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dimanche 23 novembre 2014

(Pr, Li, Vu) Halloween? Toussaint? Quelles relations avec nos défunts? - Prédication du 23 nov. 2014


 Lectures: Jean 11, 17-27; Jean 11, 28-37; Jean 11, 38-44 


En tant que réformés, comment pouvons-nous gérer nos relations avec nos défunts?

Les catholiques, eux, ils ont la Toussaint, bien sûr. Le 1er novembre, ils honorent les saints qui les ont précédés. Et le lendemain, 2 novembre, ils marquent le jour des morts, qui évoque le souvenir des ancêtres, et qui invite à prier pour leur salut. On fleurit les tombes, on intercède pour les proches décédés.

Et il y a encore Halloween, plus récemment arrivé chez nous. Cette fête était, au départ, la veille de la Toussaint, mais elle est devenue davantage une célébration de la peur, de la magie et des sorciers; façon d’exorciser nos craintes, nos fantômes. Et puis voilà que, déjà, nous voyons Halloween évoluer encore et se transformer, ici ou là en fête de la courge ou des potirons.

Trois jours d’affilée, en automne, la mort est donc au centre des préoccupations de bien des gens par chez nous. Et comme les traditions religieuses s’imbriquent de plus en plus les unes dans les autres, nous réformés nous sommes automatiquement pris dans le mouvement. Sans parler des familles mixtes!

En théorie, vous le savez j’imagine, les protestants ne prient pas pour leurs défunts. Et ils n’ont pas de vénération particulière pour les saints.

Pourtant, le décès ne coupe pas toute relation entre les morts et les vivants. Heureusement! Beaucoup de personnes veuves me disent qu’elles parlent encore à leur conjoint, parfois plusieurs années après l’avoir enterré. Et souvent, des survivants écrivent: “De là-haut, veille sur nous”! Quoi de plus normal, même dans notre Eglise? Ne vous en privez pas, si ça vous aide à vivre votre deuil!



 

Maintenant, un peu d’histoire.

Savez-vous que ces trois fêtes (Halloween, la Toussaint et le jour des morts) sont d’origine païenne? Mais attention: avant de les effacer de vos mémoires, ou avant, à l’opposé, de vous lever et de partir fâché de ce culte, comprenez bien ce que ça veut dire, “païen”. Le mot vient de la même racine (latine) que “paysan”. Il désigne l’homme ou la femme de la terre, qui vit au rythme des travaux des champs, et des récoltes. Et qui, logiquement, exprime sa spiritualité, sa religion, d’une manière syntone, qui résonne en harmonie avec son quotidien. Sa culture.

Nos ancêtres étaient tous païens. Et ce paganisme a encore des conséquences aujourd’hui; parfois positives. On sait que Noël, par exemple, était une très ancienne fête païenne, célébration de la lumière, au moment où les jours recommencent à grandir; juste après le solstice d’hiver. À l’arrivée du christianisme, cette festivité a été transformée en commémoration de la naissance de Jésus, Lumière du monde.

Pour nos trois “jours des morts”, c’est assez exactement la même chose: au départ, ces fêtes s’inscrivaient dans des sociétés stables, axées sur: (1) le sol; (2) les ancêtres; (3) les divinités; et (4) les vivants. Il fallait surtout relier ces quatre réalités, et en renforcer la cohésion: le sol, les ancêtres, les divinités et les vivants resserraient leurs relations, une fois par année, à travers des réjouissances religieuses. C’était tout un rituel d’apaisement face aux peurs soulevées par la mort. Les vivants, en renforçant leurs liens avec les proches décédés, réaffirmaient le sens de leur vie, leur solidarité “de clan”. Ce geste de mémoire rattachait ainsi les humains à ceux qui les avaient précédés et enracinés sur leur terre.

Evidemment, ces célébrations n’ont pas de fondement dans les évangiles. Au contraire, Jésus a été, sur cette question, plutôt, euh... iconoclaste! Contestataire! Vous connaissez ses formules: “Laisse les morts ensevelir les morts” ou “Dieu n’est pas le Dieu des morts, mais celui des vivants”.

