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mardi 17 novembre 2020

(Bi) Deuxième vague du corona

(billet pour le Flash-Info de Plein Soleil)

 

Deuxième vague (à l’âme ?). La Nouvelle Vague ne fait plus rêver personne ! Elle nous trouve déjà à bout de souffle, comme disait Godard. Avec toujours cette lancinante question : à quelle sauce allons-nous être mangés ? Qu’est-ce qui sera interdit, qu’est-ce qui sera autorisé ?

 

Disons-le clairement : nos autorités font ce qu’elles peuvent. Il n’y a ni complot ni incompétence crasse. Mais nous sommes confrontés à un virus dont on ignore encore beaucoup de choses. Le Conseil Fédéral, le Conseil d’Etat comme la direction de Plein Soleil se trouvent un peu dans la situation d’un conducteur d’auto qui ne verrait la route que dans ses rétroviseurs. Vaguement. On décide de tourner à droite ou à gauche, et ce n’est qu’après quelque temps qu’on se rend compte si c’était juste ou non.

 

Deuxième vague. Oui, on rame. Nous sommes tous en train de ramer. Ou de surfer, si vous préférez (allusion au télétravail via internet).

 

Sans mentir, si notre ramage se rapporte à notre plumage, nous n’allons pas voler bien haut.

 

Je vous invite au contraire à regarder en bas. C’est là que nous y trouverons l’Enfant de Noël, que nous allons célébrer vaille que vaille dans quelques semaines. Au plus creux du creux de la vague, il se tient là, tout proche de nous. Amical à en mourir.

 

Nous ramons ? Il rame aussi. Nous doutons, nous tournons en rond ? Il se fait étoile dans notre nuit. Nous sommes entre ses mains, et là, même dans la mort, rien de tragique ne peut nous arriver. Nous sommes le trésor de son amour passionné.

 

Au pire de la tempête, il nous tient la main, solidement. Il ne nous lâchera pas. Nous pouvons nous sentir en sécurité.

 

Vaguement ? Non : pleinement.

 

 

Jean-Jacques Corbaz, pasteur  

 



 

 

 

lundi 9 novembre 2020

(Pr) Du 9 novembre: "La résurrection de Lazare - et la tienne? (Les morts, vivants?!)"

Appelés à vivre libres


Il y a quelques jours, c’était Halloween. On y a vu défiler (certes un peu moins que d’autres années, Covid oblige...) les enfants déguisés en sorcières, en fantômes, en zombies ou autres morts-vivants.

Vous savez sans doute que cette fête est dérivée de la Toussaint, célébrée le 1er novembre depuis le 9è siècle, et de la fête des morts fixée au 2 novembre.

Ces deux commémorations chrétiennes semblent avoir été placées à ce moment de l’année pour supplanter une fête païenne celtique du Nouvel-An extrêmement populaire encore au Haut Moyen Âge, “Samain”; lors de cette fête de Samain, on disait que les barrières entre notre monde et l’au-delà    étaient provisoirement supprimées; l’irréel côtoyait le réel; les morts et les esprits mauvais pouvaient revenir à cette occasion.

Comme ce fut le cas pour Noël et d’autres encore, la célébration païenne s’est progressivement mélangée aux fêtes chrétiennes et les a “contaminées”. Venue des USA, Halloween (qui signifie “veille de la Toussaint”) a repris cette mixture dans une sorte d’exorcisme de la mort et de tout ce qui fait peur.

J’ai souhaité, quelques jours après cette fête, reprendre le coeur de ce qui s’y joue: la mort, la peur. Et voir comment Jésus veut y agir.

 

Lecture: Jean 11, 1-57 


- Monsieur le pasteur! Sur quoi allez-vous prêcher, dimanche?

- Eh bien, sur la résurrection de Lazare.

- La résurrection de Lazare? Charrette, dit-il en se grattant la tête. C’est-y vrai, cette histoire?

Il a raison, mon interlocuteur. Sa perplexité, je la comprends bien. Car ce genre de récit provoque en nous la question: “Est-ce que ça s’est vraiment passé comme ça? Comment est-ce possible?”

Il faut se souvenir, d’abord, de ce qu’est la Bible. Elle n’est pas un recueil de textes magiques ou de recettes. Elle est avant tout un bouquet de témoignages sur Dieu et sur Jésus. Témoignages d’hommes et de femmes qui ont vécu des choses très importantes. C’est un peu comme dans les fables de La Fontaine: l’essentiel n’est pas de savoir s’il est possible que le corbeau et le renard se parlent; l’important, c’est la morale de la fable, i.e. ce que l’auteur veut nous faire comprendre à travers cette histoire.

