"Je sais bien la source qui coule et fuit,
Malgré la nuit
Elle est cachée cette éternelle source,
Moi je sais bien là où elle vient sourdre,
Malgré la nuit
Je n’en sait, l’origine n’en a point
Mais je sais que toute origine en vient,
Malgré la nuit
Je sais qu’il n’est nulle chose si belle,
Et que les cieux, la terre boivent en elle
Malgré la nuit
De fond, je sais qu’on en peut découvrir,
Et que nul à gué ne peut la franchir,
Malgré la nuit
Sa lumière jamais n’est obscurcie,
Et je sais que tout éclat en surgit
Malgré la nuit
Je sais qu’ils sont si puissants, ses courants,
Qu’ils baignent tout l’enfer, les cieux, les gens,
Malgré la nuit
Issu de cette source, le courant
Est si vaste, je le sais si puissant,
Malgré la nuit
Le courant qui, de ses deux-là procède,
L’une ou l’autre je sais ne le précède,
Malgré la nuit
Cette éternelle source, elle est enfouie
En ce pain vif, pour nous donner la vie,
Malgré la nuit
C’est là qu’on appelle les créatures,
Qui boivent de cette eau, même en l’obscur,
Car c’est la nuit
Cette source vive que je désire,
C’est de ce pain de vie que je la tire,
Malgré la nuit."
St Jean de la Croix, « Nuit obscure, Cantique spirituel ».
D’après la traduction de J. ANCET, « Poésie », Gallimard, 1997
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