C’est à l’époque de Charlemagne (vers 800 après JC) que ces rites autour des défunts ont été “christianisés”, recouverts d’un vernis chrétien. On a fait cela pour permettre à la foi évangélique d’être adoptée par de nombreux peuples et tribus. En effet, l’Eglise ne parvenait pas à balayer ni la fête de la lumière de décembre, ni les célébrations d’automne autour de la mort. Alors, l’Eglise a introduit dans ces rites des contenus en relation avec l’évangile. On a encouragé la vénération des saints et de la Vierge; le culte des reliques (c’est-à-dire l’adoration des restes des saints, par exemple cheveux ou ossements); on a encouragé encore les pèlerinages, les processions...

C’est à ce moment aussi que le pays a été découpé en diocèses et en paroisses, pour encadrer le peuple, l’enseigner et le surveiller. Et c’est alors qu’a été réinventée l’école, pour instruire tout ce petit monde. C’est le cas de le dire, avec France Gall: sacré Charlemagne, oui sacré!

Ce fut donc le génie du Moyen Âge d’oser faire la synthèse entre l’héritage païen et le message chrétien. Mais cette synthèse a donné du coup un revers à la médaille: on a quelque peu émoussé le tranchant de l’évangile, on l’a dilué dans un ensemble de coutumes qui s’écartaient de l’enseignement du Christ et de ses apôtres.

Et c’est pourquoi, au 16è siècle, vous l’imaginez bien, c’est pourquoi la Réforme a voulu revenir aux sources et supprimer les traditions païennes qui s’étaient rajoutées. Les protestants ont alors balayé la Toussaint et le jour des morts (pas Noël, quand même; ça, c’était impossible!).


tombe de Gainsbourg, Paris
Pourtant, le fait d’effacer une tradition populaire, ça ne permet pas de répondre aux besoins qui avaient fait naître cette tradition. Le protestantisme n’a souvent rien résolu en profondeur, quand il a supprimé ce genre de rites, sans rien mettre à la place. Nous réformés avons peu de symboles, peu d’images fortes ou de gestes parlants, qui aident à donner un sens aux grandes questions de la vie; et qui aident à transmettre ce sens!

Comment donc exprimer aujourd’hui les liens, la solidarité que la Toussaint essayait de concrétiser? En 2014, entre nous et entre les générations, comment resserrer les attachements communautaires?

Il ne faut pas se faire d’illusions: dans les contrées catholiques, la visite des tombes va aussi diminuer. Car nous ne vivons plus dans un monde rural statique. Les sépultures sont désaffectées en moins d’une génération; la pratique de l’incinération gagne du terrain; et surtout, les déménagements, de plus en plus fréquents, distendent les liens avec le lieu d’origine et l’endroit de sépulture de nos parents.

Notre société, marquée par la mobilité, devra donc inventer de nouveaux langages pour exprimer cette continuité de l’humanité par-delà la mort. Et ce ne sont pas les psychologues, dépêchés sur les lieux des catastrophes, qui pourront développer cette solidarité spirituelle. Ils agissent sur le moment présent, pour aider à supporter le choc de la tragédie. Et c’est très utile. Mais ce n’est pas de leur ressort que de proposer des symboles collectifs; des rites qui ancrent le lien avec nos défunts dans la durée; des gestes qui disent le mystère d’une divinité qui seule peut tenir entre ses mains la vie et la mort, et donc le fil qui les rattache l’une à l’autre.

Ne nous trompons pas: ce n’est pas un acte rétrograde que de rendre hommage à celles et ceux qui nous ont précédés. Dans ce monde où tant de choses nous coupent de nos racines, c’est au contraire indispensable et sain de cultiver une telle solidarité.

Vous me voyez conclure: puisque la Toussaint n’est plus à l’ordre du jour, ce culte du souvenir nous est proposé comme une tentative de renouer du mieux que nous pouvons avec nos disparus. Mieux même: en y rappelant aussi les baptêmes; les présentations quand il y en a; en mentionnant les bénédictions des catéchumènes et les confirmations; ainsi que les mariages (et je vous invite à lire leurs noms sur le feuillet que vous avez reçu, et à penser avec affection aux personnes ou familles que vous connaissez)... en faisant cela, nous nous relions aux générations à venir comme à celles qui nous ont précédés.

C’est pour les unes et pour les autres que Jésus exprime son émotion, ainsi que le raconte l’évangile de Jean que nous avons entendu tout à l’heure. Le Christ pleure de tristesse avec les endeuillés, et il pleure de joie ou de tendresse avec les enfants ou les jeunes couples. Et puis, en faisant ressortir Lazare du tombeau, ne nous remet-il pas en relation, tous, par-delà la mort? Ne nous remet-il pas en religion?

