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mardi 31 décembre 2013

(Ci) Bonne année 2014

Bonne année, meilleurs voeux à toutes et tous!

Avec ces mots de Francine Carrillo:
 
"La vie est signée d'une promesse: ce qui est à-venir est plus grand que ce qui a été. Ce qui doit nous occuper n'est pas ce qui a cessé d'être mais ce qui demande à naître..."

dimanche 29 décembre 2013

(Pr) Le bon vieux temps, ou le lapin de Noël

Lectures bibliques: Luc 2, 27-35, Genèse 19, 15-17 + 23-26

Une histoire des Pères du désert. Le moine Philémon a réalisé un jour à quel point il était encore loin de la perfection. Passant sur la place du village, il entend des enfants rire aux éclats. Il s’arrête et leur demande:
- À quoi vous amusez-vous ?
- Eh bien, Philémon, nous jouons à celui qui dira le plus gros mensonge.
- Oh, s’écrie le vieux moine, mais de mon temps, on ne s’amusait pas à des jeux pareils!
- Bravo, Philémon, clament les enfants, c’est toi qui as gagné!!

C’est ainsi un penchant fréquent chez l’être humain d’idéaliser le passé. De ne garder du vieux temps que les bons souvenirs. D’exagérer les exploits anciens, les bonheurs, les ambiances... (comme j’en vois beaucoup parmi vous au moins aussi âgés que moi, j’imagine que je n’ai pas besoin d’insister trop lourdement. Vous connaissez!).

Mais savons-nous vivre le présent, ses joies, ses émotions? Savons-nous être attentifs à ceux qui sont à côté de nous, ici, maintenant, plutôt que de rêver au “bon vieux temps”? Et savons-nous aussi regarder vers le futur, espérer avec confiance un avenir où Dieu crée encore?


Après Noël, bien des gens ont envie de regarder en arrière, comme la femme de Lot. Et on continue de fêter, et de bien manger, et de s’amuser.

L’évangile n’est pas opposé à ce genre de réjouissances à rallonges, bien sûr. Mais il faut juste savoir que le sens de Noël n’est pas là! Que ce n’est pas pour cela que Jésus est né sur notre terre.

Le premier dimanche après Noël n’est pas un jour tourné en arrière. Un jour où nous pourrions dire “Et maintenant, Seigneur, tu peux laisser ton serviteur dételer tranquillement, et jouir d’un bon repos, car tu m’as donné le salut”.

Ce n’est pas tout à fait cela que dit Siméon. Au contraire, il souligne que l’essentiel, il est à venir. Ce qui sera décisif pour nous, il est devant: Jésus sera une lumière pour faire connaître Dieu au monde. Les hommes s’opposeront à lui, et Marie, sa mère, aura le coeur transpercé par la douleur.

Noël n’a donc de sens que parce qu’il ouvre à la suite de l’évangile, et surtout à Vendredi saint et Pâques. La naissance de Jésus ne veut pas nous tourner vers le passé, mais vers l’avenir! Et le salut n’est pas acquis à Bethléem; la ville de David n’est que la première étape d’un processus qui culminera à Golgotha, avant de bluffer tout le monde autour d’un tombeau vide!

Un signe de ce que je viens de dire: le 15 décembre, nous vivions la fête de Noël de la paroisse à Orges. Les enfants du Culte de l’Enfance avaient réalisé de jolies peintures sur verre, à mettre devant une bougie, comme un petit vitrail de la nativité. On y voyait nombre d’étoiles, et d’animaux liés à la crèche: âne, boeuf, chameaux...

Mais Marine, 10 ans, avait choisi de peindre un... lapin. Les autres rigolaient doucement: “Mais, Marine, il n’y a pas de lapin à Noël!”. Eh bien, j’affirme que cette jeune demoiselle avait cent fois raison: son dessin annonçait Pâques, et il nous donnait ainsi le véritable but de la fête que nous venons de vivre! Je lui ai dit merci: grâce à elle, le vrai sens de Noël ne nous a pas posé un lapin!

Oui, Marine pouvait bien décorer son lapin de Noël! Car la naissance de Jésus parmi nous ne vient pas résoudre tous nos problèmes d’un coup. Non, Noël, c’est le début d’une aventure. Une aventure où notre temps, donc notre passé et notre présent, et notre futur, sont visités, habités par Celui qui s’affirme comme la Lumière du monde; celui qui nous dit des mots tout simples, comme “je t’accompagne”; ”patience”; “espoir”; “je t’aime”; “je t’attends”...

jjc
Au fond, ce que à quoi nous invitent aujourd’hui Siméon, Marine et Philémon, c’est à ouvrir les yeux sur cette présence subtile du Christ, si discret, si proche que souvent on ne le discerne pas; le Christ, qui veut nous entraîner avec lui sur les routes risquées d’une espérance engagée et responsable.

Dans cette marche, rien ne sera facile. Vous le savez bien, d’ailleurs, quand vous repensez à cette année écoulée; et à votre vie entière. La vie des chrétiens est une lutte jamais achevée contre tout ce qui nous fait violence, dans notre monde: contre la résignation ou la peur; les faux dieux, que je nommerais “dollar” ou “je-t’écrase si t’es pas d’accord”; le stress, l’absence de paix intérieure; l’esprit de vengeance ou le manque de pardon... Oui, nous aussi, souvent, la douleur nous transperce comme une épée!

Aïe, il y a des wagons de pain sur nos planches. Et l’année qui vient n’y suffira pas!

Pourtant, ne vous découragez pas! Car Celui que nous fêtons a déjà gagné l’essentiel du combat! Il a remporté la victoire, puisqu’il a ouvert la brèche décisive dans le mur, le mur qui nous sépare d’une vie en harmonie avec la volonté de Dieu.

Comme le dit la lettre aux Ephésiens (chapitre 2, versets 13-17): “Maintenant, par votre union avec le Christ Jésus, vous qui, autrefois, étiez loin, vous êtes devenus proches grâce au Christ. Car il est notre paix. Il a, en effet, abattu le mur qui nous séparait, en livrant son corps à la mort.
Il veut ainsi créer une seule et nouvelle humanité, en établissant la paix; réconcilier les uns et les autres avec Dieu et les unir en un seul corps, en supprimant, par sa mort sur la croix, ce qui faisait d'eux des ennemis.
Ainsi il est venu ouvrir la paix à vous qui étiez loin et la paix à ceux qui étaient proches. Grâce à lui, nous avons accès au Père, les uns comme les autres, par le même Esprit.”

Il a remporté la victoire, ce qui ne veut pas dire, bien sûr, que tout soit maintenant facile. Il a remporté la victoire, et nos luttes, qui sont pénibles et bien réelles, nos luttes sont nécessaires pour passer par la brèche qu’il nous a ouverte. Il a remporté la victoire, et nous reste à la concrétiser, cette victoire, dans nos vies à nous, dans notre monde et notre société. Mais l’essentiel, c’est qu’il a remporté la victoire, sachons-le bien, et que rien de décisif ne se joue plus: même si nous nous loupons dans les grandes largeurs, jamais cela ne remettra en cause le Happy End qui est déjà inscrit pour nous en lettres d’or sur l’écran du paradis!


Alors, oui, vous le voyez: Noël ne veut pas nous faire regarder dans le rétroviseur! Au contraire, la naissance de Jésus veut nous aider à tourner nos yeux, et nos vies, vers le Ressuscité, qui marche devant nous, qui toujours nous précède. Quand nous plaçons notre main dans la sienne, nous ne pouvons que nous mettre en route; avec lui. En avant; en aventure. Amen

                                                                                                                            Jean-Jacques Corbaz



vendredi 27 décembre 2013

(Ci, Po) Naître entièrement ?

"Nuit noire 
matrice du jour:
combien de naissances
pour naître entièrement ?"  

