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vendredi 30 mars 2018

(Pr) Jésus est mort. En quoi est-ce une bonne nouvelle?



Prédication de Vendredi saint 30 mars 18, Huémoz

«Je n’ai rien voulu savoir d’autre»


Lectures: Matthieu 27, 27-50;  1 Corinthiens 2, 1-2 (+ Ps. 118 introït)


L’année chrétienne est jalonnée de fêtes.

Certaines sont hyper-connues, par exemple Pâques et Noël. Et d’autres beaucoup moins, comme l’Ascension et Pentecôte, qui ne doivent qu’à leur jour de congé de ne pas être tombées dans l’oubli.

Et Vendredi saint, que nous célébrons aujourd’hui? Quelle est sa place?

Vous l’avez entendu, lorsque l’apôtre Paul veut exprimer en un seul mot ce qu’il a découvert au centre de la foi, il ne mentionne ni Pâques ni Noël. Pour lui, le coeur de l’Evangile, c’est la croix. La Bonne Nouvelle, qui est bonne pour chacun(e), parce qu’elle est capable de renouveler toute personne, quelle qu’elle soit,  c’est d’abord l’évènement de Vendredi saint, Jésus crucifié!

“J’ai décidé, écrit Paul aux Corinthiens, j’ai décidé de ne rien savoir d’autre parmi vous que Jésus Christ, et Jésus Christ crucifié”.

L’acte décisif de notre salut, il se place ce vendredi-là, que nous appelons à juste titre “Vendredi saint”. Et dont on dit même que c’est une fête.
  


Pourquoi donc? Pourquoi les chrétiens ont-ils pris comme centre de leur foi ce qui est d’abord un échec, ce qui paraît le comble de la souffrance et de l’abaissement? Pourquoi le signe, le symbole des croyants au Christ est-il la croix?

Dans les évangiles, on lit que les disciples ont ressenti la mort de Jésus comme une écrasante défaite, qui les a laissés désemparés. Comment se fait-il qu’un peu plus tard, ces mêmes disciples s’acharnent à mettre en évidence cette catastrophe? Dans l’optique d’une évangélisation efficace, le simple bon sens aurait commandé de porter l’accent sur autre chose que la fin désastreuse du fils de Dieu, non?

D’où vient cette insistance de Paul et de beaucoup d’apôtres? “Parmi vous, je n’ai rien voulu savoir d’autre que Jésus Christ, et Jésus Christ crucifié”.

Ce changement de perspective vient du fait capital que, pour les disciples, ce qu’ils avaient d’abord ressenti comme l’échec   de Jésus s’est révélé sa victoire. Leur interprétation des évènements a été tournée à l’envers par un fait nouveau, et ce fait nouveau c’est la résurrection.

Les disciples ont été témoins, d’abord stupéfaits, souvent incrédules, témoins que leur maître après sa mort était toujours vivant et agissant. Petit à petit s’est glissée en eux la certitude que dans cette mort même Dieu avait montré le plus fort de sa puissance créatrice. Il y avait fait la démonstration éclatante que la mort n’est pas une défaite; autrement dit, que quand on est relié à Dieu, même la mort peut avoir un sens.



À partir de ce bouleversement, toute la foi des disciples s’est restructurée, reconstruite, autour de Vendredi saint. Comme le disait déjà le Psaume 118: “La pierre que les bâtisseurs avaient rejetée est devenue la pierre de l’angle, la pierre principale” (v. 22).

Ainsi, la foi dans le Christ ressuscité a fait réinterpréter toute la vie et la mort de Jésus, son enseignement et ses actes... On s’est aperçu que la croix n’était pas une fin un peu étrange, mais un signe, une preuve même que Dieu est avec nous partout, y compris dans la souffrance la plus horrible, y compris dans la pire injustice, y compris dans l’échec le plus intolérable. Que partout Dieu est avec nous comme créateur, ouvreur d’horizons nouveaux, espoir et vie!

Les victimes de violences, les innocents sacrifiés le trouveront à leur côté infiniment proche, qu’ils soient dans les camps de concentration nazis, dans les salles de torture en Turquie ou dans les bateaux qui coulent en Méditerranée, surchargés de migrants; qu’ils soient dans nos hôpitaux ou dans les cimetières de nos villages. “Même quand je passerai par la vallée de l’ombre de la mort, je n’aurai pas peur, Seigneur, car tu es avec moi. Tu me conduis, tu me protèges. Auprès de toi, je suis en sécurité” (Ps. 23).

