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mercredi 30 décembre 2015

(Bi, An) Bonnannée!


Je vous souhaite une excellente année à venir, pleine d'avenir lumineux et de bonheurs qui en jalonnent le chemin.
.
Avec de quoi prendre de la hauteur, comme sur l'image ci-contre! Au-dessus des nuages, la liberté semble être infinie, chante Frédéric Mey.

JJ



dimanche 27 décembre 2015

(Pr, Co) "Le 4ème saule et le trésor"



Prédication du 27.12.15

Matthieu 13, 44; Matthieu 16, 13-19; 2 Corinthiens 4, 6-7

C’est l’histoire de Louis Mallet, en France voisine, il y a longtemps, pendant la guerre. Louis a trente ans, et rêve de se marier. Depuis la mort de ses parents, il est seul dans la ferme, trop grande. Il n’a avec lui qu’un vieux domestique de campagne, Armand. Et puis quelques économies: de l’argent qu’il a hérité de ses parents, et qu’il garde précieusement dans un petit coffre, pour rénover sa maison, le jour où il se mariera.

Hélas, Louis ne pourra pas réaliser ses rêves. Un jour, le facteur lui apporte une grosse lettre: il est mobilisé. Départ dans quelques jours pour l’armée. La guerre.

Armand, le domestique, est trop âgé pour être appelé sous les drapeaux. Alors, Louis lui confie la ferme et les travaux des champs. “Ne t’en fais pas, dit Armand, tu peux compter sur moi!”

Rassuré, Louis peut partir délivré de ce souci. Mais lui reste un problème: que faire avec le coffre et l’argent? Les banques risquent de tomber entre les mains des ennemis, c’est trop risqué. La ferme elle-même peut être attaquée. Donc, il faut cacher son petit trésor. Mais où?

Tout-à-coup, il a une idée: les saules! En effet, il y a, à côté de sa grange, une rangée de vieux saules creux où il allait jouer quand il était petit. Depuis longtemps, il n’y a plus d’enfant dans la ferme, et personne n’y va plus. Ce sera une excellente cachette!

Louis va vers les saules et les examine bien, ils n’ont pas changé. Il voit que le cinquième saule est profond, ça ira extra! Il monte sur une échelle, et laisse descendre son précieux coffret au bout d’une corde. Personne ne l’a vu, ouf!

Et puis Louis passe chez son voisin, le père Jules. Il lui explique ce qu’il a fait. “Je sais que je peux te faire confiance, Jules. Je n’ai pas d’enfant. Si des fois je ne reviens pas de cette guerre, j’aimerais que mon argent soit donné à Armand, il m’a tellement aidé. Si je devais mourir, serais-tu d’accord de simplement lui indiquer la cachette et de lui dire de profiter de cet argent pour ses vieux jours?”

Jules accepte, bien sûr, et promet à Louis de ne jamais divulguer son secret. “Ne t’en fais pas, tu peux compter sur moi!”

 


Pendant six mois, Louis est sous les drapeaux, sans avoir la moindre nouvelle. Et puis, pas de chance, il est fait prisonnier. Il reste quatre ans en Allemagne, dans un camp. Et ce n’est que lorsque la paix est revenue qu’il peut enfin rentrer à la maison.

Et ce qu’il redoutait est arrivé: l’armée ennemie a pris le village; et sa ferme, comme la plupart des autres, est à moitié détruite, portes enfoncées, fenêtres arrachées; à l’abandon. On lui raconte qu’Armand, son domestique, n’a pas réussi à empêcher les soldats de piller la maison. Et qu’il a dû aller travailler dans un village voisin.

Le coeur battant, Louis se dirige vers les saules. Son argent ne sera pas de trop pour réparer sa ferme et racheter quelques vaches. Ouf, les arbres creux sont toujours là. Un, deux, trois, quatre... Louis monte dans le cinquième, et cherche son coffret. Hélas, rien! Pas le moindre objet à l’intérieur du vieux saule!

Plein de colère, il court chez le père Jules et lui tombe dessus: “Mon argent! Mon coffret! Qu’en as-tu fait?”

Etonné, Jules jure ses grands dieux qu’il n’a pas touché ni l’arbre ni la cassette. Et qu’il n’a rien dit à personne.

- Menteur! crie Louis, dans une fureur noire. Tu m’as volé, sale hypocrite! Il traite Jules de tous les noms. Et s’en va, en claquant la porte.



Quelques jours après, il y a un décès au village. C’est la vieille Simone, la plus pauvre de la commune. À cette occasion, Louis revoit son ancien domestique, Armand. Ce dernier lui raconte ses tribulations, et son impuissance à empêcher l’armée ennemie de s’emparer de la ferme.

Puis ils parlent de la vieille Simone. “Elle n’avait pas tous les jours à manger, se souvient l’ancien domestique, tant la misère l’accablait. Un hiver, la foudre est tombée sur un des saules à côté de la ferme. Alors, j’ai coupé à la hache tous les morceaux de cet arbre cassé, et je les ai donnés à Simone, pour qu’elle puisse se chauffer...”

En entendant cela, aussitôt, Louis se lève. Tout pâle, il prend Armand par les épaules, et sa voix tremble quand il demande:
- “C’était... quel saule?”

- Ben, c’était le premier depuis la grange. Pourquoi?

Aussitôt, Louis court vers les arbres. Et dans le quatrième saule, il trouve son précieux coffret. Et l’argent qu’il avait caché!!


C’est Armand qui m’a raconté cette histoire. Il a ajouté que Louis lui avait donné deux gros billets, pour le remercier. Et qu’ensuite, il avait couru chez le père Jules, pour tout lui expliquer. Et lui demander, tout honteux, de l’excuser. Depuis, les deux paysans se sont réconciliés et ils s’entraident pour leurs travaux.
 


“Ce trésor, nous le portons dans des vases d’argile”. Il y a le trésor, et il y a ce qui le contient: un saule creux, un pot de terre... une armoire. Le trésor est important, il a beaucoup de valeur; mais ce qui contient le trésor est tout aussi important, même s’il n’a aucune valeur en lui-même. Tout aussi important justement parce qu’il contient le trésor! Ce n’est plus un vieux saule comme il y en avait des milliers, un vieux saule qui ne valait trois fois rien; il est devenu un arbre d’une immense valeur! Quelle différence de prix entre le quatrième saule et le cinquième, tout-à-coup! À cause de ce qui est dedans!

“Ce trésor, nous le portons dans des vases d’argile”. Le trésor de la passion de Dieu pour nous, de ses promesses de pardon, il l’a placé à l’intérieur de nous. Par le Christ, nous devenons non plus de simples saules (pleureurs ou non!); non plus de simples ensembles de muscles, de peau, de sang: nous devenons enfants de Dieu, adoptés par amour. Nous devenons ainsi, logiquement, frères et soeurs, appelés à vivre réconciliés, comme Louis et Jules; à reconstruire un monde où règnent la justice et la paix.
 
 

“Jésus lui dit: «Tu es heureux, Simon, car ce n'est pas un être humain qui t'a révélé cette vérité, mais mon Père du Ciel. Je te le déclare, tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église. La mort même ne pourra rien contre elle. Je te donnerai les clés du Royaume des cieux.»”

Ces paroles de Jésus nous semblent exagérément pompeuses. Vous le savez, l’Eglise catholique s’appuie sur ce passage pour asseoir la souveraineté du Pape, en tant que successeur de Pierre. Or, qu’est-ce que l’apôtre vient de dire, et que Jésus salue ainsi? Oh, pas grand-chose, juste: “Tu es le Christ, fils du Dieu vivant”!

