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dimanche 27 août 2017

(Co, Pr, Vu) Vive, l’eau! (narration)

Lectures bibliques: Jean 4, 1-26, Ezechiel 36, 24-27

Il faisait chaud, ce matin-là. Chaud et sec. Mais l’oasis était fraîche, comme une porte ouverte sur le ciel. L’eau du puits murmurait sa fragile musique, si ténue qu’il faut être vieux et sourd comme moi pour l’entendre... Je crois même que, parfois, des oiseaux chantaient. Ça sentait les feuilles de figuier et l’été.

J’étais venu au puits de Jacob pour boire, mais surtout pour méditer et rêver tranquille, loin du village. J’aime le calme de cet endroit, sa douceur apaisante. Il m’arrive même de me dire que Dieu y est plus proche que dans l’agitation des sacrifices... Savez-vous que ce puits de Jacob est le tout premier lieu de culte de nos ancêtres d’Israël, sur la Terre Promise? Bien avant Jérusalem! Oui, c’est un endroit chargé de présence divine!

Bref, je me sentais superbien, couché derrière les buissons, près de Dieu. L’herbe était douce contre ma peau... J’avais envie de prier: “Seigneur, je voudrais pouvoir mourir ainsi, calmement; doucement; te rendre mon dernier souffle sans hâte, comme la rosée s’évapore au soleil du matin...”
  


Mais! Des voix! Tout-à-coup, des voix, des voy...ageurs! Mon calme et ma prière s’envolent! Pas de chance, j’étais si bien!

Caché derrière mon figuier, j’observe les nouveaux-venus. Qui sont-ils? Commerçants? Pèlerins? Brigands peut-être? Rien que des hommes, en tout cas. Méfiance!

Ils puisent l’eau à l’aide d’une vieille peau de chèvre que le plus petit porte en bandoulière. Ils ont soif, on voit qu’ils ont beaucoup marché! Vivement qu’ils reprennent leur route!

Tout en buvant, ils parlent assez fort. Je comprends à leurs allusions qu’ils sont... juifs!?! Oups!! Heureusement que je ne leur ai pas adressé la parole! On nous a toujours expliqué que nous, les Samaritains, ne devons rien avoir à faire avec ces gens de Judée, qui nous méprisent et qui nous traitent comme des primitifs. Alors que nous sommes descendants d’Israël, autant qu’eux!

Tout ça parce qu’il y a longtemps, au retour de l’Exil à Babylone, nous n’avons pas chassé les Palestiniens, qui occupaient nos terres. Nous nous sommes pacifiquement mélangés avec eux. Dites, Dieu n’était-il pas content de voir des hommes se réconcilier?

Alors voilà: depuis cette époque, les Samaritains n’ont plus de contacts avec les juifs (hem, sauf pour les détrousser, rigole mon cousin Kouchtar de Sychar!!)... Brèfle, ceux-là... je reste à distance.

Ils n’ont pourtant pas l’air si menaçants, ces gaillards. Peut-être un peu... illuminés. Je les entends discuter de l’eau, qui est un signe, qu’ils disent, un signe de Dieu. Et puis ils parlent de souffle, de respiration du Seigneur (je ne comprends pas bien), toujours en se montrant la source, vive, qui murmure sa chanson si frêle à mes oreilles.
  


Bon, voilà qu’ils s’en vont. Non? tiens, y en a un qui est resté. T’égal, dans le fond; tout seul, il ne va pas m’empêcher de jouir du calme de ce puits... 

 
Ah mais zut! Pas de chance! À peine j’ai repris mes rêveries qu’un nouveau pas se fait entendre. Mais cette oasis est plus fréquentée que la couche d’une courtisane un soir de bamboula!!

Oh ben, à propos de courtisane, devinez qui arrive: c’est la femme de Shefdegar de Sychar! Vous savez, celle qui ne sait pas dire non aux hommes... Celle dont ils profitent sans aucune gêne.

Elle s’avance pour puiser de l’eau... Mais? Le juif... lui parle?! Non, mais quel culot! Encore un bélier en rut! Aussi dragueur que son ancêtre David, celui-là!

Ah non, faites excuse, c’était pas ce que j’avais pensé. Ou alors, il tourne longtemps autour de la cruche, ce gars! Il demande de l’eau. De l’eau? Alors qu’il vient de boire?