Sachez-le: c’est la résurrection, au matin de Pâques, qui nous permet de vivre Vendredi saint comme une fête, vraiment. Une fête qui fait de Jésus crucifié le signe de l’amour de Dieu, le signe d’un amour fou, inconcevable; d’un amour comme on n’en verra jamais de pareil. Le signe de son pardon. De sa victoire sur toute forme de désespoir.
 

Il est génial (et je pèse mes mots!), il est génial que notre religion ait compris le véritable visage de Dieu, le but ultime de sa révélation: que c’est justement dans la pire catastrophe, dans le sommet de l’injustice que le Christ est venu planter sa présence lumineuse, sa victoire. C’est justement en priorité pour les victimes de toutes les atrocités qu’il s’est fait proche, qu’il s’est montré sauveur, et réconciliateur, et bon berger. Pour tous ceux qui, à la suite de Jésus, s’identifient à l’auteur du Psaume 22, priant dans la détresse: “Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné?” (v. 2).
 
Ainsi, les humains ont bénéficié de multiples manières de l’évènement de Golgotha. Beaucoup y ont reçu un signe d’amour, de solidarité, de proximité de Dieu. Si certains ont appris à pardonner, tous ont pu connaître qu’ils étaient pardonnés. À cause de Jésus, plusieurs ont pu mourir sereins, mais certains ont compris qu’il fallait combattre et vivre.

À cause de Jésus mort sur la croix, quelques-uns ont pu donner leur vie en mourant, tel le lieutenant-colonel Arnaud Beltrane, ce croyant convaincu dont vous avez pu lire l’histoire dans les journaux tout récemment; quelques-uns ont pu donner leur vie en mourant, et d’autres l’ont donnée en vivant, en assumant leurs responsabilités, en portant visiblement la passion de Dieu pour tout être qui vit, de manière chaleureuse et rayonnante!
 

Pour cette mort, que nous fêtons, oui, fêtons aujourd’hui, disons MERCI! Et que ce Vendredi saint nous remette au coeur, et à l’esprit, cet appel de l’évangile à laisser Dieu nous rejoindre; à laisser Dieu nous aimer; à laisser Dieu vaincre, en nous. Amen                                          


Jean-Jacques Corbaz 



dimanche 4 mars 2018

(Pr, Li) Dieu, et la violence?

Prédication du 4 mars 2018, Ollon et liturgie de bénédiction
«La jalousie de Dieu - la guerre sainte»


Lectures: Nombres 25, 1-5; 2 Samuel 18, 31 – 19, 5; Jean 3, 14-17



Nous n’aimons pas la violence. Et nous avons cent fois raison. Nous pressentons bien que Dieu non plus n’aime pas la violence! Mais que faut-il faire de ces passages de l’Ancien Testament (AT) qui prônent l’extermination des infidèles? Que faut-il penser de ces soi-disant “missionnaires” qui, il y a quelques siècles à peine, obligeaient les prétendus “sauvages” à choisir: soit la conversion au christianisme, soit la mort violente?
  


Les musulmans intégristes ont vite répondu à cette question: pour eux, la guerre aux infidèles serait non seulement tolérée par Allah, mais encouragée. Or, attention, cette attitude n’est le fait que d’une minorité de musulmans, fanatiques et intolérants. Dommage, évidemment, qu’on parle d’eux bien davantage que de la majorité, infiniment plus ouverte et pacifique!

Chez les chrétiens aussi, du reste, on trouve des demi-fous qui appellent à la croisade. Au Moyen Âge, nos Eglises étaient  en plein dans cette violence.

Evitons donc les schémas simplistes, du style “les musulmans  tout noirs, les chrétiens tout blancs”; ou “y en a point comme nous”! Evitons aussi, bien sûr, à l’opposé d’accuser la foi en l’évangile de tous les maux, comme certains l’ont fait.

La réalité, c’est que la violence est au coeur de l’être humain. De tout être humain, en moi comme en chacun(e) de vous! Sinon nos ancêtres des cavernes n’auraient pas survécu, d’ailleurs. La violence est au coeur de chacun, et seules quelques toutes grandes personnalités, comme Gandhi ou Martin Luther King, sont arrivées à extirper totalement cette violence de leur être.
  