(Anne Bregani)



Si juste dans les moments difficiles, ces passages qui écorchent, font mal. Pourtant, est-ce qu'on naît une fois entièrement ? Il me semble que vivre, c'est naître sans cesse (quitter, découvrir, s'adapter, passer etc.) au fil de ce qui se présente?
(j'ose le truc:  "... qui vit naît ")


mercredi 25 décembre 2013

(Po) On croyait, on croit



On croyait le ciel trop haut
Trop loin
Trop vaste
Pour même le toucher du doigt

Et voilà qu’il se courbe jusqu’à nous
Qu’il nous tend la main
Et le coeur
Et s’agenouille
Devant toi

*     *

On croyait le ciel trop bleu,
Trop noir de nuit
Trop majestueux
Pour éclater de joie

Et voici qu’il se teinte de rouge
De sang
Couleur de coeur
Pour t’éclabousser de sa foi

*     *

On croyait, on croyait, on croit
Noël surtout c’est le ciel
Qui croix, en toi.





                                                            
                                                                       Jean-Jacques Corbaz


(Co) Le Noël de Gaspard

À la sortie de la ville où va se passer notre histoire, on traverse un quartier de belles maisons. L’une d’elles, déjà ancienne, se remarque de loin: elle est coiffée par une coupole, on dirait un gros chapeau tout rond. Dans cette villa habite un homme, seul. Il s’appelle Gaspard, il a 60 ans. Son père était un riche commerçant. Mais cela fait déjà 20 ans qu’il est mort, et sa mère aussi. Gaspard a hérité d’une fortune considérable.

Alors, délivré du souci de gagner sa vie, il a pu se consacrer à sa grande passion: l’astronomie. Dans l’ancien galetas de la maison, il a fait installer un petit observatoire, avec un télescope et cette coupole qui retient le regard. C’est là qu’il passe une bonne partie de ses nuits, à contempler la marche des étoiles et des planètes, calculer les dates des éclipses et des comètes, et surtout admirer les merveilles d’un ciel brillant comme mille paillettes d’or sur fond bleu velours... C’est magnifique!



Pendant la journée, Gaspard... dort. Il se réveille vers midi, et ... il s’ennuie un peu en attendant que la nuit tombe ! Pour passer le temps, il écrit des livres, prépare des conférences, ou rédige des articles pour quelques revues. Il vient d’ailleurs de recevoir un  prix important, en récompense de ses travaux scientifiques: une grosse somme d’argent. Mais que va-t-il faire du paquet de billets de banque, gagnés à cette occasion ? Il l’a déposé provisoirement dans un petit coffre, chez lui. Certains de ses collègues ont fait cadeau de prix semblables à des institutions de bienfaisance... oh, c’est une chose à voir.

Il faut dire encore qu’aux yeux des habitants de ce quartier, l’astronome Gaspard passe pour un original. Quand il marche dans la rue, il est tellement perdu dans ses pensées qu’il en oublie de saluer ceux qu’il rencontre: - “Bonjour, M. Gaspard, ça va ?”  - ”mmm...”  - “Bonjour, Gaspard !”  ... Pas de réponse. C’est à peine s’il s’adresse de temps en temps à la femme de ménage qui vient chaque semaine nettoyer chez lui. Elle doit faire bien attention de ne jamais déranger les papiers de son bureau. La première fois qu’elle est venue, il lui a dit: - “Vous savez, Mme Duvoisin, si vous touchez à une seule des feuilles sur lesquelles je travaille, eh bien c’est vous qui écrirez le prochain article pour la revue SCIENCE ET VIE !”

Gaspard n’a pas d’amis, sauf peut-être le syndic de la commune, qui habite dans la maison juste à côté. Ils ont été tous les deux à la même école, et, quand ils se voient, ils se font un bout de conversation par-dessus la clôture qui sépare leurs jardins.

                                            *         *         *
Les jours suivant les jours, on arrive à la veille de Noël. Autrefois, chez Gaspard, on préparait une belle fête de famille. On chantait des cantiques, le père ouvrait sa Bible, et lisait le récits des bergers, et celui des mages... et cette dernière histoire plaisait tout spécialement à Gaspard !  Autrefois. Mais à présent, tout cela est: bien loin. Tout est différent: plus de famille, plus de cantiques, plus de Bible ouverte... En cette soirée du 24 décembre, Gaspard est seul. Et il veut rester seul. Son unique compagnie, ce seront: les étoiles et les planètes. Il monte donc à son observatoire, ouvre la coupole, et commence à regarder le ciel. 


 

Tout-à-coup, il voit, parmi les astres immobiles qui scintillent, un corps lumineux, une étoile... qui avance? Gaspard, très intrigué, suit le déplacement de ce point lumineux. Pour l’identifier, savoir ce que c’est. Et il est plus étonné encore quand il le voit brusquement s’arrêter - mais quel étrange phénomène! Il repense alors à une phrase surgie des Noëls de son enfance: “L’étoile que les mages avaient vue en Orient allait devant eux, jusqu’au moment où, parvenue au-dessus de la maison où se trouvait le petit enfant, elle s’arrêta.” Ce souvenir fait que l’astronome, sans réfléchir, abaisse son télescope et voit, aussitôt, l’image d’une maison sur une colline. “Tiens, le centre des réfugiés et des prisonniers de guerre !” se dit-il.

En effet, depuis quelques mois, cette ancienne maison accueille des soldats blessés par un terrible conflit, en Syrie, ainsi que des familles de sans-abri, dont les habitations ont été détruites par les bombes. Ces gens ont tout perdu à cause de la violence. Il y a des hommes, des femmes, des enfants, entassés dans cette vieille bâtisse qui avait été longtemps abandonnée. Ils y vivent dans une pauvreté extrême, augmentée encore par l’éloignement de leurs familles, de leurs amis. Beaucoup de leurs proches sont d’ailleurs tombés sous les balles ou les obus, certains ont disparu, plus personne n’a de leurs nouvelles. Inquiétude, colères d’impuissances... On est bien loin de la paix douce du premier Noël !

Une chose encore est dure pour ces victimes: la population de notre petite ville n’est pas très chaleureuse avec eux. Ce n’est pas qu’on y soit raciste ou ennemi des étrangers, non; disons plutôt qu’on y vit chacun pour soi - et Dieu pour les autres... On s’occupe de ses voisins, de celles et ceux qu’on aime, mais, plus loin: il y a tant de choses à faire ! D’ailleurs, le syndic lui-même l’a dit à Gaspard: “Il faudra que j’organise une action en faveur de ces gens, par exemple un appel public pour que les citoyens partagent un peu avec eux. Il faudra. Il faudrait...”  Mais le syndic est tellement occupé... Il n’a jamais rien fait.

Et maintenant, dans cette nuit de Noël, Gaspard regarde la vieille maison. Grâce à son télescope, il voit les gens comme s’il était tout près d’eux. Et il découvre vraiment leur misère. Des armoires quasi vides, presque sans provisions et sans habits, alors que l’hiver perce les murs mal entretenus. Des bébés qui pleurent, de faim, de froid. Des enfants qui se courent après parce qu’ils n’ont pas de jouets pour s’amuser autrement. Pas de livres, ni de B. D. Pas de disques ni d’instrument de musique. Juste une vieille télé qui montre des images pleines de parasites, des images de guerre...

Un long moment, Gaspard reste les yeux fixés sur ces blessés, ces étrangers. Il en oublie ses étoiles et ses planètes. Des années durant, il n’a été attentif qu’aux problèmes scientifiques qui remplissaient sa tête. Ce soir, peut-être parce qu’il s’est rappelé de la naissance de Jésus, il sent dans son coeur des sentiments qui se réveillent, des sentiments qui le poussent à agir.

Gaspard quitte son télescope et descend à son appartement. Il met dans deux grosses valises tout ce qu’il peut comme habits chauds, une couverture, mais aussi des biscuits, du chocolat, du thé. Il reste un peu de place... Gaspard hésite quelques secondes, puis il ajoute les bougies qu’il avait achetées pour décorer sa maison, demain Noël, la bonne bouteille qu’il s’était promis de boire avec le syndic, un de ces jours.

Gaspard enfile son manteau. Dehors, il fait froid. Puis il revient à son bureau, il ouvre le coffre et... lentement, il prend l’enveloppe épaisse qui contient les billets de banque. Le prix qu’il a reçu, il sait ce qu’il va en faire. Puis il sort dans la nuit, avec son chargement.

