et que tant que notre paroisse fonctionne, c'est l'essentiel...

Mais ce serait ignorer que la caisse de l'EERV, à Lausanne, c'est nous aussi. Par exemple, l'Etat nous laisse maintenant gérer les ministres et autres personnes employées par l'Eglise. Cela signifie calculer les fiches de paie, remplir les formulaires pour l'AVS, pour les assurances accident, pour les impôts; trouver des remplaçants quand c'est nécessaire, pour les postes vacants, les maladies ou autres arrêts de travail; organiser la desserte la meilleure possible du canton, en tenant compte des particularités de tous... Pour accomplir ces tâches administratives qui étaient autrefois assumées par l'Etat, il faut salarier plusieurs personnes.

Et puis, les paroisses ne peuvent plus tout faire. Il y a de plus en plus de tâches qui doivent être empoignées au niveau cantonal ou au niveau régional: le journal Bonne Nouvelle; les sites internet; la présence dans les EMS, les hôpitaux et autres institutions; les aumôneries de jeunesse, des gymnases ou des Hautes Ecoles, qui font un superbe boulot pour la nouvelle génération; la préparation de matériel attractif pour les enfants et les catéchumènes, c'est important. Sans oublier les animations comme celles de St-François ou de Crêt-Bérard, qui sont suivies par un large public, pas toujours celui de nos paroisses... Il y en a encore des ratapées! Tout cela, ce sont nos contributions à la caisse de l'EERV qui permettent.

Enfin, n'oublions pas la solidarité, qui se développe continuellement, puisque les misères augmentent encore plus vite! Centre Social Protestant, entraides, Terre Nouvelle, réfugiés... Notre Eglise trouve essentiel de vivre sa foi aussi dans la dimension de la générosité pour les plus fragiles, les démunis, qui sont la présence du Christ parmi nous, selon l'évangile.

Oui, les besoins sont immenses. Et notre Eglise est sans cesse confrontée à l'impossible défi de vouloir d'une part être présente et agissante au mieux, le plus largement possible; et en même temps de "faire avec" les contributions des paroisses, et leurs pauvretés. Sachez-le: notre Eglise accomplit le maximum avec ce qu'elle reçoit, et elle traque le gaspi partout où elle peut!

Pour terminer, laissez-moi revenir à la paroissienne qui disait: "Ce qui caractérise une secte, c'est qu'elle demande de l'argent..."  Je lui ai répondu en lui parlant de l'Eglise Libre que j'ai connue dans mon enfance. Elle n'était absolument pas soutenue par les pouvoirs publics, elle dépendait de la seule générosité de ses fidèles. Malgré cela (ou à cause de cela, peut-être?), elle a été un terreau extraordinairement fertile de conviction ouverte; d'engagement responsable; de mission enthousiaste et de rayonnement évangélique. Tout cela, sans le moindre esprit sectaire!

Amen

JJ Corbaz

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