Or, Dieu s’est révélé à nous à travers des paroles humaines; à travers des systèmes de pensées, à travers des schémas humains. Dieu s’est montré à nous, dans toute la Bible, en passant par nos tripes, en passant par nos sentiments, nos épaisseurs humaines; en passant par nos intelligences limitées et orientées, en passant donc aussi par nos préjugés, nos défauts, nos oeillères. Et nos violences!

Pour dire qui est Dieu, il a bien fallu utiliser nos mots maladroits, nos raisonnements imparfaits, nos cultures imprégnées de petitesses toutes humaines!


Si vous deviez expliquer à une abeille ce qu’est l’amour maternel, dans un langage abeille (à supposer que vous la connaissiez, cette langue!), quel serait le résultat? ... Vous parleriez de leurs larves; mais que savons-nous des sentiments des abeilles pour les larves? Vous parleriez de prendre soin, de veiller sur, de protéger... alors que tout ça n’a aucun sens pour une abeille, surtout que c’est une ouvrière qui ne peut pas se reproduire!! Bref, c’est sans espoir.

Tout cela pour vous aider à mesurer l’impossible défi que représente l’envie de Dieu de se faire connaître à l’humanité! Dieu qui est cent mille fois plus différent de nous que nous ne le sommes d’une abeille! L’impossible défi aussi, bien sûr, de parler de lui à nos enfants, à nos contemporains, ou aux peuples à qui nous annonçons l’évangile, à travers ce qu’on appelle la mission.

Depuis la première mission, celle de Dieu lui-même, c’était la plantée garantie, vous êtes d’accord?!

Donc, il a bien fallu, il faut bien, aujourd’hui encore, passer par nos étroitesses, nos sentiments faussés; en sachant que le résultat sera de toute façon incomplet, décevant. En sachant que tout ce que nous disons de Dieu est une projection à partir de nos vécus humains, une déformation imposée par notre langage et nos raisonnements trop particuliers. Pour dire Dieu tout spécialement, traduire, c’est trahir!
  


Un bon exemple, c’est le thème d’aujourd’hui: la jalousie de Dieu. Pour les peuplades guerrières et à moitié civilisées qui vivaient au temps de Moïse, il était nécessaire de parler d’un Dieu qui ne supporte pas la concurrence d’autres divinités. Cela pour éviter que les religions ne se mélangent, pour éviter que les peuples convertis au Dieu d’Israël ne conservent en même temps leurs anciennes traditions religieuses; leurs adorations païennes; leurs superstitions, incompatibles avec la nouvelle foi.

- Et nous savons que ce mélange a été extraordinairement difficile à éviter; qu’il a fallu batailler à de nombreuses reprises pour qu’Israël ne sombre pas dans une “puissante” mixture avec les Baal, Astarté, et autres divinités de Babylone ou de Canaan.

Donc, il fallait, pour que la foi survive, dire que Dieu était jaloux. Mais la jalousie, en ce temps-là, s’exprimait par la violence, en cas d’infidélité. C’était automatique. À cette époque, une jalousie sans violence aurait été comme une loi sans amende ou autre sanction en cas d’infraction: inimaginable. Ç’aurait été un aveu de désintérêt, de faiblesse. Impossible!

Voilà pourquoi de nombreux passages de l’AT décrivent Dieu comme exigeant une entière adhésion, sans compromis - ce qui est toujours d’actualité! Mais avec des sanctions qui vont souvent jusqu’à la mort. C’était la norme, alors. Une norme qui est “joyeusement” appliquée par Moïse, dans notre récit du livre des Nombres.

Avez-vous remarqué? Comme Elie avec les prophètes de Baal dans l’épisode du sacrifice au Carmel, Moïse va bien plus loin que ce que Dieu demande. Il commet un énorme excès de zèle! Dieu lui dit de pendre les chefs du peuple, mais Moïse fait exécuter tous les Israélites idolâtres.

Pourtant, je vous l’ai dit, Dieu a essayé de relever le défi. Il a parfois réussi à ouvrir de petites brèches dans ces normes pesantes. Tout-à-coup, une phrase ou une image montre un aspect de Dieu qui tranche avec les croyances de l’époque. Une parole “avant-gardiste”, dirait-on aujourd’hui. Dans la Bible, on dit: une parole prophétique.
  