                                          


Dans la vieille maison, sur la colline, c’est une incroyable surprise pour ces soldats blessés et ces familles de réfugiés. À peine Gaspard est-il entré qu’on se rassemble autour de lui, on s’appelle, on s’agite... On se partage les habits, les cadeaux, dans une joie étonnée et l’argent. Des paroles s’échangent. Les regards brillent. Gaspard, le solitaire, le savant perdu dans ses étoiles, l’original, découvre soudain d’autres valeurs: le plaisir de faire des heureux, qui ne s’y attendaient pas, et le bonheur d’une amitié qui commence. On l’emmène vers un lit, au fond de la pièce: une jeune femme toute pâle y est couchée, qui serre un nouveau-né dans ses bras. La couverture sera pour elle.

                                           *         *         *
Sur le chemin du retour, Gaspard a beaucoup à penser. C’est vraiment étrange, cette lumière, dans le ciel, qui s’est arrêtée. Et toutes ces ressemblances avec l’histoire de Noël. On lui a même dit que la jeune femme et son bébé s’appellent Meriem et Emmanuel. Il entend encore son père lire dans sa Bible: “On appellera cet enfant Emmanuel, ce qui veut dire DIEU AVEC NOUS”. Et puis, Gaspard, c’est aussi le nom qu’on a donné à l’un des mages, qui étaient les premiers astronomes... Bien sûr, le Sauveur n’est venu qu’une seule fois dans le monde, mais il a dit un jour: “Tout ce que vous faites pour l’un des plus petits des humains, mes frères, c’est pour moi, Jésus, que vous le faites.”

Gaspard se promet de revenir régulièrement vers ses nouveaux amis, tellement il a eu de joie à leur contact. Et surtout, il va parler avec le syndic pour qu’il n’oublie pas d’encourager les habitants de la petite ville à monter eux aussi vers la vieille maison. Et à découvrir à leur tour le bonheur de cette rencontre.

Voilà ce que pense Gaspard, en rentrant chez lui, dans la nuit qui s’achève. Il n’a pas le sentiment d’avoir fait quelque chose d’extraordinaire; seulement un geste de bonne volonté. Un geste qui lui aura surtout fait du bien à lui. Quel fabuleux Noël ! C’est sûr, il ne l’oubliera jamais.

                                                             Hubert Roulet et Jean-Jacques Corbaz



 

dimanche 15 décembre 2013

(Co) Le Noël de Silas


Mon histoire se passe en Afrique, il y a très longtemps. Demain, c’est Noël. Silas, qui a sept ans, habite dans un village de la savane avec sa famille. Il se réjouit de la fête!

Silas a envie de faire un beau cadeau à sa grand-maman, qu’il aime beaucoup. Mais chez lui, c’est différent de chez nous: impossible de prendre un peu d’argent dans sa tire-lire et d’aller au magasin acheter quelque chose! Le petit garçon n’a bien sûr pas de tire-lire; et pas d’argent du tout; et le magasin est bien trop loin, à plusieurs jours de marche. D’ailleurs, Silas n’aurait pas le droit de s’éloigner autant de la maison, c’est trop dangereux. Il y a des lions qui rôdent dans la savane.

Mais Silas a une idée: il a vu de superbes fleurs au bord d’un étang, pas très loin. Il décide d’aller en cueillir un joli bouquet pour sa grand-maman. Comme elle sera contente!

Le petit garçon n’a pas peur: sa grand-maman prie pour lui. Elle lui dit souvent: “Dieu est bon, il te protègera”.

Arrivé au bord de l’étang, Silas a une mauvaise surprise: les fleurs ont toutes été saccagées par un troupeau d’antilopes. Oh, zut alors! Silas est tout triste.

Mais il se souvient qu’il a vu d’autres fleurs encore plus loin, une fois qu’il était avec son papa. Allez, il décide de continuer jusque là-bas: il a tellement envie de faire plaisir à sa grand-maman!

Malgré le danger qui rôde, Silas marche donc longtemps, longtemps. Et puis, récompense: il trouve les fleurs. Elles sont magnifiques, et pas du tout abîmées, celles-là! Il en cueille un gros bouquet, en pensant à sa grand-maman avec le sourire.

En rentrant à la maison, le petit garçon est tout content. Malheureusement, zut, pas de chance! Il aperçoit soudain un lion qui vient vers lui. Silas se met à courir, à courir de toutes ses forces. Pour aller plus vite, il doit même jeter le beau bouquet qu’il voulait offrir à sa grand-maman.

Mais ça ne suffit pas. Le lion se rapproche, et Silas se rend compte qu’il va se faire dévorer. Par chance, il y a un arbre, droit devant. L’enfant, tout essoufflé, accélère encore quand même. Et il arrive à grimper sur l’arbre juste avant que le lion ne l’attrape.

Bon, le lion ne peut pas grimper assez haut pour attraper Silas. Mais il s’assied au pied de l’arbre. Aïe! Le fauve sait que le petit garçon devra bien redescendre à un moment où un autre. Il l’attend.

Silas, lui aussi, attend, en espérant que la bête s’éloigne. Mais le temps passe, et le lion ne bouge pas. Il regarde l’enfant, et on dirait qu’il a un petit sourire satisfait. Le soir tombe, et puis la nuit. Silas ne voit plus rien, rien que la lune, tout là-haut dans le ciel. Il pense qu’il va se faire manger...



Alors, il a une idée: il va prier, comme sa grand-maman. Mais il ne prie pas pour demander que le lion s’en aille, non, car il sait bien que c’est impossible. Le petit garçon prie seulement pour que Dieu aide ses parents à ne pas être tristes, quand ils sauront qu’il est mort. Et pour sa grand-maman, qui va pleurer... Et pour ses frères et soeurs... ses amis...

La prière l’a rendu plus calme. Silas finit par s’endormir, bien calé entre deux grosses branches.

Quand le matin se lève, Silas se réveille. Il a mal partout, ouille! Mais tout-à-coup, il regarde par terre: et: le lion est parti! L’enfant se dit qu’il est sauvé!

Avant de redescendre, il regarde bien partout, de tous les côtés: pas de lion! Très vite, il prie Dieu pour lui dire merci! Et il court vers son village, et sa maison!

Quand il arrive, c’est Noël! Mais tout le monde est triste, parce qu’ils pensent que Silas est mort. Alors, quand ils le voient, tous les gens sont heureux, mais heureux! Ils chantent et disent “merci” qu’il soit encore vivant!

Le petit garçon raconte son aventure. Il pleure beaucoup, surtout quand il voit sa grand-maman. Il lui explique qu’il n’a pas de cadeau pour elle, à cause du lion.

- Mais non, dit la grand-maman, tu m’as fait un cadeau, Silas! Tu sais, quand tu as parlé à Dieu comme à un ami, sur ton arbre, quand tu l’as prié pour tes parents et pour moi: eh bien, c’est le plus beau cadeau que je pouvais recevoir!

Du coup, l’enfant se sent heureux, très heureux. Plus heureux même que s’il avait offert les fleurs à sa grand-maman! Pour lui aussi, ça a été le plus beau cadeau de Noël de sa vie!

                                                            *               *

Silas a maintenant 70 ans. C’est lui qui m’a raconté cette histoire. Vous savez: c’est son plus beau souvenir de Noël!

JJ Corbaz



vendredi 13 décembre 2013

(Bi, Hu) Jésus a inventé le foot - Gesù ha inventato il calcio

Jésus a inventé le foot  (traduction en italien + bas)
Extrait d’une homélie prononcée à Steenkerque, près de Braine-le-Comte (Belgique)


Savez-vous que c’est Jésus qui a inventé le foot? Déjà sur les plages du lac de Tibériade, il avait pris deux rames qu’il avait plantées dans le sol, il avait tendu un filet de pêche entre les deux rames : il venait d’inventer le premier goal !

Et le terrain ! Oh, le terrain était beaucoup plus grand que maintenant : son terrain, c’était le monde entier ! Bien sûr, par la suite, pour des raisons de commodités, on a réduit les limites du terrain à celles qu’on connaît actuellement. Mais quelque chose de très important est resté : qu’y a-t-il au milieu du terrain ? Quelque chose de très beau : un grand cercle blanc… une alliance… l’alliance entre Dieu et les hommes.