Et elle? Mmmhh, elle hésite. Elle commence à piger que c’est un type de Judée. Ils parlent d’eau, le juif et Emmanuelle. Il recommence, comme tout à l’heure son histoire d’eau: le souffle, l’esprit divin...

Evidemment, elle, elle ne comprend pas qu’il s’agit de religion. Elle prend tout au premier degré, au début. Il doit expliquer, expliquer encore. Et moi, du coup, je commence à y voir un peu plus clair. Il dit: l’eau est un don du ciel, c’est un signe que Dieu nous purifie et nous aime; un signe que Dieu nous lave, pour nous permettre de commencer, à neuf, une vie différente, meilleure! Voilà: c’est le souffle, c’est la vie que Dieu veut mettre en nous, pour transformer le monde!
  


Emmanuelle, bien sûr, elle ne suit pas bien. Tiens, il parle des cinq maris, maintenant. Et elle, plein gaz, elle croit qu’il fait allusion à sa vie de tralala, tous ses jules, ses “fiancés”...

Encore une fois, méprise, méprise! Si elle n’était pas aussi... euh... “culpabilisée”, elle saisirait que, quand un juif parle des cinq maris, il pense aux cinq dieux qu’on adorait en Samarie! Ouais, cinq maris - Samarie, c’est un vieux gag pourri de Galilée (d’accord, c’est pas terrible, mais San Antonio n’est pas encore né!).

Ah, cette fois, elle a compris! Elle pose des questions sur le culte, sur “croire en Dieu”. Il explique encore. Oh, c’est difficile. Je ne suis plus très bien, moi non plus.

Mais quand il dit qu’on peut adorer Dieu partout, ça, je saisis! Et que l’oasis est une porte ouverte sur le ciel, ça, ça m’emballe!

L’eau, signe du ciel... Non, attends: l’eau, signe d’un souffle que Dieu nous donne. Signe d’un souffle que Dieu nous donne si nous lui donnons notre premier pas... Et ce souffle, il nous transforme; il nous permet de vivre, vraiment; pleinement, intensément!

Et: partout, même ici!

Mmh, il y a quelque chose, là, que je dois creuser. Il faudrait que j’aille vers ce juif pour lui demander de me réexpliquer.

Tiens, c’est drôle!? J’ai encore envie de vivre, soudain, pour découvrir tout ça; pour changer ma vie.

 



Il fait superbe, ce jour-là. L’oasis est fraîche à danser! L’eau du puits de Jacob fredonne sa petite chanson... et: c’est comme une porte ouverte sur le ciel!

Mmm, mmm mmm, mmm mmm mmm mmm (fredonne la mélodie de “l’eau vive”)
Amen
                                      

Jean-Jacques Corbaz



dimanche 20 août 2017

(Pr) Les 4 vandales

Prédication du 20 août 17

Lectures: Marc 2, 1-12; 2 Timothée 2, 8-10; Psaume 41, 2-4


C’est l’histoire de quatre vandales. Qui cassent un toit. Mais c’est mon histoire, et c’est la vôtre aussi!

Ce jour-là, la maison de Simon est pleine de monde, à craquer. Car Jésus est là, et les foules accourent.

Or, voici qu’arrivent quatre hommes qui portent un de leurs amis, paralysé, sur un brancard de fortune. Puisque l’attroupement les empêche d’accéder à Jésus, ces quatre gaillards ont une idée étonnante. Comme un coup de poker.  Sans s’embarrasser des convenances, ils hissent leur compagnon sur la terrasse de la maison, qui fait office de toit, aussi. Là, ils ouvrent un trou, et y font descendre le paralysé jusqu’à Jésus.
  

J’aime cette histoire, en particulier parce qu’elle est riche de symboles. De symboles bien différents de ceux du récit de Jean, que nous avons lu il y a deux semaines.

Evidemment, je préfère que ce soit le toit de Simon qui ait été percé plutôt que le mien! D’ailleurs, le climat et le style des habitations n’est pas le même.

Mais quelle est la première réaction de Jésus, à cet acte de vandalisme? Il admire la foi des quatre hommes, nous dit l’évangile. Non seulement il les félicite, mais encore il discerne, dans leur geste, un acte de foi. Un mouvement religieux!