Les récits de miracles ou de phénomènes surnaturels de la Bible sont du même ordre. C’est tout spécialement vrai pour la résurrection de Lazare, puisqu’elle ne figure pas dans les trois autres évangiles de Matthieu, Marc et Luc; seul celui de Jean la raconte. C’est donc que ce passage concerne une situation particulière.

Nous devons ainsi nous poser la question: qu’est-ce que l’auteur veut nous dire, à travers cette histoire?

Est-ce qu’il veut souligner le fait que Jésus est un super-faiseurs de miracles, qui épate les foules? Non, car après la résurrection de Lazare, on ne mentionne pas une admiration de l’assistance, comme souvent ailleurs. On ne voit aucune des personnes présentes s’émerveiller de la puissance du Christ sur la mort. Au contraire: la conséquence de la résurrection de Lazare, c’est que les juifs cherchent à faire mourir Jésus.

D’autre part, le miracle est raconté de manière très brève: il n’occupe que deux versets sur les 57 du chapitre!

Donc, Jean veut nous dire autre chose. Autre chose que ce qu’on croit lire en général dans ce récit.

Quoi donc?

D’abord, une question: qui est le personnage principal de ce chapitre? Lazare? Marthe? Marie? ... J’espère que d’avoir lu les 57 versets d’affilée vous a aidés à sentir à quel point cette histoire est centrée sur le Christ. C’est lui qui prend les décisions; c’est lui qui interprète les évènements; c’est lui qui provoque même le complot des juifs contre lui.
  

 
Notre récit ne s’intéresse pas tellement à Lazare: on ne sait rien de sa vie, avant sa mort; on ne sait rien de ses pensées, après sa résurrection; il ne parle pas, il ne fait qu’obéir aux ordres de Jésus! On ne voit pas non plus ses soeurs lui courir dans les bras.

Comme un cinéaste, l’évangile de Jean focalise sur le personnage qui seul signifie quelque chose pour nous; celui que seul il faut prendre absolument au sérieux: Jésus. Croyez en Lazare ou pas, l’important n’est pas là, qu’il ait été ramené à la vie ou non. D’ailleurs, ensuite, il est mort une seconde fois; au contraire du
Christ, qui vit pour l’éternité. Croyez en Lazare ou pas, l’essentiel c’est Jésus, qui donne un message de vie. Et c’est cela qu’il faut prendre au pied de la lettre!

Ce message du Christ, ici, parlons-en un peu. Pour relever, d’abord, la situation particulière de ce chapitre 11: il fait la charnière entre d’une part le ministère de Jésus (sa prédication et ses miracles) dans les 10 premiers chapitres; et d’autre part le récit de la Passion, ses derniers jours à Jérusalem, sa mort et sa résurrection, qui occupent la fin de l’évangile, les 10 derniers chapitres.

Notre histoire est donc placée là un peu comme une préparation à ce qui va suivre; on pourrait même parler de “répétition générale” de la Passion. Comme si Jésus (ou Jean) voulait préparer ses disciples (ou l’Eglise) à ce qui va survenir, à Vendredi Saint et Pâques. Derrière ce qui arrive à Lazare, c’est bien la mort et la résurrection du Christ qui se dessinent, son combat contre les forces de destruction!

Quand l’évangile nous dit que Jésus frémit, ou qu’il est attristé, on pense à son chagrin, seulement. Or le mot grec qui est utilisé dans la version originale contient deux dimensions différentes: la tristesse, et aussi la colère.
Impossible, en français, de trouver un mot qui évoque les deux sentiments. Les traductions sont donc toujours à moitié fausses, par la force des choses. (Si vous trouvez un terme qui puisse rendre les deux dimensions, faites-nous signe, ça rendra un fier service aux traducteurs!).

Chez Jésus donc, colère et tristesse. Car il vit, déjà, le combat de Golgotha. Il va déjà affronter la mort sur son propre terrain. Dans l’évangile de Jean, la victoire du Christ, ce n’est pas Pâques, mais Vendredi Saint! Vous savez, dans l’évangile de Jean, Christ est glorifié entièrement sur la croix, car c’est là qu’il a vaincu la mort, en l’affrontant souverainement. En acceptant de passer par là, comme nous, bien qu’il était Dieu. En toute liberté.
   