Vous vous demandez certainement à quelle place Jésus jouait. Mais il ne jouait pas, il était l’entraîneur, le coach, le guide. Et il avait une équipe de 12 apôtres. Son rôle était de les organiser. Et puis, il s’est rendu compte que ses disciples étaient parfois fatigués. Alors, pour qu’ils puissent se reposer parfois, Jésus a inventé le remplaçant. Il est donc resté 11 joueurs sur le terrain. Et c’est pour cela que, depuis lors, toutes les équipes de foot du monde sont composées de 11 personnes.

Au début, le FC Nazareth avançait bien, la progression était belle. Bien sûr, ils se faisaient parfois tacler avec brutalité, mais ça ne les empêchait pas de gagner du terrain. Et puis, il y a eu un coup d’arrêt – à la mi-temps. On leur a enlevé Jésus. Alors, les disciples se sont cachés, ils sont rentrés au vestiaire, et se sont isolés.

Mais Jésus leur a bien fait comprendre qu’il continuait d’être avec eux, même si c’était "autrement". Il leur a redonné toutes les consignes : soyez très collectifs. Si on veut partir tout seul, être personnel, ne penser qu’à soi, c’est sûr, on ne va pas gagner. Si vous voulez jouer sans vous soucier des autres, vous allez être "hors-jeu". Faites circuler le ballon, ce qui voulait dire : faites circuler l’amour de Dieu entre vous; ne le gardez pas pour vous, vous allez le perdre. Faites-le circuler le plus possible, donnez-le le plus souvent possible ! Et ils sont ressortis des vestiaires, ils sont retournés sur le terrain pour une deuxième mi-temps beaucoup plus longue que la première. Plus dure aussi.

Etre toujours attentifs : voilà une autre consigne. Ne jamais croire que c’est gagné. Ne pas se déconcentrer, sinon on marche sur le ballon, et on le perd. Pardonnez les erreurs des autres, continuez à faire équipe avec eux, et redonnez-leur la chance de pouvoir faire mieux. Mettez-vous toujours au service de l’équipe.

Et enfin, dernière question: qu’est-ce qui fait qu’une équipe gagne ? C’est parce qu’elle a "l’esprit d’équipe". Et cet esprit, pour nous chrétiens, c’est, bien sûr, l’Esprit Saint. Aujourd’hui, c’est nous qui sommes sur le terrain pour faire circuler l’amour du Christ. C’est à nous de donner le meilleur de nous-mêmes en suivant les consignes de Dieu.

Ah oui, vraiment c’est sûr : c’est Jésus qui a inventé le foot!


Ce ne sont là que quelques idées extraites de l’homélie. Jamais une assemblée n’avait tant ri pendant une homélie. Mais jamais sans doute, elle n’avait été aussi attentive d’un bout à l’autre, sans perdre un seul mot de ce que disait le prêtre. Le message était passé. Il reste à le vivre !




Cari amici, vi condivido questo brano estratto da un'omelia pronunciata a Steenkerque, vicino a Braine-le-Comte, in Belgia. Il testo originale è in francese, l'ho tradotto con l'aiuto di Marco Casci.

 (Sylvain Corbaz)

Sapete che Gesù ha inventato il calcio? Già sulle spiagge del lago di Tiberiade, aveva preso due remi che aveva piantato nella sabbia, aveva teso un rete da pesca tra i due remi: aveva appena inventato la prima porta di calcio. 

E il campo! Oh, il campo era molto più grande di adesso, era il mondo intero! Sicuro che dopo, per ragioni di comodità, abbiamo ridotto i limiti del campo a quelli che conosciamo adesso. Ma qualcosa di molto importante è rimasto: che cosa c'è in mezzo al campo? Qualcosa di molto bello: un grande cerchio bianco. Un'alleanza, l'alleanza tra Dio e gli uomini. 



Vi chiedete sicuramente in che ruolo giocava Gesù. Ma non giocava, era l'allenatore, il coach, la guida. E aveva una squadra di 12 apostoli. Il suo ruolo consisteva nell'organizzarli. E poi, si è reso conto che i suoi discepoli erano stanchi. Allora, affinché si possano riposare un pò, Gesù ha inventato il sostituto. Sono dunque rimasti 11 giocatori in campo. Ed è per ciò che, da questo tempo, tutte le squadre di calcio del mondo sono composte di 11 persone.



All'inizio, l'AC Nazareth era in ottima forma. Anche se entravano scivolata con brutalità, non impediva loro di andare avanti. E poi, c'è stata una interruzione - alla pausa. Hanno preso Gesù. Allora, i discepoli si sono nascosti, sono tornati negli spogliatoi come spaesati.



Ma Gesù aveva spiegato loro che avrebbe continuato ad essere con loro, anche se "diversamente". Aveva dato loro il compito fondamentale: "siate una squadra." Se vogliamo far tutto da soli, giocare solo per noi stessi, non potremo mai vincere. Se volete giocare senza gli altri, vi troverete inevitabilmente in "fuori gioco". "Fate circolare la palla", che significava: fate circolare l'amore di Dio tra di voi; non tenetelo per voi stessi, perché state per perderlo. "Passatelo" il più possibile! E i discepoli sono usciti di nuovo dagli spogliatoi, sono tornati sul campo per un secondo periodo molto più impegnativo del primo forse anche preparati a disputare i "tempi supplementari".



"State sempre attenti!" Ecco un altro compito. Mai credere che avete vinto. Non calate l'attenzione, se no perderete la palla. Perdonate gli errori dei vostri compagni, continuate ad essere squadra con loro, e date loro ancora una volta la possibilità di fare meglio. Mettevi sempre al servizio della squadra.



In fine, un'ultima dommanda: che cosa fa che una squadra vince? ha "lo sprito di squadra". E questo spirito, per noi cristiani, è ovviamente lo Spirito Santo. Oggi siamo noi in campo, nel mondo, a fare circolare l'amore di Cristo. Tocca a noi dare il meglio di noi stessi, seguendo "i compiti" di Dio.


Ah, dimenticavo... è stato veramente Gesù ad inventare il calcio!



Sono solo alcune idee estratte dall'omelia. Mai un'assemblea aveva riso tanto durante un'omelia. Ma mai, senza dubbio, era stata così attentiva dall'inizio alla fine, senza perdere nessuna parola di ciò che diceva il sacerdote. Il messaggio era ricevuto. Tocca a noi viverlo!

dimanche 8 décembre 2013

(Po, Li) Introduction à la Messe de minuit de Charpentier et à l’Oratorio de Noël de Saint-Saëns

Bonsoir!

L’Association des concerts spirituels de Belmont-Prieuré et l’Association en faveur du Temple de Lutry sont heureuses de vous proposer ce concert, pour nous ouvrir à la lumière de Noël. Marc-Antoine Charpentier et Camille Saint-Saëns, chacun avec leur génie et celui de leur époque, nous aident à nous détoxiquer d’un mois de décembre stressant et trop axé sur les achats!
Bienvenue à toutes et tous! Laissez-vous emmener doucement dans un monde d’harmonie et d’espérance, où nous pouvons nous retrouver nous-même, et nous retrouver les uns les autres, au coeur du mystère de Noël.

L’Association des concerts spirituels de Belmont-Prieuré a pour objectif de proposer de la belle musique, accompagnée de textes destinés à en souligner la portée spirituelle. C’est ce qui explique ma présence, ce soir, devant vous.

Quelques mots donc pour ouvrir la Messe de minuit de Charpentier.
D’abord, une remarque sur la prononciation du latin. Elle est dite “à la française”! Aux 17è et 18è siècle, on prononçait en France le latin comme la langue de Molière! Vous entendrez ainsi des “san(c)tüs” au lieu de “sanctus”, par exemple.
Ensuite, il faut savoir que le compositeur a utilisé pour sa musique des mélodies traditionnelles populaires de Noël; des mélodies dont l’origine, souvent profane, remonte au Moyen Âge. Il s’agit donc d’une messe-parodie. Selon Charpentier, elle ne pouvait se jouer qu’à Noël, et plus précisément à la première messe dite “de la nuit”. Parce qu’il s’agit d’une nuit exceptionnelle, où l’Homme majuscule peut incarner Dieu, et où le sacré peut s’allier au profane.