Ce que l’évangile veut mettre en évidence, c’est le contraste entre cette affirmation et toutes les autres réactions face à Jésus: “Certains disent que tu es un prophète, Elie ou Jérémie...” un homme extraordinaire! Un gourou...

Pierre, en reconnaissant Jésus comme le Christ, n’est plus un vase de terre comme les autres; il n’est plus un saule comme les autres. Il a montré qu’il contenait le trésor! Et c’est ça, et rien que ça qui fait sa valeur, à Pierre! Il n’est pas un super-chrétien, au-dessus de nous. Au contraire: tout(e) croyant(e) est digne des mêmes éloges! Pierre n’est pas un super-chrétien; ce qui fait son prix, c’est le trésor qu’il contient: soit la présence toute proche de Dieu, en Jésus, acceptée et reconnue!
 

Dans le Nouveau Testament, nous sommes tous des saint(e)s. Savez-vous que les auréoles ont été inventées, au Moyen Âge, pour montrer que les chrétiens (tous les chrétiens!) étaient habités d'une lumière vive, reçue d'En-Haut, et qui rayonnait autour d'eux? Ce disque lumineux autour de la tête voulait dire: "Voilà quelqu'un qui a su laisser vivre en lui la Clarté majuscule de Dieu, quelqu'un qui sait aussi la diffuser autour de lui par ses paroles ou par ses actes".

La lumière de Noël nous est donc donnée pour qu’elle pétille autour de nous! Et les signes de ce trésor, ce sont le baptême et la Cène; gestes de confiance et d’espérance; gestes de reconnaissance aussi: nous reconnaissons être les dépositaires de ce trésor immense, qui que nous soyons.

Par le baptême; par la sainte-Cène, le Christ nous dit: “Tu es un vase qui contient le trésor du Père, sa lumière. Tu es heureux,  Ernest, Camille, Christine, Raphaël, heureux, car ce n'est pas un être humain qui t'a révélé cela, mais mon Père du Ciel. Sur toi je bâtirai mon Église, la mort même ne pourra rien contre elle. Je te donnerai les clés du Royaume de Dieu”.  Amen
                                                                                                                                                                                                           Jean-Jacques Corbaz  





                                                                                                                                                                                                                   

vendredi 25 décembre 2015

(Ci, Ré, Bi) En ce temps-là...

"En ce temps-là,
la guerre faisait rage au Moyen-Orient.
En plus du gouvernement d’Assad,
dont le pouvoir était contesté dans la région,
un puissant groupe terroriste provoqua
un déplacement massif de population autour de la Méditerranée.
Les migrants fuyaient par milliers leur pays miné
par les attentats et la terreur,
essayant de retrouver des parents ou des proches
quelque part en Europe.

Youssouf partit lui aussi de chez lui, de la région d’Alep,
parce qu’il ne voulait se rattacher
à aucune des forces armées présentes dans sa région.
Après avoir payé un passeur à prix d’or,
il s’embarqua sur un canot pneumatique
avec Myriam son épouse qui était enceinte.
Ensemble, ils franchirent la mer au péril de leur vie,
puis sillonnèrent une grande partie de l’Europe.

Mais le jour où elle devait accoucher arriva.
Comme il n’y avait plus de place dans les camps de la Croix-Rouge,
ils se réfugièrent dans ce qu’on appelait « la jungle de Calais ».
Là, elle mit au monde son fils premier-né,
le langea avec les moyens du bord,
et le coucha dans une boîte en carton
qui fit office de berceau improvisé.

Dans la ville de Calais,
il y avait des vigiles qui patrouillaient la nuit
pour garder les installations de sites dits sensibles
qu’il s’agissait de protéger.
Tout à coup, ces vigiles virent apparaître une forte lumière.
Ne comprenant pas ce qui se passait, ils eurent très peur.
Une voix leur dit :
« Pas de panique ! Écoutez plutôt :
cette nuit, en pleine jungle de Calais,
est né celui qui vous délivrera de la guerre,
des peurs et des égoïsmes.
Il inspirera la confiance, la bonté
et fera de chaque personne de bonne volonté un artisan de paix.
Voici à quoi vous le reconnaîtrez :
vous trouverez un nouveau-né emmailloté
dans des langes de fortune
et couché dans une boîte en carton. »
Puis, ce fut comme si une chorale céleste
se joignait à cette lumière.
Elle se mit à chanter :
"Gloooo-ria in excelsis Deo!"

Quand la chorale les eut quittés,
les vigiles se dirent entre eux :
allons jeter un œil dans cette jungle
pour voir ce qui s’y est vraiment passé.
Ils y allèrent et trouvèrent
Myriam, Youssouf et le nouveau-né
couché dans sa boîte en carton.

Lorsqu’ils les virent,
ils leur racontèrent dans un anglais approximatif
ce qui leur avait été dit au sujet de l’enfant :
"We hear that this kid will become a special king :
one who can help us to build peace on earth
and achieve harmony between people & nations
That’s awesome ! But can you believe it ?"

Les autres migrants,
qui s’étaient attroupés autour d’eux
étaient tout étonnés de ce qu’ils entendaient.
Quant à Myriam,
elle gardait tout ce qui se passait ce soir-là
aux tréfonds de son cœur.

Heureux de ces événements,
ils improvisèrent une fête
qui dura jusqu’à tard dans la nuit.
Puis, les vigiles s’en retournèrent
en chantant les airs de musique qu’ils avaient entendus,
car tout s’était déroulé comme on le leur avait dit."

Christian Vez et Xavier Gravend-Tirole

 

jeudi 24 décembre 2015

(An, Im) Joyeux Noël!

Meilleurs voeux à vous tous! 
Que Noël vous soit beau, profond et riche de liens forts. 
Et qu'entre le boeuf et l'âne gris germe, grandisse une confiance qui vous donne sens.



(Bi, Ré) Les deux plus difficiles...

Les deux choses les plus difficiles à dire au monde, pour chacun(e), ce sont "Je m'excuse" et "Aidez-moi, SVP".

JJC


mercredi 23 décembre 2015

(Bi) Il tue quatre personnes, mais échappe à la prison

Mon journal d'hier m'apprend qu'on n'arrête pas le progrès, surtout aux USA. Hem! Un jeune homme sous l'influence de l'alcool a fauché et tué quatre piétons qui ne lui avaient rien fait, blessé plusieurs autres. Tout cela avec pour seule condamnation une mise à l'épreuve de 10 ans et une obligation de soigner son alcoolisme.

Pourquoi cette clémence? Parce que c'est un "gosse de riche, incapable de se rendre compte de la portée de ses actes, et rendu irresponsable par l'insatisfaction des gens qui ont tout". MDR

Bien entendu, il n'a pas changé son rapport à la bouteille. On l'a vu sur une vidéo jouer à un jeu qui n'a pour but que la beuverie... Pourquoi changer, si tu n'as pas besoin d'assumer les conséquences de tes actes?

Alors voilà, vous qui me lisez, vous connaissez le truc pour échapper à la "justice". Soyez fils de milliardaire, et on vous trouvera toutes les excuses bidon...

On savait les tribunaux des USA dotés d'une logique euh... surprenante, voir les dommages-intérêts farfelus obtenus par certains. Mais là, ils passent le mur du Çon!

Jean-Jacques Corbaz


dimanche 20 décembre 2015

(Pr) De Charlot à Jésus et aux Dupondt, l'espérance qui réveille!

Lectures bibliques: Luc 1, 5-25; Zacharie 8, 12-13

Dans les années 30, le personnage de Charlot avait un énorme succès. On aimait se déguiser à la manière du célèbre vagabond à la canne, et on organisait des “concours du meilleur Charlot”.  Or il paraît qu’un jour, le véritable Charlie Chaplin a participé à l’une de ces compétitions. Incognito, et avec un petit sourire. Tenez-vous bien, sur sept concurrents, il a obtenu: la troisième place...