Et on pourrait, en continuant la lecture de ce passage, méditer longuement sur le pardon des péchés, et sur la conception étriquée qu’avaient en ce temps-là les scribes de la religion. Je l’ai déjà fait. Vous aussi sans doute!


Mais aujourd’hui, j’aimerais m’arrêter avec vous sur ce trou dans le toit, qui est pour Jésus un signe de foi.

Au fond, ce dont témoignent les quatre amis, c’est de leur volonté totale, sans concession, de mettre leur copain handicapé dans la proximité de Jésus. Ils ne se laissent arrêter par rien, ni par la foule, ni par les barrières architecturales.

Leur foi, c’est de crever le toit. Grâce à ce trou, un grabataire a été remis debout; un mort-vivant a été ressuscité.

Ainsi, il a fallu casser, percer, pour que la Vie majuscule puisse se frayer un passage; et pour provoquer une rencontre qui sauve. Vous le voyez, ce passage de l’évangile ne laisse pas indemne. Il a fallu que la foi des brancardiers les transforme en casseurs; qu’elle prenne le visage de l’obstination et du culot, voire qu’elle les amène à commettre un acte de l’ordre du délit!

Et c’est ce trou dans le toit qui va conduire Jésus à, lui aussi, crever une paroi! Il percera un mur plus épais que la terrasse de Simon quand il pénètrera à l’intérieur de cet homme, qui était muré dans son infirmité, emprisonné dans les impasses de la religion juive de son temps.

Jésus ouvre une brèche essentielle quand il prononce ces mots, inouïs (inouïs au sens propre: jamais entendus, puisque seul Dieu, pensait-on, seul Dieu avait le pouvoir de déclarer cela): “Mon fils, tes péchés te sont pardonnés”. Autrement dit: tu es délivré de ce qui t’enchaînait, de ce qui t’empêchait de vivre!
   

J’aime cet Evangile qui ouvre des brèches, qui force des portes, qui crée des passerelles pour que nous puissions nous rejoindre nous-mêmes. Et nous rejoindre les uns les autres!

Des trous dans nos vies opaques, étanches, bétonnées. Des fissures dans les systèmes humains que trop souvent nous érigeons pour nous protéger de l’autre; de l’aventure; de l’inconnu... nous protéger de Dieu même, peut-être? Oui, je crois. Les pharisiens en sont un exemple, en tout cas.

Et voilà donc que retentit pour nous, ce matin, un appel vieux de 20 siècles; mais toujours ô combien actuel. Et jamais, certes, jamais réalisé pleinement. L’appel pour nous, auditeurs de cette Parole, d’ouvrir nos esprits craintifs, nos préjugés, de créer des brèches dans les systèmes d’exclusion de nos sociétés.

Quels sont aujourd’hui les toits à percer, dans notre Eglise réformée? Dans nos villages? Voire en nous-mêmes? Quel béton empêche les paralysés de 2017 d’accéder à la parole du Christ qui libère?

Et aussi, qui sont les brancardiers de notre temps? Ceux qui ont assez de foi pour abattre les toits dont nous avons cru qu’ils nous protégeraient de Dieu? Ceux qui ont assez de culot pour croire au salut des handicapés de la vie?

Il y a 500 ans, des hommes se sont levés, qui ont répondu “présent” à cet appel. Mais qui seront les Luther dont notre siècle a besoin, lui aussi?

Avez-vous remarqué? Au paralysé, Jésus ne demande pas de croire. C’est la foi des porteurs qui lui permet de guérir. Grâce à ces quatre hommes, l’Evangile est présent, pertinent, agissant. Pour le grabataire, il n’y a pas de recrutement, pas de prosélytisme. C’est à travers la foi de quelques-uns que d’autres sont amenés à la Source de la liberté.

Eh bien sachez-le, c’est toujours cela qui est important, dans notre Eglise, dans nos villages. C’est cela qui compte. Que la foi agissante et le culot d’un petit nombre permettent à d’autres d’être mis au contact du Dieu qui redonne une nouvelle jeunesse.

Ce qui compte, chez nous, ce n’est pas tant le succès auprès de tous. Cessons de regretter qu’il n’y ait pas davantage de chrétiens engagés, ici. Mais prions pour que la poignée de convaincus ose, comme ces quatre casseurs de l’évangile, devenir porteurs qui conduisent à la parole du Christ. Créateurs de brèches, où s’engouffre la Vie céleste.