Alternant la musique orchestrale et les choeurs, cette oeuvre semble incomplète, puisque certaines parties de la messe ne sont pas chantées, mais seulement rendues par les instruments.
Cette alternance souligne le mystère même de l’incarnation. En effet, les voix et l’orchestre qui se répondent renvoient à Dieu et à l’humain, qui dans cette nuit de Noël se mélangent l’un à l’autre, s’interpellent et s’interpénètrent, chacun venant enrichir l’autre! À Noël, il n’y a plus le Très-Haut et nous en bas; mais Dieu se fait, sur la paille de la crèche, le Très-Bas, le Très-Proche. Intimement mêlé à nous, il nous permet de prendre de la hauteur par rapport à nos vies, il nous rend plus légers, plus aériens. Et du coup, il nous permet de devenir plus proches les uns des autres, voire de nous-même!

Un texte poétique pour conclure:


Au commencement, Dieu a créé tout ce qui existe.
Pour créer, Dieu a: séparé:
Il a séparé la lumière de l'obscurité,
Il a séparé la terre de l'eau, et l'eau du ciel,
Il a séparé les végétaux, les animaux,
Et l'homme!

Mais: tout ce que Dieu a séparé se remélange:
La lumière et la nuit, - et ça fait la grisaille,
La terre et l'eau, - ça fait la boue,
L'eau et le ciel, - et ça fait la pluie,
Les hommes et les bêtes, - ça fait la guerre, et la bêtise,
Les êtres vivants et la terre, - et ça fait la mort.

À la fin du commencement, ce fut le commencement de la fin.

Alors,
Dieu décida de se mélanger aux humains,
Et à la terre, et à la mort,
Et à la nuit,
Alors, Dieu choisit de se mêler de notre existence,
Ce fut Noël, et le début du Royaume.

Le début seulement! Car la suite... elle dépend de nous!

Aujourd'hui, on voit toujours la bêtise, la violence et la nuit,
Mais puisqu'ici Dieu est venu planter sa tente,
Il nous remplit d'un autre espoir, comme une attente,
Il nous appelle à vivre, à sourire, à lutter.

C'est sa tendresse proche qui me fait vivre
Comme les îles au parcours du voilier
Je ne sais que la suivre,
Emerveillé.




Quelques mots maintenant pour ouvrir l’Oratorio de Noël de Camille Saint-Saëns (sans oublier le sixième!).
Après un premier mouvement orchestral, chacun des neuf suivants propose un bref passage de la Bible chanté, dont vous avez la traduction sur votre feuillet. D’abord le récit bien connu de l’apparition de l’ange aux bergers de Noël; puis des extraits de psaumes, mêlés parfois de paroles d’évangile, voire du livre de Daniel. Tous ces versets chantent la gloire de Dieu, dans la foulée du choeur des anges, “gloria in excelsis Deo”.
La confiance; l’espérance qu’un monde d’infinie tendresse est en marche vers nous; le silence intérieur, chemin qui ouvre à l’équilibre et à la confiance en soi: la valeur essentielle que nous propose Noël est là. Arrêtons-nous quelques instants. Reprenons souffle, pour sentir la présence de Dieu au coeur de nos fragilités. Notre cadeau de Noël, il est ici: je suis, tu es aimé, et respecté à un point tel que personne ne peut l’imaginer.

Un texte poétique pour conclure:

Noël, c’est le coeur de Dieu posé sur notre terre,
Offert à nos aveux, fragile, insondable mystère
Et pourtant, sous nos yeux, obstinément lumière;
C’est tout l’amour de Dieu, sa tendresse de père
Vivante à l’infini.

Noël, c’est le regard de Dieu posé sur notre monde,
La vie qu’il a bâtie, qu’il espère et qu’il veut,
Qu’il sème et qu’il féconde;
C’est un amour de frère qui veut ouvrir la ronde
D’un univers guéri de ses pires folies.
Noël, c’est une mort, offerte un vendredi
Qui s’annonce à l’aurore
Pour nous rendre plus forts.

Noël, c’est notre vie.



JJ Corbaz

(Pr) Charlot, les Dupondt, Zacharie et Jésus: l'espérance qui réveille!

Lectures bibliques: Luc 1, 5-25; Zacharie 8, 12-13


Dans les années 30, le personnage de Charlot avait un énorme succès. On aimait se déguiser, on organisait souvent des “concours du meilleur Charlot”. Or il paraît qu’un jour, le véritable Charlie Chaplin a participé à l’une de ces compétitions. Incognito, et avec un petit sourire, comme on le connaît. Tenez-vous bien, sur sept concurrents, il a obtenu: la troisième place...

Permettez-moi maintenant une petite question légèrement impertinente: à supposer qu’on organise, aujourd’hui, un “concours du meilleur Jésus Christ”. À supposer encore que Jésus, le vrai, participe à cette compétition. Vous me voyez venir: est-ce que même il remporterait le troisième prix?!  ...

Je n’en suis pas sûr. Tellement il a été déformé à travers les siècles. Tant de gens le façonnent à leur idée. Voire à leur profit! Même son message, son évangile, est mis à toutes les sauces. On oublie des choses fondamentales sur lui. Inconsciemment, souvent.

                                                                *                  *
Nous faisons trop souvent avec la religion comme les Dupond-Dupont perdus au milieu du désert (l’histoire se trouve dans “Tintin au pays de l’or noir”): on part dans la bonne direction; on avance; on croit aller bien droit... Et soudain, on aperçoit des traces devant soi. Tout heureux, on les suit. Longtemps après, on rejoint de nouvelles traces, et, des heures plus tard, d’autres encore... Jusqu’à ce qu’on réalise que toutes ces empreintes, ce sont les nôtres, et qu’on a tourné en rond! On croyait avancer bien droit, mais on a tellement dévié, imperceptiblement, qu’on s’est mis à tourner en rond.

La religion qui dévie, qui perd le cap, qui s’égare, ce phénomène ne date pas d’aujourd’hui. Il est vieux comme Hérode! Il y a 2000 ans en effet, le prêtre Zacharie en a fait la douloureuse expérience.

C’était pourtant, dit l’évangile, un homme remarquablement pieux et qui respectait tous les commandements de Dieu. Du point-de-vue juif, c’était un vrai, un tout bon; un pur. Il était prêtre, donc tout en haut de la hiérarchie religieuse. Il avait épousé une descendante d’Aaron, famille prestigieuse: Elisabeth, dont le nom signifie “Dieu est ma promesse”.

Seulement, le hic, c’est cette stérilité, totalement imméritée; injuste comme les malheurs de Job ou de tant d’autres.

“Dieu est ma promesse”. Ils l’avaient pourtant pris au mot, ce nom. D’ailleurs, en hébreu, vous savez, si le nom ne nous correspond pas, eh bien on le change! (Ainsi vous connaissez Simon qui devient Pierre). Ils l’avaient pris au sérieux, ce Dieu. Ils avaient prié, avec ferveur, avec foi, avec espérance.


Mais voilà, les années ont passé, sans exaucement. Petit à petit, la ferveur a baissé, la foi est devenue habitude, et l’espérance s’est transformée en résignation.

Devenus vieux, trop vieux pour procréer, Zacharie et Elisabeth n’y croient plus. Bien entendu, a-t-on envie de dire! C’est normal. C’est compréhensible. Cette usure de la foi, de la prière, c’est celle de tant d’entre nous qui n’y croient plus assez, petit à petit, pour faire autre chose que se résigner.

Mais voilà que la nouveauté de Dieu, son imagination, j’allais dire son culot, dépassent tout ce qu’on attend. Un jour où Zacharie, selon la coutume, a été désigné par le sort pour entrer seul dans le coeur du temple de Jérusalem, le “lieu saint”, afin d’y brûler l’encens, voilà qu’un envoyé de Dieu se manifeste. On dit “un ange”, c’est la traduction exacte, en grec, de “missionnaire”, ou de “messager”.