Permettez-moi maintenant une petite question légèrement impertinente: à supposer qu’on organise, aujourd’hui, un “concours du meilleur Jésus Christ”. 

À supposer encore que Jésus, le vrai, participe à cette compétition... Vous me voyez venir: est-ce que même il remporterait le troisième prix?! ...

Je n’en suis pas sûr. Tellement il a été déformé à travers les siècles. Tant de gens le façonnent à leur idée. Voire à leur profit! On voit son message, son évangile, mis à toutes les sauces. Nos contemporains oublient des choses essentielles sur lui.


Nous faisons trop souvent avec la religion comme les Dupond-Dupont perdus au milieu du désert (l’histoire se trouve dans “Tintin au pays de l’or noir”): on part dans la bonne direction; on avance; on croit aller bien droit... Et soudain, on aperçoit des traces devant soi. Tout heureux, on les suit. Longtemps après, on rejoint de nouvelles traces; et, des heures plus tard, d’autres encore... Jusqu’à ce qu’on réalise que toutes ces empreintes, ce sont les nôtres, et qu’on a tourné en rond! On croyait avancer bien droit, mais on a tellement dévié, imperceptiblement, qu’on s’est mis à tourner en rond.

La religion qui dévie, qui perd le cap; qui s’égare, qui s’érode... Ce phénomène ne date pas d’aujourd’hui. Il est vieux comme Hérode! Il y a 2000 ans en effet, le prêtre Zacharie en a fait la douloureuse expérience.

C’était pourtant, dit l’évangile, un homme remarquablement pieux et qui respectait tous les commandements de Dieu. Du point-de-vue juif, c’était un vrai, un tout bon; un pur. Il était prêtre, donc tout en haut de la hiérarchie religieuse. Il avait épousé Elisabeth, descendante d’Aaron, famille prestigieuse; Elisabeth, dont le nom signifie “Dieu est ma promesse”.

Seulement, le hic, c’est cette stérilité, totalement imméritée; injuste, comme les malheurs de Job ou de tant d’autres. Elisabeth ne peut pas avoir d’enfant.

“Dieu est ma promesse”. Ils l’avaient pourtant pris au mot, ce nom. D’ailleurs, en hébreu, vous savez, si le nom ne nous correspond pas, eh bien on le change! (Ainsi vous connaissez Simon qui devient Pierre). Ils l’avaient pris au sérieux, ce Dieu. Ils avaient prié, avec ferveur, avec foi, avec espérance.

Mais voilà, les années ont passé, sans exaucement. Petit à petit, la ferveur a baissé, la foi est devenue habitude, et l’espérance s’est transformée en résignation.
 

 

Devenus vieux, trop vieux pour procréer, Zacharie et Elisabeth n’y croient plus. Bien entendu, a-t-on envie de dire! C’est normal. C’est compréhensible. Cette usure de la foi, de la prière, c’est celle de tant d’entre nous qui n’y croient plus assez, petit à petit, pour faire autre chose que se résigner.

Mais, voilà que la nouveauté de Dieu, son imagination, j’allais même dire son culot, dépassent tout ce qu’on attend. Un jour où Zacharie a été désigné par le sort pour entrer seul dans le coeur du temple de Jérusalem, le “lieu saint”, afin d’y brûler l’encens, voilà qu’un envoyé de Dieu se manifeste. On dit “un ange”, c’est la traduction exacte, en grec, de “missionnaire”, ou de “messager”.

À notre couple fatigué, cet envoyé promet un fils. Il annonce celui que nous connaissons sous le nom de Jean Baptiste, celui qui ouvre les chemins devant Jésus. Il s’appellera Jean, c’est-à-dire “Le Seigneur fait grâce”.

Or, chez les juifs, à l’époque, le premier fils porte par tradition le nom de son père. C’est la coutume. Lui donner un autre nom, c’est donc toujours annoncer qu’il échappera à sa destinée personnelle et familiale, à sa vie toute tracée. Il sera appelé à une autre trajectoire. Sa vie sera consacrée à Dieu, comme l’indique aussi le fait qu’il ne boira pas d’alcool.

De cette apparition, Zacharie va revenir muet. Aucun son ne sort plus de sa bouche.

Mais attention, contrairement à ce qu’une lecture rapide pourrait nous laisser croire, son mutisme n’est pas une punition parce qu’il aurait posé la question “Comment saurais-je que c’est vrai? Ma femme et moi nous sommes si vieux...”. Non, le silence de Zacharie est un signe de Dieu. La phrase de l’ange “Tu n’as pas cru”, elle ne concerne pas la question du vieux prêtre; car beaucoup de personnages bibliques font la même demande, et ils ne sont pas réprimandés. Pas du tout, “Tu n’as pas cru” concerne l’usure de la prière de Zacharie et Elisabeth, leur foi qui s’est mise à dévier; leur espérance qui a tourné en rond; tourné en résignation. Probablement qu’ils ne demandaient plus un enfant; peut-être même qu’en bons juifs, ils remerciaient Dieu d’être stériles, et ainsi plus disponibles aux autres, vous voyez...

Au contraire d’Abraham et Sarah, qui avaient tout fait pour forcer le destin en leur faveur, eux, Zacharie et Elisabeth ont perdu espoir. Et pourtant, ils devaient la connaître par coeur, cette histoire du Père des croyants, exaucé alors qu’avec sa femme Sarah ils étaient encore plus âgés qu’eux!

Alors, Dieu prend Zacharie au mot (si j’ose dire, puisqu’il devient muet!). Dieu prend Zacharie au mot: son mutisme nouveau, il est dans la logique de leur prière qui n’osait plus dire ce qu’ils voulaient, ce dont ils avaient tant rêvé. Ce mutisme va même devenir un signe de l’action de Dieu! De son culot! De sa puissance créatrice! Dieu va agir dans le silence. Dans le silence de Zacharie et dans le silence du ventre d’Elisabeth.

 


Vous vous en doutez, il y a bien des Zacharie et des Elisabeth aujourd’hui. Oh oui, vingt siècles plus tard, bien des prières sont fatiguées, bien des espérances sont usées. Les nôtres peut-être, individuelles, familiales; nos espérances de paroisses; d’Eglise. Et les prières du monde, pour la paix; la justice; la réconciliation; la sécurité pour tous. Est-ce que nous osons encore demander tout cela dans la prière? Et si oui, est-ce que nous osons encore y croire? Croire que c’est réalisable; que Dieu peut le faire; que Dieu veut le faire? La paix en Syrie, en Palestine, en Afrique?

Alors que Noël est proche, avons-nous encore le culot, l’audace, la folie d’espérer de toutes nos forces la paix et le salut du monde? Et de nous y engager avec la dernière énergie, parce que le dicton est vrai, qui dit “aide-toi et le Ciel t’aidera”? Dieu ne peut rien sans notre contribution! “Paix sur la terre aux hommes de bonne volonté” vont chanter les anges à Noël. Paroles cruelles: car justement, n’est-ce pas la bonne volonté qui manque surtout, ici-bas?

Zacharie, Elisabeth et Jean Baptiste nous sont donnés comme des signes. Comme des appels à y croire, à nous engager. Et toujours sur la même voie: “Son oeuvre sera de réconcilier et de ramener à la justice” dit l’ange au sujet de Jean Baptiste. De ramener à cette harmonie espérée par la Bible: le shalom, la paix; non seulement absence de guerres, mais aussi communion de foi, réconciliation avec Dieu et aussi avec les humains; vie heureuse; sécurité matérielle et spirituelle. En un mot: retrouver le cap, le chemin droit!