Oui, qu’il nous relie, les uns aux autres. Qu’il nous attache mieux. Nous vivrons plus solides. Amen








(après l’interlude)

Je n’ai pas, aujourd’hui, la prétention d’inventer un rite qui satisfasse tout le monde, moi qui ne suis que de passage dans cette paroisse. Mais j’ai la conviction qu’un rite bienfaisant passera par des signes qui évoquent la chaleur et la lumière. Celles que Dieu nous offre, et celles que nous pouvons nous transmettre les uns aux autres.

Je vous propose donc, ce matin, d’allumer quelques bougies pour évoquer nos liens, tant avec nos défunts que nous aimons, qu’avec les nouvelles générations.

Nous allumons d’abord une bougie rose, en signe de solidarité avec les enfants baptisés. ...

Nous allumons une bougie blanche avec un papillon, symbole de transformation; elle est un signe de notre lien avec les catéchumènes qui ont confirmé leur alliance avec Dieu. ...

Nous allumons une bougie rouge, symbole d’amour, en pensant aux couples qui ont reçu la bénédiction de Dieu. ...

Nous allumons une bougie rouge foncé, symbole d’amour toujours, en signe de notre lien avec les personnes décédées, remises à Dieu. ...

Nous allumons une bougie bleue, en pensant à toutes les situations pleines de soucis, de peines, de souffrances. ...

Nous allumons une bougie orange, en pensant à toutes les situations tissées de joie, de bonheur, d’espérance. ...

Nous allumons une bougie verte où est inscrit le mot “liberté”, en signe de solidarité avec toutes les personnes victimes d’emprisonnement arbitraire, ou de persécutions. ...

Enfin, nous allumons une bougie où les couleurs s’entremêlent, en pensant à toutes les situations compliquées, mélangées, nuancées où alternent la joie et la tristesse. ...




Ces huit flammes nous relient les uns aux autres, et à nous-même, et à Dieu. Et c’est ainsi soutenus les uns par les autres que nous écoutons le Psaume 23, paroles de confiance et de foi.

Je vous invite à prier (“Prières”, éd. Ouverture, p. 32, de Marie Henrioud)

J'ai tout remis entre tes mains:
ce qui m'accable et qui me peine,
ce qui m'angoisse et qui me gêne,
et le souci du lendemain.
J'ai tout remis entre tes mains.

J'ai déposé entre tes mains
le lourd fardeau traîné naguère,
ce que je pleure, ce que j'espère,
et le pourquoi de mon destin.
J'ai tout remis entre tes mains.

J'ai déposé entre tes mains
autant la joie que la tristesse,
la pauvreté ou la richesse,
et ce que jusqu'ici j'ai craint.
J'ai tout remis entre tes mains.

J'ai déposé entre tes mains
que ce soit la mort ou la vie,
la santé ou la maladie,
le commencement ou la fin.
Car: tout est bien entre tes mains. Amen

                                                                            Jean-Jacques Corbaz  



samedi 22 novembre 2014

(An, Ré, Hu) L'île aux fleurs

Connaissez-vous "L'île aux fleurs"?
C'est un court-métrage de 12 minutes, étonnant, excellent, où l'humour devient de plus en plus noir... On n'en sort pas indemne!

Pour le voir:  https://www.youtube.com/watch?v=fZFFHRfpq6s

jeudi 20 novembre 2014

(Bi) Merci!

Mmmmmhh, superbes couleurs de coucher de soleil sur le Jura, au-dessus de Nyon. Et les Tours d'Aï qui ont douillettement sur leurs pieds un blanc manteau crémeux, magnifique!
 

dimanche 16 novembre 2014

(An) Appel pour les requérants d'asile placés aux Rochats

Merci d'être attentifs à ceci: ma prédication fait une allusion aux requérants d'asile placés aux Rochats, au-dessus de Provence. Ces hommes, venant de pays plus chauds que le nôtre, sont maintenant dans la neige, et très peu chaudement vêtus. *'+_+ froid *'+_+ froid *'+_+ froid 
La diacre Thérèse Aubert et les bénévoles qui assurent une présence de la part de notre Eglise lancent un appel pour trouver des chaussures ou habits chauds (il n'y a pas de femmes, donc pas besoin d'habits pour dames!). On recherche également des jeux (par ex. puzzles). Enfin, si quelques personnes acceptaient de se joindre à l'équipe d'une trentaine de bénévoles, ce serait un immense cadeau!