Liberté. Voilà un mot essentiel qui apparaît. J’ai toujours été intrigué par un mot, dans ces paroles de Jésus lorsque Lazare sort du tombeau: “Déliez-le et laissez-le aller”. Délier n’est-il pas trop fort, pour des bandelettes de parfum? Il pouvait déjà marcher, puisqu’il sort par lui-même. Mais, en grec, c’est bien ce verbe: celui qu’on emploie pour libérer des prisonniers enchaînés, ou détacher du bétail.

Il y a donc bien, dans le texte original, un mot un peu excessif qui a été utilisé. Pas par maladresse! Non, à dessein, pour montrer que cette résurrection est le signe de la liberté, de la libération que Jésus vient nous offrir.

“Déliez-le et laissez-le aller”. Le second verbe le souligne encore. Ce mot grec est celui qu’on emploie pour laisser partir vers la liberté; pour donner son envol à celui qui est délivré. Le pasteur Zeissig dit que c’est le geste qu’on fait après un dépannage réussi. “Bon vent! Que ta liberté te rende heureux!”
  

 
Au fond, dans cette histoire, qui donc était mort? Et qui était vivant?

Les morts, n’étaient-ce pas aussi Marthe et Marie, prisonnières de leur chagrin, de leurs regrets, voire de leurs reproches (“si tu avais été ici...”)? Marthe et Marie, et leurs pleureuses, et leurs consolateurs, et leurs espérances (“À la fin des temps, oui, je sais, il ressuscitera...”)? Mais non! dit Jésus. La résurrection, elle est devant vous, elle est pour ici et pour maintenant, parce que le fils de Dieu vous aime à ne pas pouvoir être plus proche. Parce qu’il a choisi de venir, de traverser le Jourdain pour vous donner la vie (même si, pour cela, il doit perdre la sienne).

Qui était vivant? Jésus seul, qui va mourir; Jésus, que son miracle “projette” au milieu des complots des chefs juifs pour l’éliminer. Jésus seul est vivant, parce que libre.

Seul? Mais nous aussi; quand nous croyons en lui; quand nous mettons notre espérance, notre vie entre ses mains; quand nous parvenons, à certains moments, à recevoir sa délivrance, sa liberté; à effacer nos peurs de la mort. “Déliez-le et laissez-le aller”: c’est de nous, c’est de toi qu’il dit cela, le ressuscité: “Bon vent! Que ta liberté te rende heureux!”
   


Pour finir, qui est le personnage principal de cette histoire? N’est-ce pas nous-mêmes? Toi, moi, aux prises avec notre peur, avec notre mort, avec nos chaînes? “Déliez-le et laissez-le aller!”

En ce temps-là, la mort faisait si peur qu’elle devenait presque un dieu. Jésus la remet à sa place. En restant jusqu’au bout en souveraine liberté, il devient Dieu à la place de la mort.

Dès lors, pour nous, humains, la question n’est plus la même, le but est changé: l’essentiel, ce n’est plus de ne pas mourir; l’essentiel, c’est d’être libre, dans la vie ou dans la mort. La vraie vie, ce n’est pas l’absence de décès, mais c’est la liberté face à la mort. C’est déjà ce que disait un autre verset de ce chapitre, mais qu’on a peut-être trop entendu: le verset “Celui qui croit, même s’il meurt, vivra”.

Avec la foi, la frontière entre la vie et la mort n’est plus la même. Elle n’est plus infranchissable!

Cette résurrection de Lazare nous parle donc de liberté. Elle s’adresse aux personnes en fin de vie, que nous ne sommes pas. Elle s’adresse aussi aux proches, aux familles, aux soignants de ces personnes en fin de vie, ou aux endeuillés (et là, nous sommes sans doute plus concernés). “Déliez-le et laissez-le aller”. “Bon vent, que ta liberté te rende heureux”. Elle veut nous aider à ne pas regarder la mort avec peur; au contraire, la qualité de vie, la foi, la libération sont mille fois plus importantes.

Ce chapitre de l’évangile veut encore nous rendre plus libres à l’égard de la hantise de vieillir, de déchoir, de perdre nos facultés; voire de démériter, de souffrir... Beaucoup de personnes âgées ont une qualité de vie si diminuée que ce n’est pas la mort qui leur fait le plus peur. Un peu à l'image de ce qu’il y a derrière ce dicton chinois: “Je te maudis! Puisses-tu vivre très longtemps!”
   

- Monsieur le pasteur! Sur quoi allez-vous prêcher, dimanche?

- Eh bien, cher ami, sur votre vie. Sur votre qualité de vie et votre souffle. Votre liberté.

- Charrette! C’est vrai?

Amen                                          


Jean-Jacques Corbaz