Et là, vous voyez, ce n’est pas seulement pour les chefs d’Etat, et les conférences pour la paix ou le climat! Chacun(e), nous sommes concernés!

Dans cet Avent encore, Zacharie, Elisabeth et Jean Baptiste pourraient-ils nous y engager? Amen.

Jean-Jacques Corbaz  








mercredi 16 décembre 2015

(Hu) T'es c...

 Anecdote réellement vécue. Dans ce village de la campagne vaudoise, un groupe de locatifs a changé la physionomie du paysage, mais aussi de la population.
 
Un jour, la dame au chapeau entend par sa fenêtre deux enfants du "bloc" qui jouent devant chez elle. Trois ou quatre ans maximum, les gamins.
 
- T'es con, dit la fillette au garçon.
- Ça veut dire quoi? demande l'autre.
- J'sais pas, c'est ma maman qui dit ça à mon papa...

 
 
                    Jean-Jacques Corbaz


(Hu) Ulysse et le cousin polonais

Anecdote réellement vécue. Ulysse, un gros paysan de la campagne vaudoise, vivait au début du siècle dans une ferme foraine accrochée à la pente, au bord d'une rivière.

Pendant la guerre de 14-18, un de ses lointains cousins, qui s'était expatrié en Pologne, avait dû rentrer en Suisse pour se protéger. N'ayant plus rien, il s'en était remis aux autorités vaudoises. Lesquelles, comme cela se faisait en ce temps-là, l'avaient placé dans sa plus proche famille, justement celle d'Ulysse.

C'est peu dire que ledit cousin était rudoyé. Pour "payer sa pension", on le faisait travailler 18 heures par jour à coups de pieds ou de trique. Faut dire qu'Ulysse était d'une pingrerie monumentale.

Or un jour, le gendarme de la petite ville voisine vient en inspection. Les mauvais traitements répétés s'étaient racontés de ci de là. Jusqu'à venir aux oreilles du préfet, qui avait demandé une enquête.

Ulysse, fin matois, verse à boire au pandore et répond avec sa petite voix douce à toutes les questions. "Mais vous m'imaginez, moi, frapper ce pauvre homme? Je suis membre du Conseil de paroisse, je n'ai rien à me reprocher. Cher Monsieur, ce sont des jaloux qui me calomnient."

Le gendarme se retire en s'excusant, l'oreille basse. Il repart sur son vélo. Mais, quelques centaines de mètres plus loin, il se rend compte qu'il a oublié son képi à la ferme.

Il retourne précipitamment chez notre paysan. Et à peine entré dans la cour, il entend Ulysse qui frappe son cousin avec son ceinturon. "C'est toi qui m'as dénoncé, hein, avoue!"

Jean-Jacques Corbaz






(Po) Lumières lémaniques

Il y a sur la côte française et sur le lac des lumières fantasques et parfois fantastiques, qui changent en quelques secondes. De la brume parfois illuminée comme de l'intérieur par un soleil discret. Et des trouées dans la couverture qui forment des taches toutes éclatantes qui se déplacent comme des nuages en négatif.

Jean-Jacques Corbaz

dimanche 13 décembre 2015

(Co) Elias, la chaleur donnée

Conte / saynète du 12 décembre, « Elias, la chaleur donnée » 

 Il était une fois un petit garçon qui s’appelait Elias. Sa maman voulait le baptiser "Elie", mais son papa préférait "Jonas". Alors, ils s’étaient décidé pour Elias.

Elias avait toujours froid. Froid sur sa peau, et froid dans son coeur. Il y avait tellement peu de soleil, dans son pays! Il faisait si souvent nuit! Et puis, les adultes n’avaient jamais le temps de s’occuper des enfants...

Alors, un jour, Elias décide de partir. Il se met à marcher, pour essayer de trouver ce qui pourrait le réchauffer.

Il marche longtemps, longtemps... Et voilà que la nuit s’épaissit encore, et le froid qui le mord...

Au ciel, Elias voit des étoiles. Mais, se dit-il, les étoiles!? Elles ont du feu, c’est ça qui les fait briller, dans le noir. Elles pourraient peut-être m’en donner??

- Ohé, les étoiles, crie Elias. Vous n’auriez pas du feu pour moi? J’ai si froid!

- Bien sûr, répondent les étoiles. Nous avons du feu, mais nous sommes si loin! Tu ne peux pas venir jusqu’à nous.

- Oh, dit Elias. Mais est-ce que vous pourriez m’envoyer un peu de chaleur? S’il vous plaît!

- Hélas, nous sommes trop loin, disent les étoiles. Tu ne recevras pas grand-chose. Mais nous voulons bien essayer. Couche-toi dans un creux de la terre, et nous allons t’envoyer le plus possible de lumière.

Elias se couche dans un creux du sol, et les étoiles tiennent parole. Le ciel se remplit d’une douce lumière, couleur d’espoir. Bien sûr, ça ne donne pas beaucoup de chaleur. Mais au moins, Elias se sent moins seul. Il a un peu moins froid à la peau, et un peu plus chaud au coeur. Il s’endort, apaisé. Comme bercé par une musique douce.




Quand il se réveille, les étoiles ont presque disparu. C’est le matin. Elias a toujours froid, mais froid...

Il faudrait faire du feu, se dit-il. Et là, il se souvient, son grand-papa lui a montré un jour comment allumer un feu avec deux pierres. Elias cherche des pierres à feu, comme son grand-papa lui a montré. Il finit par en trouver, et il les frotte l’une contre l’autre, au-dessus d’un petit tas de brindilles qu’il a rassemblées. Il frotte longtemps, il se fait mal aux doigts, ça ne marche pas...

- Pourtant, avec grand-papa, le feu s’allumait!

Il frotte encore, il a envie de pleurer. Et soudain, une étincelle, et une autre! Une petite flamme s’allume, et le petit tas se met à brûler. Vite, Elias ajoute un peu de bois sec, puis encore... Le feu grandit, il réchauffe l’enfant, mmmmhh, c’est bon!

Quand le soir arrive, Elias se couche à côté du foyer. Il s’endort, bercé par les braises, qui chantonnent les vieilles mélodies du début du monde.
 


Mais c’est la pluie, mêlée de neige, qui le réveille. Elias a froid. Le feu s’est éteint, le bois est tout mouillé. Il a beau recommencer à frotter les cailloux, il n’y a plus d’étincelle.

- Oh, j’ai trop froid, dit l’enfant. Et il recommence à marcher, pour trouver un endroit à l’abri du vent et de la pluie.

C’est ainsi qu’il découvre la caverne. Il entre. Il y fait presque bon. Et il y a là un gros tas de feuilles mortes qui font comme une couverture... Elias se glisse dessous...

Tout à coup, il entend un bruit. Il y a quelqu’un dans la caverne!

- Y... y a quelqu’un? crie le garçon, tout apeuré.

- Oui, y a quelqu’un, fait une grosse voix.

Elias écarquille les yeux. Devant lui, il voit un ours énorme, qui le regarde, sans méchanceté.

- As-tu du feu? demande l’enfant.

L’ours se gratte la tête, un peu ennuyé.

- Non, je n’ai pas de feu. Mais je veux bien te réchauffer. Viens!

Elias se lève. Il n’est pas très rassuré: l’ours est si gros! Mais un ours qui parle, ça ne peut pas être méchant.

L’ours prend le petit garçon tout contre lui. Il le serre doucement, et le berce, comme une maman. Et les petits ours font de même. Elias a tout plein de poils des ours dans le nez et les oreilles, mais il sent une bonne chaleur qui lui vient. Il découvre qu’il n’a jamais eu aussi chaud, sur la peau et dans son coeur.