Vous pouvez amener les chaussures, habits chauds ou jeux aux cultes de la paroisse de Grandson du 30 novembre 2014 (Giez 9h et Grandson 10h15, où nous parlerons d'habits, à propos de David et Saül!); ou vous adresser directement à Marie-Hélène Russi, 1428 Provence, tél. 079 217 46 74. Un immense merci d'avance!


Et je vous encourage à faire suivre ce message à tous vos contacts. Une boule de neige de générosité, ce serait géant!!



samedi 8 novembre 2014

(Ci, Ré) Pour mieux vivre avec soi-même

Pardonner, c’est libérer un prisonnier… et découvrir que ce prisonnier, c’est moi.

Celui qui ne pardonne pas est une personne qui a avalé de la mort-aux-rats et qui attend que le rat meure...

Dans la vie, il s’agit de choisir: être heureux ou avoir raison.


(An) Confection de la couronne de l'AVENT


Couronnes  de  l'Avent

Les enfants sont invités à créer leur couronne de l'Avent samedi 29 novembre, 15h30, salle de paroisse catholique, ruelle des Renards 6, Grandson. Ils peuvent venir avec leurs parents ou grands-parents. Coût: Fr. 5.- par couronne.

Il y aura un goûter et, vers 17h15, un temps de recueillement.

Chers accompagnants, si vous en avez la possibilité, merci d'apporter pives, noix, noisettes... petites boules de Noël, étoiles...

Nous nous réjouissons, ce sera un beau moment!

Les Conseils des deux paroisses, catholique et réformée.


On peut voir des images de ce bon moment à l'url: <http://grandson.eerv.ch/2014/12/01/fabrication-de-couronnes-de-lavent-en-famille/>


(Hu, Ré) N'attendez pas...

Joli!!



(An) Veillée de solidarité avec les populations du Proche-Orient

MCDA Yverdon-les-Bains
(Musulmans et Chrétiens pour le Dialogue et l’Amitié)
Veillée de solidarité avec les populations du Proche-Orient
Vendredi 14 novembre de 19h à ~ 19h45
devant le Temple, place Pestalozzi, Yverdon-les-Bains
(en cas de mauvais temps la veillée aura lieu à l’intérieur du temple)

Bienvenue à tous !



dimanche 2 novembre 2014

(Pr, Vu) “Dieu, tout-puissant?” - Prédication du 2 11 2014

Lect. bibliques: Exode 6, 2-9, 1 Corinthiens 1, 22-29, Marc 15, 29-32

Dieu, tout-puissant. Pour certains, ça semble une évidence. Mais pour d’autres, ça pose de gros problèmes. Aurait-il le pouvoir d’arrêter le temps... ou d’éteindre le soleil, puis de le rallumer? Vous connaissez également l’objection fréquente: si Dieu est tout-puissant, pourquoi laisse-t-il faire le mal? les catastrophes? les drames injustes?

Et on pense à ces chrétiens qui prient pour guérir, et qui ne sont pas exaucés; et qui culpabilisent. S’il est tout-puissant, Dieu est-il alors sourd, ou indifférent?

Nous l’avons entendu, le Nouveau Testament présente une puissance de Dieu très éloignée de la caricature magique que bien des gens en font. Pour les lettres de Paul comme pour les évangiles, c’est dans la faiblesse, voire dans la mort que Jésus révèle qui est son Dieu, et ses apôtres feront de même à sa suite. C’est un peu une toute-puissance à l’envers!

On va dire alors: “C’est donc l’Ancien Testament (AT) qui avait une idée primitive de la divinité. Une représentation un peu naïve...”

Eh bien, ce n’est pas tout à fait le cas. La foi des Juifs voit Dieu comme puissant, bien sûr, et agissant. En particulier depuis l’Exil à Babylone, au 6è siècle avant J-C; quand s’est développée la conception d’un Dieu unique, qui pourrait commander même aux armées des pays étrangers; qui aurait utilisé les autres peuples pour punir Israël.

La foi de l’AT voit Dieu comme puissant et agissant. Mais elle affirme aussi que YHWH est confronté à la liberté des humains, et qu’il la respecte. En créant l’homme, disent les Juifs, savez-vous: Dieu se met une limitation à lui-même, dans le but de préserver notre liberté. ... Dites, c’est étonnamment proche du message de l’évangile!