À notre couple fatigué, cet envoyé promet un fils. Il annonce celui que nous connaissons sous le nom de Jean Baptiste, celui qui ouvre les chemins devant Jésus. Il s’appellera Jean, c’est-à-dire “Le Seigneur fait grâce”.

Or, chez les juifs, à l’époque, le premier fils porte par tradition le nom de son père. C’est la coutume. Lui donner un autre nom, c’est donc toujours annoncer qu’il échappera à sa destinée personnelle, familiale, à sa vie toute tracée. Il sera appelé à une autre trajectoire. Sa vie sera consacrée à Dieu, comme l’indique  aussi le fait qu’il ne boira pas d’alcool.

De cette apparition, Zacharie va revenir muet. Aucun son ne sort plus de sa bouche.

Contrairement à ce qu’une lecture rapide pourrait laisser croire, son mutisme n’est pas une punition parce qu’il aurait posé la question “Comment saurais-je que c’est vrai? Ma femme et moi nous sommes si vieux...”. Non, le silence de Zacharie est un signe de Dieu. La phrase de l’ange “Tu n’as pas cru”, elle ne concerne pas la question du vieux prêtre, car beaucoup de personnages bibliques font la même demande, et ils ne sont pas punis. Non, “Tu n’as pas cru” concerne l’usure de la prière de Zacharie et Elisabeth, leur foi qui s’est mise à dévier; leur espérance qui a tourné en rond; tourné en résignation. Probablement qu’ils ne demandaient plus un enfant; peut-être même qu’en bons juifs, ils remerciaient Dieu d’être stériles, et ainsi plus disponibles aux autres, vous voyez...

Alors, Dieu prend Zacharie au mot (si j’ose dire, puisqu’il devient muet!). Dieu prend Zacharie au mot: son mutisme nouveau, il est dans la logique de leur prière qui n’osait plus dire ce qu’ils voulaient, ce dont ils avaient tant rêvé. Ce mutisme va même devenir un signe de l’action de Dieu! De son culot! De sa puissance créatrice! Dieu va agir dans le silence. Dans le silence de Zacharie et dans le silence du ventre d’Elisabeth.


                                                             *                  *
Vingt siècles plus tard, bien des prières sont fatiguées, bien des espérances sont usées. Les nôtres peut-être, individuelles, familiales; de paroisses; d’Eglise. Et les prières du monde, pour la paix; la justice; la réconciliation; la sécurité pour tous. Est-ce que nous osons encore demander tout cela dans la prière? Et si oui, est-ce que nous osons encore y croire?  Croire que c’est réalisable; que Dieu peut le faire; que Dieu veut le faire? La paix en Syrie, en Palestine, en République centrafricaine?

À la veille de ce Noël, avons-nous encore le culot de Dieu, l’audace, la folie d’espérer de toutes nos forces la paix? Et de nous y engager avec la dernière énergie, parce vous connaissez le dicton “aide-toi et le Ciel t’aidera? Dieu ne peut rien sans notre contribution! “Paix sur la terre aux hommes de bonne volonté” chantent les anges de Noël. Paroles cruelles: car justement, n’est-ce pas la bonne volonté qui manque surtout, ici-bas?

Zacharie, Elisabeth et Jean Baptiste nous sont donnés comme des signes. Comme des appels à y croire, à nous engager. Et toujours  sur la même voie: “Son oeuvre sera de réconcilier et de ramener à la justice” dit l’ange au sujet de Jean Baptiste. De ramener à cette harmonie espérée par la Bible: le shalom, la paix; non seulement absence de guerres, mais aussi communion de foi, réconciliation avec Dieu et avec les humains; vie heureuse; sécurité matérielle et spirituelle. En un mot: retrouver le cap, le chemin droit!

Et là, vous voyez, ce n’est pas seulement pour les chefs d’Etat et les conférences pour la paix! Chacun(e), nous sommes concernés! Dans cet Avent encore, Zacharie, Elisabeth et Jean Baptiste pourraient-ils nous y engager?  Amen.

Jean-Jacques Corbaz 



dimanche 1 décembre 2013

(Bi) Pour la saint-Nicolas: au fou!

 Au fou !

L'affaire date des années 60. Les journaux rapportent l'étrange attitude d'un gaillard qui estimait avoir trop d'argent... eh oui, ça existe !

Alors, pendant le temps des Fêtes, il s'était mis à distribuer clandestinement des billets de banque dans certaines boîtes aux lettres. Les destinataires étaient choisis parmi les plus démunis, ou les plus fragiles.

On n'avait jamais vu ça. La police, mobilisée, repéra vite ce Saint-Nicolas moderne, l'arrêta, l'interrogea et l'expédia chez un psychiatre. Ce dernier trouva l'homme parfaitement normal...

Entassez des billets, on vous admirera. Partagez-les, on vous tiendra pour fou !

Puissions-nous mieux développer ce genre de folie. C'est elle qui nous rendra plus heureux, tréfondément. Et Dieu avec nous !
Jean-Jacques Corbaz

samedi 30 novembre 2013

(Ci, Po) Malgré la nuit

Merci à Anne-Sylvie, qui partage ces mots magnifiques de Saint-Jean de la Croix:
"Je sais bien la source qui coule et fuit,
Malgré la nuit
 
Elle est cachée cette éternelle source,
Moi  je sais bien là où elle vient sourdre,
Malgré la nuit
 
Je n’en sait, l’origine n’en a point
Mais je sais que toute origine en vient,
Malgré la nuit
 
Je sais qu’il n’est nulle chose si belle,
Et que les cieux, la terre boivent en elle
Malgré la nuit
 
De fond, je sais qu’on en peut découvrir,
Et que nul à gué ne peut la franchir,
Malgré la nuit
 
Sa lumière jamais n’est obscurcie,
Et je sais que tout éclat en surgit
Malgré la nuit
 
Je sais qu’ils sont si puissants, ses courants,
Qu’ils baignent tout l’enfer, les cieux, les gens,
Malgré la nuit
 
Issu de cette source, le courant
Est si vaste, je le sais si puissant,
Malgré la nuit
 
Le courant qui, de ses deux-là procède,
L’une ou l’autre je sais ne le précède,
Malgré la nuit
 
Cette éternelle source, elle est enfouie
En ce pain vif, pour nous donner la vie,
Malgré la nuit
 
C’est là qu’on appelle les créatures,
Qui boivent de cette eau, même en l’obscur,
Car c’est la nuit
 
Cette source vive que je désire,
C’est de ce pain de vie que je la tire,
Malgré la nuit."
 
 
St Jean de la Croix, « Nuit obscure, Cantique spirituel ».
D’après la traduction de J. ANCET, « Poésie », Gallimard, 1997
 

samedi 23 novembre 2013

(Ci, Ré) LES 10 STRATÉGIES DE MANIPULATION SELON NOAM CHOMSKY

LES 10 STRATÉGIES DE MANIPULATION SELON NOAM CHOMSKY

Il est l’un des plus grands penseurs de notre époque. Un intellectuel d’une objectivité rare et non élitiste par conviction. Un linguiste devenu penseur de son monde et en particulier de sa communication dans la tradition des Guy Debord et autres Pierre Bourdieu.
Ami intime de Jacques Lacan dont il disait que les théories étaient des escroqueries volontaires pour se jouer du monde parisien.
Cet homme, donc, a résumé les 10 stratégies de manipulation des masses. Et il est toujours bon de se les remémorer.


1/ La stratégie de la distraction. Élément primordial du contrôle social, la stratégie de la diversion consiste à détourner l’attention du public des problèmes importants et des mutations décidées par les élites politiques et économiques, grâce à un déluge continuel de distractions et d’informations insignifiantes.

2/ Créer des problèmes, puis offrir des solutions Cette méthode est aussi appelée « problème-réaction-solution ». On crée d’abord un problème, une « situation » prévue pour susciter une certaine réaction du public, afin que celui-ci soit lui-même demandeur des mesures qu’on souhaite lui faire accepter. Par exemple: laisser se développer la violence urbaine, ou organiser des attentats sanglants, afin que le public soit demandeur de lois sécuritaires au détriment de la liberté. Ou encore : créer une crise économique pour faire accepter comme un mal nécessaire le recul des droits sociaux et le démantèlement des services publics.