- Tu pourras rester quelques jours, dit le gros ours. Mais après, il faudra que tu partes.

- Mais pourquoi? demande Elias. Je suis si bien, avec vous!

- Ce n’est pas possible, dit le gros poilu. Tu es un enfant d’homme, et nous, nous sommes des ours. Mais je connais quelqu’un qui pourra te donner du feu, c’est le potier. Je te montrerai le chemin. Maintenant, repose-toi, nous allons te donner le plus possible de chaleur.

Le garçon se laisse faire. À travers la poitrine de l’ours, il entend battre le coeur de son nouvel ami. Ça fait comme un son de contrebasse.
 


Trois jours après, Elias s’en va, triste de quitter la famille des ours: c’est si bon, avec eux! Mais il n’a pas le choix.

Il arrive chez le potier, qui est en train de fabriquer un immense pot, une espèce de cruche.

- Tu viens chercher la cruche à feu? demande l’homme. Regarde: il y a des trous pour que les flammes puissent respirer. Tu ajouteras du bois quand les braises deviendront toutes petites. Ainsi, tu pourras faire du feu partout, et la pluie ne l’éteindra pas.

L’enfant attend, impatiemment, que la cruche soit prête. C’est long! Mais finalement, le potier la lui donne.

- Tu peux la prendre, elle est finie. Je te donne aussi des braises, et du bois. Au revoir, Elias!




Le garçon s’en va, emportant, délicatement, son précieux trésor. Il est heureux, même s’il sent encore un peu le froid. Surtout que cette nuit-là est encore plus glaciale que les autres. Brrrr!

C’est une toute petite lumière qui le guide vers une maison, ou plutôt vers une sorte d’abri pour les vaches ou les moutons. Il entre. Il lui semble que tous les courants d’air de la terre se sont donné rendez-vous dans cette étable.

Il y a là un homme et une femme, penchés sur un tas de paille. Et, sur la paille, à côté d’un mouton, il y a... un tout petit bébé.

- S’il te plaît, dit l’homme, ferme la porte. Il fait si froid!

- Vous avez froid? demande Elias.

- Oh oui, répond l’homme, terriblement froid. Surtout notre enfant. Nous ne savons plus que faire pour le réchauffer.

Elias est très étonné.

- Mais vous n’êtes pas allés à l’hôtel?

- À l’hôtel? Ils n’ont pas voulu de nous. Et tout est plein.

Le garçon reste longtemps silencieux. ...

Il regarde l’homme, et la femme. Et le bébé.

Puis il se décide.

- Ecoutez... j’ai peut-être une idée. Je vous prête ma cruche à feu. Et puis...

- Et puis? dit la femme.

- Eh bien, je pourrais prendre le petit dans mes bras pour le réchauffer. Comme l’ours m’a montré. Si vous êtes d’accord?

- Oh merci, dit la femme. Tu sauras très bien faire cela, j’en suis sûre.

Elias prend le bébé dans ses bras, doucement, tout contre lui. Il le serre avec précautions. Il le réchauffe. Et tout à coup, mais? Il ne comprend pas ce qui lui arrive. Il sent que son coeur devient chaud, mais chaud... Il y a en lui comme un feu merveilleux, et ça vient de ce petit enfant qu’il tient dans ses bras! Ça vient de la chaleur qu’il a donnée, lui, Elias.

Il se sent tout heureux, comme il ne l’a jamais été. Il se met à chanter, comme un ange... Et on raconte que plus jamais il n’a eu froid, ni sur la peau, ni dans son coeur.



Joël Allaz et Jean-Jacques Corbaz













(Co) Noël finlandais

Conte du 12 décembre, « Noël finlandais »

L’histoire se passe il y a longtemps, c’était pendant la guerre entre la Russie et la Finlande. En ce temps-là, il n’y avait pas de téléphone mobile, ni d’internet; pas de GPS ni de google'maps!

Il neige. Il fait froid. La nuit est noire. Les soldats russes ont établi leur campement au bout de la grande route, là où le monde des humains fait place aux régions sauvages des lacs, des marais et des forêts. Là où partent d’obscurs chemins qui mènent on ne sait où.

- Holà, dit le chef, un gros homme au regard dur, j’aimerais bien savoir pourquoi cette patrouille ne revient pas. Holà, ce village finlandais ne doit pas être bien loin, pourtant. Si nous ne le trouvons pas, nous risquons de nous perdre dans cette région de lacs et de forêts touffues, et de nous embourber dans ces marais piégeux.

Par trois fois, le chef crie “Holà!”, mais son cri se perd dans la nuit, sans réponse. 





Les trois soldats russes sont à cheval. Ils avancent péniblement sur ce terrain qu’ils connaissent mal.

- Il y a une lueur là-bas, dit l’un.

- C’est le village, dit l’autre, soulagé.

- Oui, c’est Petröni, fait le troisième. Enfin! Allons-y!

Et la patrouille, tout heureuse d’avoir découvert le village après tant de recherches dans la nuit glacée, reprend courage. Ils font trotter leurs chevaux.



Petröni est un petit village finlandais situé entre la grande forêt et la région des lacs, loin de tout, perdu dans la nuit nordique. Les hommes sont sur le front. Une lourde menace pèse sur la population, car les Russes ne sont pas très loin. S’ils viennent ici, vont-ils nous massacrer? Brûler nos maisons?

Ce soir du 24 décembre, l’inquiétude est particulièrement grande, car l’ennemi s’est rapproché. On a donc renoncé à dresser un sapin illuminé, on a voilé toutes les lumières. Et la joie de Noël, elle aussi est voilée.

Mais, dans une vieille grange, quelques enfants se sont rassemblés sans rien dire aux adultes. Ils avaient tellement envie de fêter Noël! Alors, ils ont essayé de reconstituer une nativité. Sur un peu de paille, ils ont déposé une vieille poupée de chiffon pour représenter le bébé Jésus. Ils ont allumé des bougies tout autour. Ils chantent, des chants de Noël... Et puis, ils se mettent à prier.

- Seigneur, dit l’un, toi qui es venu sauver le monde, délivre notre village de la guerre! Sauve-nous de la mort.

- Garde nos familles, dit un autre.

Et pendant qu’ils prient, tout à coup la porte s’ouvre. Voilà trois hommes qui entrent, trois soldats russes à barbe épaisse, dont l’uniforme est recouvert de fourrures. En les voyant, les enfants, tout à leur célébration de Noël, ne réalisent pas qui ils sont. Un petit garçon s’écrie:

- Les rois mages!


Il va à la rencontre des trois visiteurs. Il leur tend la main, et les conduit jusqu’à la crèche. On les fait asseoir, on place devant chacun d’eux une bougie. Et les enfants se mettent à chanter: “Voici Noël, ô douce nuit, l’étoile est là, qui nous conduit. Allons donc tous avec les mages porter à Jésus nos hommages. Car l’enfant nous est né, le Fils nous est donné”...

Les “rois mages” sont tout étonnés et un peu attendris par cet accueil. Ils se souviennent que, quand ils étaient petits, eux aussi chantaient ce cantique devant une crèche de fortune pareille à celle-ci. Et c’est toute leur enfance heureuse qui leur revient en mémoire. Eux aussi avaient prié, et demandé la paix...

Au fond de leur coeur chante une voix qu’ils avaient oubliée. C’est la voix de l’espérance, fraîche comme la source qui jaillit en été au pied des bouleaux.

Ces trois soldats à la barbe rêche, qu’on a pris pour les rois mages, se sentent tout remués. Une larme vient même couler sur leur joue, quand un enfant récite le chant des anges: “Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté”.