C’est ainsi qu’Elie, après le massacre du Carmel, doit fuir au désert; et là, à l’Horeb, à la montagne sainte, c’est l’épisode du souffle fragile, qui lui fait découvrir que Dieu n’est pas dans la violence, mais qu’il se donne dans la faiblesse. Annonçant ainsi la crucifixion de Jésus.

Parole prophétique, c’est aussi le cas de ce récit du roi David,  dont nous avons entendu un extrait tout-à-l’heure. David, séducteur impénitent; David à qui le pouvoir était monté à la tête, jusqu’à faire tuer un de ses meilleurs officiers pour s’approprier son épouse; ce même David, à la fin de sa vie, est traité comme il a traité les autres: ses propres fils lui font la guerre, obnubilés par le pouvoir royal et ses richesses. Eh bien David, quand il apprend que la guerre civile s’est achevée par la défaite de son fils rebelle, Absalom, et par sa mort, David pleure en répétant: “Absalom, mon fils, que ne suis-je mort à ta place? Absalom, mon fils, que ne suis-je mort à ta place?”

Parabole! Superbe image! Cet épisode nous parle de Dieu! En même temps que sa jalousie; juste à côté de son refus des compromis religieux, il nous fait découvrir son immense tendresse, infiniment plus grande encore que son intransigeance. À travers David pleurant, Dieu nous dit, à nous aussi, à nous pécheurs, à nous qui le trahissons si souvent, Dieu nous dit aussi: “Mon fils, que ne suis-je mort à ta place?”



Il le dit, et il le fait, en Jésus Christ, il meurt à notre place pour nous libérer de nos culpabilités!

Voilà comment l’AT (et le Nouveau également, bien entendu) sont des mélanges d’épaisseurs humaines et d’éclairs prophétiques lumineux, qui annoncent les dimensions toujours nouvelles de l’amour de Dieu!

Ne dites jamais: “Dieu est comme ceci, c’est écrit dans la Bible”, sans ajouter: “Mais il est aussi très différent, c’est également écrit dans la Bible”! - La Bible qui n’est que le pâle reflet de la lumière  indescriptible de Dieu, indicible (soit: impossible à dire).

Ne tirez jamais des conclusions exclusives d’un seul passage biblique, sans regarder encore tout ce qui le nuance, le complète, le corrige. Nos langages humains sont incapables de dire autre chose que des caricatures, des simplifications extrêmes, quand ils essaient de décrire la transcendance.

Vous me direz: la Bible n’est-elle pas la parole de Dieu? Oui, mais c’est une parole immergée, figée, réduite dès qu’elle est exprimée dans nos mots humains, dans nos cultures terrestres. On ne peut pas représenter la quatrième dimension dans nos trois dimensions sans l’appauvrir considérablement.

Et c’est pour cela que nous avons besoin de quatre évangiles, et non d’un seul, pour esquisser le message de Jésus. Et c’est pour cela que nous avons besoin de 66 livres bibliques, dans leur diversité, pour parler de Dieu sous autant d’angles différents. Et c’est pour cela que nous avons besoin du Saint-Esprit, du souvenir dynamique du Christ, pour éclairer notre lanterne trop souvent embuée par nos préjugés!

  

Alors, dans nos limites, dans nos maladresses, redisons-nous souvent cet autre éclair prophétique de notre livre saint: “Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son fils unique afin que quiconque croit en lui ne soit pas perdu, mais qu’il ait la vie éternelle. Dieu n’a pas envoyé son fils dans le monde pour nous condamner, mais pour nous sauver”.
Amen                                          


Jean-Jacques Corbaz  





 

Bénédiction finale:

Dans le livre des Actes, il est dit aux apôtres: “Ne regardez pas vers le ciel” (mais vers la Terre)...
La Bible entière aujourd’hui nous dit: “Regardez le ciel! Regardez la Terre! Regardez-vous vous-mêmes!
Fermez les yeux, parfois! Ouvrez-les parfois sur le monde et ses peines!
C’est par ces mille regards différents que vous pourrez mieux discerner Dieu votre Père, lui dont la hauteur; lui dont la largeur; lui dont la profondeur dépassent toujours infiniment tout ce que vous pouvez comprendre de lui, et de son amour passionné!”
Tels que nous sommes, et tel qu’il est, Dieu nous bénit, le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Amen