3/ La stratégie de la dégradation. Pour faire accepter une mesure inacceptable, il suffit de l’appliquer progressivement, en « dégradé », sur une durée de 10 ans. C’est de cette façon que des conditions socio-économiques radicalement nouvelles (néolibéralisme) ont été imposées durant les années 1980 à 1990. Chômage massif, précarité, flexibilité, délocalisations, salaires n’assurant plus un revenu décent, autant de changements qui auraient provoqué une révolution s’ils avaient été appliqués brutalement.


4/ La stratégie du différé. Une autre façon de faire accepter une décision impopulaire est de la présenter comme « douloureuse mais nécessaire », en obtenant l’accord du public dans le présent pour une application dans le futur. Il est toujours plus facile d’accepter un sacrifice futur qu’un sacrifice immédiat. D’abord parce que l’effort n’est pas à fournir tout de suite. Ensuite parce que le public a toujours tendance à espérer naïvement que « tout ira mieux demain » et que le sacrifice demandé pourra être évité. Enfin, cela laisse du temps au public pour s’habituer à l’idée du changement et l’accepter avec résignation lorsque le moment sera venu.


5/ S’adresser au public comme à des enfants en bas-âge. La plupart des publicités destinées au grand-public utilisent un discours, des arguments, des personnages, et un ton particulièrement infantilisants, souvent proche du débilitant, comme si le spectateur était un enfant en bas-age ou un handicapé mental. Plus on cherchera à tromper le spectateur, plus on adoptera un ton infantilisant. Pourquoi ? « Si on s’adresse à une personne comme si elle était âgée de 12 ans, alors, en raison de la suggestibilité, elle aura, avec une certaine probabilité, une réponse ou une réaction aussi dénuée de sens critique que celles d’une personne de 12 ans ». Extrait de « Armes silencieuses pour guerres tranquilles »


6/ Faire appel à l’émotionnel plutôt qu’à la réflexion. Faire appel à l’émotionnel est une technique classique pour court-circuiter l’analyse rationnelle, et donc le sens critique des individus. De plus, l’utilisation du registre émotionnel permet d’ouvrir la porte d’accès à l’inconscient pour y implanter des idées, des désirs, des peurs, des pulsions, ou des comportements…


7/ Maintenir le public dans l’ignorance et la bêtise. Faire en sorte que le public soit incapable de comprendre les technologies et les méthodes utilisées pour son contrôle et son esclavage. « La qualité de l’éducation donnée aux classes inférieures doit être la plus pauvre, de telle sorte que le fossé de l’ignorance qui isole les classes inférieures des classes supérieures soit et demeure incompréhensible par les classes inférieures. Extrait de « Armes silencieuses pour guerres tranquilles »


8/ Encourager le public à se complaire dans la médiocrité. Encourager le public à trouver « cool » le fait d’être bête, vulgaire, et inculte…


9/ Remplacer la révolte par la culpabilité. Faire croire à l’individu qu’il est seul responsable de son malheur, à cause de l’insuffisance de son intelligence, de ses capacités, ou de ses efforts. Ainsi, au lieu de se révolter contre le système économique, l’individu s’auto-dévalue et culpabilise, ce qui engendre un état dépressif dont l’un des effets est l’inhibition de l’action. Et sans action, pas de révolution!…


10/ Connaître les individus mieux qu’ils ne se connaissent eux-mêmes. Au cours des 50 dernières années, les progrès fulgurants de la science ont creusé un fossé croissant entre les connaissances du public et celles détenues et utilisées par les élites dirigeantes. Grâce à la biologie, la neurobiologie, et la psychologie appliquée, le « système » est parvenu à une connaissance avancée de l’être humain, à la fois physiquement et psychologiquement. Le système en est arrivé à mieux connaître l’individu moyen que celui-ci ne se connaît lui-même. Cela signifie que dans la majorité des cas, le système détient un plus grand contrôle et un plus grand pouvoir sur les individus que les individus eux-mêmes. »


mardi 19 novembre 2013

(Ci) la bonne question sur ce qui ne va pas

Vu sur un réseau social:
L'homme demande à Jésus : pourquoi tu permets la famine, la guerre, la souffrance, la maladie, le crime, les sans abris, le désespoir, etc qui existent dans notre monde ?
 
Et Jésus répond : c'est intéressant que tu soulignes ça, j'allais te poser la même question !
 
 

lundi 18 novembre 2013

dimanche 17 novembre 2013

(Pr, Hu) Culte 17 novembre, Grandson: “Si on semait?”

Photo DM
Culte du 17 novembre 2013, Grandson

(accueil)

Chaque fois que je préside un culte missionnaire, je repense à ce pasteur d’autrefois qui partait outre-mer, évangéliser des cannibales. En prenant congé de ses paroissiens en Europe, il leur dit: “Chers amis, priez pour que je sois cru... sinon je suis cuit!”

Eh bien, Dieu aussi nous dit cela. À quelle sauce sera-t-il mangé? Cuit ou cru? La réponse, c’est chacun(e) qui va la donner, dans toute sa vie!


(introduction aux lectures)

Chaque année, le Département Missionnaire et l’Entraide Protestante nous proposent un thème pour leur “campagne d’automne”. Or, pour 2013, c’est la première fois que ce slogan est le préféré des catéchumènes récalcitrants! En effet, notre thème, “Si on semait?” est le leitmotiv des ado peu motivés quand ils commencent une rencontre qu’ils croient barbante. Ils se disent: “Si on semait?”



Matthieu 13, 1-9; Luc 10, 1-2; Ephésiens 4, 11-16

Un vieil arabe était parti pour le Far West - je veux dire qu’il avait émigré aux USA... Un jour, il veut planter des pommes-de-terre dans son jardin. Hélas, le sol est trop dur, et ses bras n’ont plus la force de retourner la terre... Alors il envoie un message par internet à son fils, resté au pays; il lui dit: “Si tu étais ici, tu pourrais labourer pour moi!”

Le fils de notre arabe lui répond aussitôt, également par courrier électronique; il écrit: “Surtout, ne touche pas au jardin, c’est beaucoup trop dangereux, avec ce que j’y ai caché!”

Deux heures plus tard, voilà que la police des E-U débarque, avec la CIA et l’armée... Ils envahissent le jardin de notre homme avec des machines, des outils, des chiens... Ils retournent le sol de fond en comble... mais ils ne trouvent rien.

Le lendemain, le fils envoie un nouveau courriel à son père: “Maintenant, tu peux planter tes pommes-de-terre: le sol doit être parfaitement labouré!”

                                                                       *           *
J’aime cette histoire parce qu’elle me parle de Dieu et de nous! Je me dis que c’est un peu ainsi que Dieu travaille, dans notre monde, pour défricher son jardin. Pour semer aussi, et faire pousser entre nous des relations plus humaines, plus amicales et solidaires. Pour venir en aide à celles et ceux qui en ont besoin. Pour que nous nous respections mieux les uns les autres.

Il n’a pas d’autres mains que les nôtres pour lutter contre le mal? Alors, il nous embauche! Il nous utilise, parfois de manière aussi inattendue que le père et le fils de notre histoire emploient la police et l’armée américaines!

C’est ainsi en tout cas que Jésus a conquis l’Ouest sauvage de son temps; je veux parler de l’Empire romain. Puisque son Père n’avait pas de bras pour planter l’évangile en Europe, le Fils a mis en route des hommes - et même des femmes, ce qui était presque un scandale pour l’époque. On les appelle apôtres, ce sont Paul, Barnabas, Pierre, Silas; Lydie, Philippe... Des gens comme vous et moi!

Bien sûr, ils ne cherchaient pas des bombes, ni des armes de destruction massive. Au contraire: ils portaient sur eux une espèce d’”arme de reconstruction massive”! Ils ont traversé les contrôles aux frontières, ils ont passé les détecteurs des aéroports (euh, j’adapte, bien sûr!), et cela sans se faire stopper. Car cette arme de reconstruction massive, vous l’avez deviné, c’est le pardon de Dieu, sa passion infinie pour nous! C’est son message étonnant: le Créateur veut le bien de chacun(e), sa liberté, sa paix!