Le garçon qui les a accueillis profite d’un silence pour leur demander:

- Où sont les cadeaux que vous apportez à Jésus?

- Eh bien, dit l’un des hommes, nous lui apportons la délivrance de ce village. Les Russes ne le brûleront pas, ils passeront loin d’ici, sans se douter de votre existence.

- Nous apportons aussi, dit le second, trois fusils que nous déposons au pied de la crèche. Ils ne serviront plus à tuer.

- Et surtout, dit le troisième, nous apportons le coeur de trois hommes qui ont pu renaître à l’humanité et à l’espoir, auprès de Dieu.

Puis ces “rois mages” cachent soigneusement leur uniforme sous leur grosses pelisses, et ils sortent en silence. On ne les a jamais revus, ni au campement de l’armée russe, ni au village de Petröni. 



 

Au milieu de la nuit, comme la patrouille ne rentre toujours pas,  dans le bivouac au bout de la grande route, là où le monde des humains fait place aux régions sauvages des lacs, des marais et des forêts, les Russes perdent patience.

- Holà, crie le chef à ses hommes, la patrouille n’est pas revenue. Ils ont dû s’embourber dans ces marais dangereux, ou être dévorés par les loups. Petröni est dans une tout autre direction. Revenons en arrière, nous ne les trouverons pas ici.

C’est ainsi qu’une nuit de Noël, un village finlandais a été miraculeusement épargné; grâce à trois rois mages, et aux enfants du village.                                         


Armand Fonjallaz et Jean-Jacques Corbaz 



vendredi 11 décembre 2015

(Ci) Trop de réfugié(e)s et...

"Il y a trop de réfugié(e)s, disent les êtres humains. Il y a trop peu d'êtres humains, disent les réfugié(e)s" . 

Ernst Ferstl 

jeudi 10 décembre 2015

(Bi, Hu) Mon anniversaire approche




Comme vous le savez tous, la date de mon anniversaire approche. Tous les ans, il y a une grande célébration en mon honneur et je pense que cette année encore cette célébration aura lieu.


Pendant cette période, tout le monde fait du shopping, achète des cadeaux, il y a plein de publicité à la radio et dans les magasins, et tout cela augmente au fur et à mesure que mon anniversaire se rapproche.


C'est vraiment bien de savoir, qu'au moins une fois par an, certaines personnes pensent à moi. Pourtant je remarque que si au début les gens paraissaient comprendre et semblaient reconnaissants de tout ce que j'ai fait pour eux, plus le temps passe, et moins ils semblent se rappeler la raison de cette célébration. Les familles et les amis se rassemblent pour s'amuser, mais ils ne connaissent pas toujours le sens de la fête.

Je me souviens que l'année dernière il y avait un grand banquet en mon honneur.  La table de salle à manger était remplie de mets délicieux, de gâteaux, de fruits et de chocolats. La décoration était superbe et il y avait beaucoup de magnifiques cadeaux emballés de manière très spéciale.

Mais vous savez quoi? Je n'étais pas invité...  J'étais en théorie l'invité d'honneur, mais personne ne s'est rappelé de moi et ils ne m'ont pas envoyé d'invitation. La fête était en mon honneur, mais quand ce grand jour est arrivé, on m'a laissé dehors, et ils m'ont fermé la porte à la figure... et pourtant moi je voulais être avec eux et partager leur table.


En réalité, je n'étais pas surpris de cela car depuis quelques années, toutes les portes se referment devant moi.


Comme je n'étais pas invité, j'ai décidé de me joindre à la fête sans faire de bruit, sans me faire remarquer.  Je me suis mis dans un coin, et j'ai observé.  Tout le monde buvait, certains étaient ivres, ils faisaient des farces, riaient à propos de tout.  Ils passaient un bon moment. Pour couronner le tout, ce gros bonhomme à la barbe blanche est arrive, vêtu d'une longue robe rouge, et il riait sans arrêt : 'ho ho ho!' Il s'est assis sur le sofa et tous les enfants ont couru autour de lui, criant 'Père Noël ! Père Noël!', comme si la fête était en son honneur!


A minuit, tout le monde a commencé à s'embrasser; j'ai ouvert mes bras et j'ai attendu que quelqu'un vienne me serrer dans ses bras et... vous savez quoi... personne n'est venu à moi.


Soudain ils se sont tous mis à s'échanger des cadeaux. Ils les ont ouverts un par un, en grande excitation.  Quand tout a été déballé, j''ai regardé pour voir si, peut-être, un cadeau était resté pour moi.  Qu'auriez vous ressenti si, le jour de votre anniversaire, tout le monde s'échangeait des cadeaux et que vous n'en receviez aucun ?  J'ai enfin compris que je n'étais pas désiré à cette soirée et je suis parti silencieusement.


Tous les ans ça empire. Les gens se rappellent seulement ce qu'ils boivent et mangent, les cadeaux qu'ils ont reçus, et plus personne ne pense a moi.  J'aurais voulu pour la fête de Noël cette année, que vous me laissiez rentrer dans votre vie.  J'aurai souhaité que vous vous rappeliez qu'il y a plus de 2000 ans de cela, je suis venu au monde dans le but de donner ma vie pour vous, et en définitive pour vous sauver.


Aujourd'hui je souhaite seulement que vous croyiez à cela de tout votre cœur.  Comme nombreux sont ceux qui ne m'ont pas invité à leur fête l'an passé,  je vais cette fois organiser ma propre fête et j'espère que vous serez nombreux à me rejoindre.


En guise de réponse positive à mon invitation, envoyez ce message au plus grand nombre de personnes que vous connaissez.


Je vous en serai éternellement reconnaissant.


Je vous aime !
 


Jésus




dimanche 6 décembre 2015

(Pr) St-Nicolas, c’est toi! - Prédication du 6 décembre 2015

Prédication du 6 décembre, « St-Nicolas, c’est toi! » 

Lectures:  Matthieu 25, 31-40; 1 Jean 4, 7-12; 1 Jean 3, 18


On raconte à Toto, 7 ans, l’histoire de saint Martin, qui a partagé son manteau avec un pauvre. Le gamin s’écrie: “Mais c’était pas une bonne idée! Passqu’ils n’avaient plus qu’une manche chacun! Ça leur faisait une belle jambe!”

Bon, je précise pour tous les Toto d’aujourd’hui: le manteau de saint Martin, celui des soldats romains, était en fait une cape. Un tissu rectangulaire. Donc le partager en deux était tout à fait plausible. Saint Martin et le SDF auraient tous les deux un peu chaud, même si c’était nettement moins confortable qu’avec un manteau entier.



Saint Nicolas, que nous fêtons aujourd’hui, a montré dit-on une générosité plus grande encore. La légende raconte qu’il lançait, dans la cheminée des pauvres de sa ville, des bourses pleines de pièces d’or. Jawohl, c’est probablement cela qui est à l’origine du Père Noël qui amène des cadeaux dans les cheminées. D’ailleurs, dans bien des pays, comme aux USA, “Père Noël” se dit Santa Claus, soit Saint Nicolas.

Saint Martin, “Bon Enfant”, Père Chalande; “ChristKind”, Bonhomme Noël; sinter Klaas; Père Noël... en Serbie, c’est aussi Sveti Nikola... Tous ces noms sont des visages de la générosité demandée par Jésus à ses fidèles. Générosité surtout pour les plus pauvres: “Chaque fois que vous avez fait du bien à l’un des plus petits, qui sont mes frères, c’est à moi, dit Jésus, que vous l’avez fait”.