La plupart des auteurs de la Bible aiment chanter les hauts faits du Seigneur, et se sentir à l’abri d’un tel Ami majuscule! Pourtant, jamais l’AT ne parle, en hébreu, de Dieu comme tout-puissant! Etonnant, n’est-ce pas: jamais!

L’AT raconte ses actions impressionnantes, il chante sa force et sa fidélité; Dieu utilise parfois pour se révéler des manifestations cosmiques, le déluge, l’arc-en-ciel ou un tremblement de terre. Mais à aucun moment l’AT ne décrit YHWH comme quelqu’un qui maîtriserait la totalité des phénomènes et des événements. Puissant, oui; prodigieux, agissant, yes, mais pas tout-puissant.

Problème: pourquoi alors, peut-on lire dans nos traductions cette expression “Dieu tout-puissant”?

Eh bien, les versets de nos bibles qui l’utilisent traduisent en fait deux noms de Dieu qui ne veulent pas dire cela, précisément. Ces deux noms sont (en hébreu) El Shaddaï et Tsevaot (ou Sabbaot).

Le premier, El Shaddaï, est un nom propre dont on ne connaît pas exactement le sens. Il semble désigner une divinité des montagnes ou des steppes, qui protègerait les croyants des animaux sauvages. C’est sous ce nom que Dieu se révèle à Abraham. Par exemple, en Genèse 17, il dit au patriarche: “Je suis El Shaddaï, marche en ma présence”. Il semblerait donc meilleur de traduire “Je suis le Dieu protecteur...”. Et c’est ce nom que notre passage de l’Exode emploie au v. 3, quand il dit: “Je me suis manifesté à Abraham, Isaac et Jacob comme Dieu puissant” littéralement donc protecteur. Notre passage annonce ainsi que celui qui s’était révélé aux patriarches, il est le même que celui qui parle à Moïse, un Père qui veille sur les siens, qui leur donne assurance et sécurité.

Le second nom, Tsevaot (ou Sabbaot) signifie littéralement “des armées”. C’est exactement cette traduction que donnaient nos anciennes bibles, mais on a fini par l’abandonner, parce qu’on ne voulait pas décrire Dieu comme un militariste, qui enverrait son peuple massacrer les autres. Il n’est pas un chef de guerre, non, mais un Dieu fort, oui! Pour ma part, je préférerais cette dernière manière de traduire Tsevaot (ou Sabbaot): Dieu fort.

Ce sont les premières traductions de l’hébreu en grec qui ont rendu nos deux noms par “pantocrator”, c’est-à-dire tout-puissant. Cela partait d’une bonne intention: mettre l’accent sur le pouvoir impressionnant, la force du Seigneur. Mais, hélas, les générations suivantes ont compris cette expression de façon beaucoup trop absolue. Trop au mot-à-mot.

Prenons l’exemple d’une lettre d’amour! Si un fiancé dit à sa belle qu’il s’enflamme pour elle, ou qu’il est sur un nuage en venant la trouver, on ne va pas prendre ces expressions au pied de la lettre. On saisit bien qu’il s’agit d’une image, pour évoquer la force de son amour!

Eh bien, la Bible est réellement une lettre d’amour: des mots inspirés de Dieu, qui parlent de sa présence, fabuleuse; de sa bienveillance, inépuisable; du fait que partout et toujours, il est à l’oeuvre pour nous sauver. Le Protecteur! Le Dieu fort!

Mais le Seigneur n’est pas tout-puissant au sens où il dirigerait nos vies et les éléments du monde dans les plus petits détails. Toutes choses ne sont pas décidées et déterminées par lui. Les mots que j’emploie dans cette prédication... la couleur de vos chaussettes... les vents qui soufflent ou s’arrêtent... Tout cela, Dieu le laisse au gré du monde, qu’il a créé. Sur cette terre, le Père est souvent en lutte contre d’autres forces que les siennes, par exemple les nôtres: c’est la liberté humaine; et aussi celle de la création entière, où des courants contradictoires s’affrontent, entremêlant le bien et le mal.