                                                                      *           *
Depuis 2000 ans, ces apôtres sillonnent la planète, pour semer cet évangile. Ils ont accepté l’invitation de Dieu, et son appel: si on semait?! À l’île Maurice ou en Inde, comme en Europe ou en Afrique, ils ont fait germer la graine d’une vie plus heureuse, en Christ.

Quelques mots sur l’Eglise presbytérienne de Maurice d’abord. Elle célébrera en 2014 le 200ème anniversaire de l’arrivée dans l’île du premier missionnaire protestant; qui s’appelait Jean Lebrun.

Derrière lui, c’est toute une foule de croyant(e)s qui ont cultivé la vie avec Dieu sur cette terre. Malheureusement, l’Eglise presbytérienne de Maurice (EPM) a de la peine à survivre aujourd’hui. Elle ne compte plus qu’~ 1000 membres, disséminés au milieu de nombreux hindouistes, musulmans et catholiques.

Plutôt que d’accepter son sort, l’EPM a réagi et décidé de retrousser ses manches: si on semait?! Elle a initié un programme d’évangélisation qui lui redonne vie, en partenariat avec la CEVAA (communauté d’Eglises en mission). C’est un véritable printemps des croyant(e)s de cette île perdue au milieu de l’Océan Indien.

Vous avez peut-être entendu parler du pasteur vaudois Alain Monnard, nouveau résident de Crêt-Bérard, qui a travaillé plusieurs années à ce programme missionnaire:
- L’EPM a créé de nouveaux lieux de formation pour les adultes.
- elle a aussi amélioré la qualité des cultes en renouvelant leur musique et en faisant participer davantage les fidèles.
- elle a multiplié les groupes de maison, pour favoriser le partage et le soutien entre voisins; discussions, prières, mais aussi par exemple un ciné-club! Il s’agit de s’adapter aux conditions locales davantage que ne l’ont fait les premiers missionnaires. Par exemple, comme la nuit tombe très tôt, vers 18h, et que l’éclairage est rare, on ne peut pas demander aux gens de se déplacer sur de longues distances; il est plus stimulant de les inviter à rencontrer leurs proches voisins, et d’entrer en dialogue avec eux.
- L’EPM  s’est tournée également vers les jeunes.
- et enfin, elle a développé des actions concrètes en faveur des plus pauvres: repas pour les affamés, programmes contre la violence dans les rues, ou l’alcoolisme, ou la drogue...
Tout cela commence à porter des fruits, quel plaisir! Mais les ressources financières de l’EPM sont limitées, hélas. Et c’est pour cela qu’ils ont besoin de notre appui d’aujourd’hui. De nos prières et de nos dons.

                                                                      *             *
Photo EPER
Quelques mots maintenant sur l’Inde. Un pays immense et plus contrasté que l’Europe entière!

L’Inde n’est pas un pays pauvre. Son économie est en plein boum, un peu comme le Brésil ou la Chine. Hélas, ce développement ne profite qu’à une toute petite partie de la population, tandis que la grande majorité s’enfonce dans la pauvreté. Surtout dans les campagnes. Ici aussi, le principe de Lavoisier se vérifie: “rien ne se perd, rien ne se crée”. La richesse d’un petit nombre sort de la poche d’une quantité de défavorisés - à part qu’ils n’ont souvent pas de poche!

Une petite question: est-ce que vous pourriez vivre avec moins de 90 centimes suisses par jour? Eh bien, c’est le lot du quart de la population de l’Inde, soit 340 millions de personnes. C’est terrible!

Beaucoup de problèmes dans ce pays viennent du système des castes, que vous connaissez. Pourtant, les lois interdisent toute discrimination basée sur les castes; hélas, les mentalités n’évoluent guère, surtout dans les zones rurales, et les traditions de rejet perdurent. Les “sans caste”, ou “intouchables” sont exploités par les autres et maintenus dans la misère.

L’Entraide Protestante (l’EPER) a développé un programme d’aide pour ces plus pauvres, surtout les femmes. On leur apprend à utiliser des semences locales, et à garder une partie des graines récoltées pour les semailles suivantes. On encourage l’usage d’engrais naturels et faciles à obtenir, comme par exemple le compost avec des lombrics. On leur remet de petits poulaillers ou des chèvres, pour survivre. Un des slogans de ces programmes m’a frappé: “L’oppression des femmes est un signe d’ignorance. Si tu déprécies ta meilleure moitié, tu te déprécies toi-même.” - Je vous laisse déguster!

L’EPER soutient aussi les peuples de la forêt, qui ont été très souvent dépouillés de leurs territoires, un peu comme les Indiens d’Amérique. L’EPER les aide à connaître leurs droits, et aussi à faire valoir ces droits; par exemple par des démarches auprès des pouvoirs publics. Grâce à l’EPER, bien des villages de la forêt peuvent dorénavant garder la possession de leur coin de terre, et en tirer de quoi vivre.

Les personnes que vous pouvez voir sur l’affiche de la campagne de cet automne, ainsi que sur le petit dépliant que vous avez reçu à l’entrée, sont parmi les bénéficiaires de ces programmes. Il s’agit notamment de la famille Bhumula, en Inde du sud. Ils vous disent à la fois “merci!” et “SVP!”, vous l’avez deviné!!

                                                                       *           *
Si on semait?! Avec des graines locales, bien entendu! Si on semait l’évangile, la bonne nouvelle de l’espoir? La solidarité, l’amour que Dieu nous a déjà donné?!

En écoutant nos trois passages bibliques, vous avez remarqué la richesse des images, pour parler du rôle des croyants: nous sommes invités à devenir des semeurs, qui répandent l’évangile. Mais nous sommes aussi la graine elle-même, voire la terre, plus ou moins propice à une bonne culture. Nous sommes également parfois moissonneurs, pour aider le Père. Et, dans la lettre aux Ephésiens, nous sommes invités à grandir, à germer, à pousser; et à le faire ensemble, comme un corps, uni par l’Esprit saint; le corps du Christ, appelé à progresser dans la foi.

Si on semait?! Vous le savez, il y a encore du pain sur la planche. Et des kilos et des kilos! La conquête de l’Ouest sauvage n’est de loin pas terminée, vous le voyez! La joyeuse nouvelle de Jésus, l’arme de reconstruction massive de Dieu, (elle) a encore bien du chemin à faire, pour être visible et vraie sur notre terre, à l’est comme à l’ouest - au nord comme au sud! Entre nous; et en nous. Ici, à Grandson, aux Tuileries, à Orges ou Giez! Et en moi, d’abord.

Et cette progression, elle est notre affaire à tous, gens du pays! C’est notre tour: de nous laisser parler d’amour!! C’est ensemble que nous pourrons mieux semer; germer; et croître!

Ne restons pas au bord de la route à attendre l’arrivée de super-apôtres. C’est nous que Dieu appelle à nous mettre en chemin. C’est nous que Dieu invite à devenir, nous aussi, ambassadeurs d’évangile; laboureurs de sa mission, semeurs de son pardon.

(Même sans en être conscients, comme la CIA de nos arabes!). Amen

                                                                                                          Jean-Jacques Corbaz


photo jjc

(après la prédication)

Il restera de toi...
Il restera de toi
ce que tu as donné.
Au lieu de le garder dans des coffres rouillés.

Il restera de toi de ton jardin secret,
Une fleur oubliée qui ne s'est pas fanée.
Ce que tu as donné
En d'autres fleurira.
Celui qui perd sa vie
Un jour la trouvera.

Il restera de toi ce que tu as offert
Entre les bras ouverts un matin au soleil.
Il restera de toi ce que tu as perdu
Que tu as attendu plus loin que les réveils,
Ce que tu as souffert
En d'autres revivra.
Celui qui perd sa vie
Un jour la trouvera.

Il restera de toi une larme tombée,
Un sourire germé sur les yeux de ton coeur.
Il restera de toi ce que tu as semé
Que tu as partagé aux mendiants du bonheur.
Ce que tu as semé
En d'autres germera.
Celui qui perd sa vie
Un jour la trouvera.

Simone Veil