Partager. Cela me prive, mais ça permet à quelqu’un d’autre de survivre. Et c’est l’occasion de dire un “merci” grand comme une cathédrale à tous les saint Nicolas d’aujourd’hui - j’en vois bon nombre devant moi ce matin - les saint Nicolas d’aujourd’hui qui partagent leur argent, leur nourriture; leur temps, aussi; leur savoir; leur toit, leur espérance, leur joie; leur foi...

Et voici qu’apparaît une dimension nouvelle: il y a des choses qui, quand on les partage, ne diminuent pas! Il y en a même qui augmentent quand on les partage! Pensez à la fête! Au plaisir; à l’amitié; à l’espoir!

Je dirai même plus (comme les Dupondt): quand on partage ses habits ou son argent, il y a quelque chose qui augmente, en soi, quelque chose de l’ordre de l’amour, comme un trésor spirituel.

Voilà pourquoi sans doute tous les saint Nicolas aiment partager: s’ils se privent d’une partie de leur manteau, ou de leurs biens; pourtant, du même coup, ils s’enrichissent en relations humaines; en joie; en fraternité... Toutes ces valeurs non sonnantes et non trébuchantes, mais qui résonnent et qui affermissent, au fond des coeurs!

Il est regrettable, voire révoltant, que tant de générations aient parlé du partage en termes moralisants: tu dois donner, c’est la loi religieuse, c’est le devoir. Mais non! Cette conception annule le plaisir, la fierté, la solidarité. Elle n’est qu’une caricature, un partage décharné. L’entraide, la vraie, elle nous enrichit!

Quand j’étais catéchumène, notre pasteur nous avait emmenés à mi-décembre rendre visite à des personnes âgées et isolées de la paroisse. Nous leur apportions un petit cadeau, une branche de sapin que nous avions garnie; nous leur chantions un cantique de Noël. Et ces gens chez qui nous allions, ils nous ont accueillis avec une telle reconnaissance, une si grande chaleur! Je m’en souviens encore, comme d’un trésor!


 

Malheureusement, le partage est aujourd’hui moins facile, vous le savez. À cause d’une évolution générale de notre manière de vivre. Nous sommes moins reliés entre nous (pensez aux familles larges d’il y a 80 ans). Nous nous sentons de plus en plus seuls, et donc fragiles, et menacés... Notre époque prône la réussite matérielle, jusqu’à en oublier les autres valeurs... Trop souvent, nous avons peur de partager; ce qui bien sûr alimente le cercle vicieux de la solitude et de la vulnérabilité; de la méfiance aussi. Hélas.

Pour sortir notre siècle de cette glissade qui conduit à la mort, il est heureux que nous rencontrions, aujourd’hui, des saint Nicolas. Je veux dire: des hommes, des femmes et des enfants qui partagent par plaisir! Et qui en vivent! Et chez qui ça se voit!

Oui, notre monde a besoin de nous comme contrepoison à l’égoïsme ambiant; à l’isolement; à l’éclatement social. Il est vital, il est urgent que se lèvent, aujourd’hui, des saint Nicolas qui empoignent à bras-le-corps la question essentielle de la distribution des biens matériels. Du partage des ressources. Des relations équitables entre les humains. Pas seulement pour en parler, mais pour le vivre. Devenir nous-mêmes des ferments de communion, des signes d’espérance!

Vous l’avez compris, notre “saint Nicolattitude” ce matin prend notamment le visage de ces habits et de ces souliers que nous partageons avec les requérants des Rochats. Comme saint Martin, merci d’offrir un peu de votre manteau à ces hommes, qui arrivent frigorifiés!

Mais notre partage se veut beaucoup plus large, aussi. Merci d’accueillir la baptisée de ce matin, Sofia, comme une image du Christ, puisqu’elle est “l’un des plus petits, qui sont mes frères, comme dit Jésus!

Merci également de partager vos prières. Les papiers que vous avez reçus à l’entrée de ce culte vous permettent d’inscrire une demande, ou un “merci”, ou un espoir; ou une plainte. Tout ce que vous avez envie de partager, avec Dieu ou avec nous, communauté du Christ rassemblée en son nom.

En venant communier, tout à l’heure, vous pourrez soit lire votre prière vous-même; soit déposer votre billet sur la table de communion, et il sera lu par un officiant; soit garder uniquement pour vous votre billet avec votre prière.

C’est après la communion, juste avant le Notre Père que ces prières seront lues. Vous pourrez aussi, si vous le désirez, dire une prière non écrite.



 

“Partage ton pain: il diminue. Partage ta joie: elle augmente.”  



Saint-Nicolas, mais c’est toi! Amen                                          


Jean-Jacques Corbaz  



vendredi 4 décembre 2015

(An) Une soupe à Yverdon, ça vous dit?

Soupes d'ici et d'ailleurs
Le service communautaire Solidarité du Nord vaudois sert la soupe, en compagnie de nombreuses autres associations caritatives. Sympa!
Du 1er au 24 décembre, place de la gare, Yverdon, de 16h à 20h. Gratuit.
Voir https://www.facebook.com/pages/Soupes-dici-et-dailleurs/1505982416318582?notif_t=fbpage_fan_invite
 
 
Et aussi
Une idée : passer un petit moment au stand des Eglises chrétiennes régionales lors de la soirée de nocturnes du 18 décembre au centre-ville d’Yverdon, près du Temple Pestalozzi), lieu d’accueil gratuit pour s’arrêter boire un thé, manger un biscuit, se rencontrer au cœur de la cohue des derniers préparatifs. 

Merci d’en parler autour de vous!

dimanche 29 novembre 2015

(Co, Pr) L’attente de Delphine et Barbara

Message du 28 novembre 2015

Lecture:  Luc 3, 1-6


Il était une fois deux jeunes filles. Et, comme dans tous les contes, ces deux jeunes filles n’avaient qu’un seul rêve: elles attendaient le Prince charmant! L’une s’appelait Delphine, et l’autre Barbara.

Or, un jour, elles reçoivent un message: “Tenez-vous prêtes, leur est-il dit, ce soir le Prince vous invite à une fête. Il viendra vous chercher.”

- Oh, dit Delphine, c’est merveilleux! Le Prince m’invite, peut-être qu’il me trouve belle, qu’il m’aime!

- Oui, fait Barbara. Mais quand va--t-il venir? Il aurait pu le préciser. Et que vais-je faire, en attendant?

Les deux soeurs s’habillent. Delphine, de la joie plein le coeur, allume du feu dans la cheminée. Il fait bon.

Pendant ce temps, Barbara s’inquiète: ma coiffure ne va pas, zut, je recommence. Puis c’est sa robe, qu’elle veut changer.

Delphine, près du feu, voit tout à coup une araignée. D’habitude, elle en a peur. Mais aujourd’hui, toute à la promesse de la fête, elle la regarde autrement. “Mais c’est joli, une araignée! Elle a plein de reflets de toutes les couleurs, comme les flammes dans la cheminée”...

Soudain, un grand brouhaha vient du dehors: une troupe joyeuse de jeunes passe tout près. Delphine sort. “Ohé, leur crie-t-elle, venez chez nous, il y a du feu, il fait bon!”. Les jeunes entrent. “Barbara, tu viens?”.

- Non, répond la soeur, je dois rester à la fenêtre, pour guetter le Prince, quand il arrive.

Delphine, avec ses nouveaux amis, s’amuse et danse toute la nuit. Et, au matin, elle reconnaît, juste à côté d’elle... le Prince, qui a enlevé son déguisement. Il a fêté toute la nuit, avec elle!

Pendant ce temps, Barbara, triste, déçue, s’est endormie à sa fenêtre. Pour elle, le Prince n’est pas venu. 