                                                              


Les choses ne sont pas toutes décidées et déterminées par Dieu. Quand elle parle de sa puissance, la Bible proclame quelque chose de bien différent: elle dit que son pouvoir divin, qui est celui de l’amour, ne sera jamais définitivement vaincu, ni anéanti. Il finira par l’emporter sur tout ce qui lui résiste: l’injustice; la haine; le malheur; la misère; la mort.

Sachez-le bien, si nous nous abstenons de qualifier Dieu de tout-puissant, nous ne lui enlevons rien! On ne l’honore pas en imaginant sa grandeur sur le modèle des rois ou des tyrans de ce monde. La majesté véritable, selon l’évangile, elle ne consiste pas à se faire obéir dans les moindres détails. Elle consiste à aimer et à libérer; à accompagner, dans le respect et la tendresse. Comme un souffle fragile. Ce n’est pas nous qui servons Dieu, mais c’est lui qui nous sert.

Voilà exactement ce que YHWH a fait, dans le récit de l’Exode. Il a appelé son peuple à la liberté. Il a ouvert devant lui des pistes d’espoir. Il a agi. De même dans toute l’histoire d’Elie. Dieu a agi.

Mais il n’aurait rien pu faire sans la participation active de Moïse et Aaron; rien non plus si le peuple était resté fermé à ses promesses. Et il n’a pas pu empêcher Elie d’égorger les 850 prophètes païens. Pour que son plan de salut se réalise, Dieu a besoin des humains; de leur confiance; de leur engagement. Est-il tout-puissant? Pas sûr... En tout cas, dans ce monde tel qu’il l’a créé, il a limité son pouvoir: pour nous en donner, à nous!

N’ayons donc pas peur de parler du Dieu fort! du Protecteur! Mais, quand nous disons cela, souvenons-nous bien que sa force et sa protection dépendent aussi de nous. De la place que nous leur laissons, dans nos vies.

Et puis, si nous aimons dire que Dieu est tout-puissant, eh bien c’est possible, oui, puisque son pouvoir divin, celui de l’amour, ne sera jamais définitivement vaincu. Mais il serait utile que nous parlions de cette tout-puissance avec un peu de recul. En pensant à ce que ça peut évoquer chez d’autres, qui pourraient croire à un pouvoir magique! Il serait bon d’en parler avec prévenance et respect pour ceux qui souffrent de prières non exaucées; avec un clin d’oeil, et pourquoi pas avec humour.

Tenez, moi qui aime le foot, j’ai ainsi découvert qu’il y a, au Congo, un club qui s’est donné comme nom, accrochez-vous: “le Tout-puissant de Mazembe”. C’est ainsi qu’on a pu lire dans les journaux: “Le Tout-puissant a été écrasé par le Tonnerre de Yaoundé!” Authentique! Voilà qui aidera sans doute à prendre avec un peu moins de sérieux les traductions bibliques!

                                                     


Pour moi, dans ce monde, Dieu a surtout le pouvoir d'un ami: soit un soutien, un stimulant, un rappel de sa volonté, qui est de ne jamais faire de tort aux autres; pas un pouvoir absolu. Il est plutôt l'avocat des faibles, de celles et ceux qui n'ont pas de voix.

Et oui, je crois qu’il se laisse écraser par l’humanité et ses intolérances, pour nous montrer l’authentique pouvoir de l’amour. De son amour, qui se veut contagieux! C’est ce qu’il a vécu sur la croix.

Vous voyez, entre l’enfant qui croit que Dieu peut lui faire réussir ses examens sans réviser, d’un côté, et d’autre part l’athée, qui refuse de voir que la spiritualité a une influence sur notre vie et notre terre, il y a de la place, largement, pour vos nuances à vous. Merci de les partager, à l’occasion! Et surtout, merci de les vivre, ces nuances! Amen

Jean-Jacques Corbaz


samedi 1 novembre 2014

(Ci, Ré) Un constat hyper'pertinent!

« Où une personne qui n’aime pas l’orgue et la musique classique va-t-elle trouver son compte en allant dimanche matin au culte ? Théologiquement, les réformés ont beaucoup réfléchi à l’évolution de la société et sont en phase avec elle. Mais du point de vue liturgique, nous sommes déphasés. Les Eglises évangéliques, c’est plutôt l’inverse. Leur théologie est déphasée avec la société, mais liturgiquement ces Eglises sont en phase. »

Jean-Christophe Emery, leader du "Projet KHI", dans Bonne Nouvelle de novembre 2014, p. 11