 

J’aime ce conte, qui nous parle de vivre, et d’espérer. De vivre ce qu’on espère. Ce que nos espoirs peuvent changer dans nos vies!

Car ce que nous attendons (que ce soit l’Amour, ou la Paix, ou la réussite, peu importe), ce que nous attendons, nous pouvons, comme Delphine, commencer à le dessiner. Nous pouvons l’anticiper. Elle allume du feu, elle regarde l’araignée avec joie, elle invite les jeunes. La promesse du Prince la met en route; et cela changera sa vie!

Barbara, au contraire, attend de manière négative. Irritée par le flou de l’annonce, elle finira par passer à côté de la fête.

Cette histoire est en fait une fable, à plusieurs niveaux: on peut l’entendre comme une parabole sur l’amour, le grand Amour, et la façon de l’attendre.

On peut lire aussi, derrière la venue du Prince, par exemple nos relations avec les autres; la Paix mondiale; ou le règne de la justice.

On peut enfin comprendre cette venue du Prince comme la venue du Christ, son retour parmi nous, son règne. Oui, je crois que le pouvoir de Dieu sur nous est exactement celui du Prince charmant sur Delphine et Barbara: une promesse, un amour donné, une espérance semée dans nos coeurs. C’est là sa seule puissance.

Et ce message peut prendre vie en nous, comme chez Delphine. Il peut nous faire créer de grandes choses, des fêtes joyeuses, des réconciliations... des amours, des Grands Amours! Il peut encore nous mettre en marche pour bâtir, dans notre maison, sur cette terre, plus de justice et de paix...

- Comme il peut, hélas, rester lettre morte, à l’image de Barbara, et nous laisser à la fenêtre, amers, frustrés: nous n’aurons rien reçu. Pour nous, il ne se sera rien passé.

C’est cela, préparer les chemins du Seigneur, en nous, cette transformation intérieure à l’image de Delphine. C’est à cela que Jean Baptiste nous appelle, aujourd’hui comme il y a 2000 ans. En allumant les quatre bougies de nos couronnes, puissions-nous, dans cet Avent, faire grandir dans nos coeurs les qualités dont nous avons parlé, lors de notre atelier: la foi, l’espérance, l’amour et la paix. Puissions-nous tous recevoir ce trésor extraordinaire, et le laisser tout changer dans notre vie! Amen    

         

Jean-Jacques Corbaz 


mercredi 25 novembre 2015

(Ci) La face cachée des ombres

"Chaque nuage, si noir soit-il, a toujours une face ensoleillée, tournée vers le ciel!"

(auteur inconnu)
 




lundi 23 novembre 2015

(An) Suppression des magazines religieux à la radio et à la TV

Bonjour,
Vous avez probablement entendu parler de la suppression des magazines religieux à la radio et à la TV.
Une pétition en ligne peut être signée par qui le désire. Vous la trouverez à l'url: http://soutenonsrtsreligion.info/

Comité de soutien

Jacques-Simon Eggly, Ancien Conseiller national, PLR
Philippe Gonzalez, Sociologue, UNIL
Alexandre Jollien, Ecrivain, philosophe
Liliane Maury Pasquier, Conseillère aux Etats, PS
Ada Marra, Conseillère nationale, PS
Jean-François Mayer, Historien des religions
Philippe Roch, Ancien directeur de l'Office fédéral de l'environnement
Claude Ruey, Ancien Conseiller d'Etat, Ancien Conseiller national, PLR
Bien amicalement

jeudi 19 novembre 2015

(Bi) Lettre ouverte à la RTS


Chère RTS,

L'actualité ne cesse de nous secouer. Les attentats de Paris du 13 novembre 2015, même s'ils sont plus médiatisés que d'autres dans le monde, touchent les Suisses avec une force sans précédent. A la télévision, un intervenant a même utilisé l'expression de "11 septembre européen". Oui c'est un séisme, un tournant pour l'Europe qui prend conscience que le terrorisme islamiste peut frapper aveuglément n'importe où, n'importe quand. Et devant notre porte.

Et toi, pendant ce temps, que fais-tu ? Tu médiatises l'événement, tu donnes la paroles aux personnes touchées, dans l'émotionnel notamment, mais pas seulement. Tu expliques aussi les racines géopolitiques de ces actes. Tu instruis. Tu joues ton rôle de télévision publique qui se doit non seulement de relayer l'information, mais aussi d'expliquer pédagogiquement.

Mais soudain, nouveau séisme: je viens d'apprendre que tu as décidé de supprimer tes émissions
religieuses, les magazines de fond. Et je dois te dire que je ne comprends pas. Comment peux-tu, dans ces temps troubles et troublés où la société devient de plus en plus a-religieuse, devenant de plus en plus étrangère à la religion, comment peux-tu faire cela ? Ne te rends-tu pas compte du danger sous-jacent d'une telle décision ?

Dans le communiqué de protestinfo, il est écrit ceci concernant les négociations en 2013. Tu te souviens, c'était seulement il y a deux ans...
Lors de la précédente négociation de la convention la direction de la chaîne se réjouissait de l’engagement des Eglises qui participaient à la «générosité de l’offre», selon le directeur des programmes, Gilles Pache, interrogé par Le Courrier en 2013. Il déclarait alors que les émissions religieuses «assument un rôle pédagogique indispensable». Et il ajoutait: «dans notre société en évolution elles peuvent contribuer à éviter des dérives islamophobes, par exemple.»
Mais que t'arrive-t-il ? Es-tu soudain prête à ne plus prendre en considération ce danger ? qui va prendre le relais de tes émissions "pédagogiques" pour éviter que l'on tombe dans l'amalgame et le fanatisme (anti-)religieux? Qui ? Dis-le moi. Je n'ai pas envie que ma Suisse tombe elle aussi si bas, et pour cela, nous avons besoin d'un service publique qui joue son rôle pédagogique. Un service public qui instruise, aussi et d'abord au sujet de la religion. C'est le dernier lien qui permet aux personnes éloignées de comprendre un peu ce qui se passe et d'éviter de basculer dans le règne de l'intégrisme et de la peur: la peur du religieux, la peur de l'autre, la peur de ce que l'on ne comprend pas. Et la radicalisation qui va avec. Car c'est bien cela un des buts de l'instruction: éviter les fanatismes.
http://www.rts.ch/religion/6335206-le-nouveau-portail-rtsreligion.html
Je peux bien entendre que tu as des difficultés financières. Mais comme le disait un ami, "supprimer le remarquable travail de l'équipe de RTSReligion, c'est bafouer à la fois une équipe qui tisse des ponts entre religions, montre la nécessaire tolérance entre elles, et à la fois bafouer le public au moment d'une soif spirituelle manifeste et d'un besoin évident de décoder le fait religieux qui emplit l'actualité." Tu ne peux pas nous laisser tomber, nous avons besoin de toi. Oui je suis dans l'émotionnel face aux froids calculs, car notre société n'est pas faite que de billets de banques, mais aussi de valeurs qui nous chères: ouverture, tolérance, compréhension de l'autre.

Chère RTS, je t'écris cette lettre ouverte en tant que pasteur, mais aussi en tant que citoyen suisse inquiet pour son pays. Le temps n'est pas aux coupes financières, l'actualité nous montre assez bien que nous avons besoin de toi et de ton décodeur des religions. Et ce n'est pas une question de laïcité, crois-moi, ni une question d'audience, mais bien une question de santé publique.

Je te demande donc, pour la santé de notre pays, de revenir sur ta décision dont les conséquences pourraient à terme être graves pour notre société Suisse.

Avec mes salutations fraternelles,

Benjamin Corbaz,
Pasteur