N’est-ce pas justement cela, une Eglise? Des gens reliés ensemble qui se portent les uns les autres, et qui se permettent mutuellement d’accéder au Dieu libérateur?

Amen                                         


Jean-Jacques Corbaz 









dimanche 6 août 2017

(Pr, SB) Quand Jésus fait de la provoc’

Prédication du 6 août 2017   -   "L'humour de l'évangile selon Jean"

Lectures: Jean 5, 1-18; Jean 11, 25-26; Romains 5, 1-2; Ps. 103, 1-13

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Nous sommes à Bethzatha; en hébreu, la “maison de la miséricorde”. Il y a là une piscine dont l’eau est enrichie, à certains moments, par une source thermale. Quand l’eau chaude arrive, la piscine se met à bouillonner. Et on dit que les éclopés de toutes sortes peuvent être guéris, s’ils se baignent à ces moments-là.

Bethzatha, “maison de la miséricorde”, est devenue aussi un lieu de culte pour les croyants d'Israël. Un lieu où on prie et célèbre le Dieu qui offre ces guérisons. Un petit “Lourdes”, si vous voulez.

Et voilà qu’en plus de la piscine curative, en plus du lieu de culte, la “maison de la miséricorde” a fini par devenir une sorte de cour des miracles. Rendez-vous des handicapés, des malades, des éclopés, qui tous sont venus pour attendre le moment où l’eau se met à bouillonner. Ils s’agglutinent autour de la piscine, espérant le miracle. Et, en attendant, ils survivent par la mendicité, en restant là, nombreux: l’évangile nous apprend qu’il y en a plein cinq galeries à colonnes, cinq portiques.
   

Bethzatha. Voilà le cadre de cet épisode de l’évangile, qui est bien différent des autres récits de guérison. En lisant ce passage, je me suis fait quatre remarques.

1) D’abord, on ne nous dit pas comment s’est passé le miracle. L’acte de guérison en soi est presque banalisé, il passe si vite que ça veut sûrement nous indiquer quelque chose. Aucune mention de l’admiration de la foule, comme ailleurs; ni des réactions du miraculé. L’évangile veut donc nous dire que l’essentiel n’est pas dans la guérison. Il faudra regarder au-delà de l’événement.

2) Deuxième remarque. Il est intéressant de relever une différence importante entre l’évangile selon Jean (qui rapporte cette histoire) et les trois autres: chez Matthieu, Marc et Luc, la question du respect de la loi, surtout du sabbat, c’est un problème d’éthique, c’est-à-dire de comportement (“est-ce que c’est bien ou non de respecter le sabbat? Est-ce important, obligatoire?”).

Au contraire, chez Jean, c’est une question de foi au Christ. Le thème du sabbat nous fait mettre le doigt sur la pierre d’achoppement pour les juifs: qui est Jésus? Le problème essentiel est là, à la fin du premier siècle, quand Jean rédige son évangile. Respecter ou non le sabbat n’est plus un débat d’actualité.         La question centrale, c’est notre relation au Christ.

Ce fait est souligné aussi par ce qui est dit du miracle. Car c’est la parole de Jésus qui provoque la guérison: “Lève-toi, prends ta natte et marche!” Et le verbe grec employé ici devrait même être traduit par “promène-toi, va-et-viens”; c’est le verbe “peripatein”, d’où est tiré le nom de ces dames, vous savez, qui vont et viennent sur les trottoirs, pour se montrer: les péripatéticiennes.
  

L’homme guéri ne reçoit pas l’ordre de rentrer chez lui, comme dans l’évangile de Marc. Il doit se balader, aller et venir; se montrer! Nous avons ici un cas typique du fameux humour de l’évangile de Jean. Le miraculé, sur ordre du Christ, fait de la provocation!!

Provocation. Et les juifs tombent dans le panneau, ça ne rate pas! L’essentiel de ce passage sera dans la réaction de ces chefs religieux de Jérusalem, qui ne comprennent rien et accusent.

Pourtant, avez-vous remarqué? Ce n’est pas Jésus qu’ils attaquent, mais l’homme guéri. Ils lui reprochent de porter sa natte un jour de sabbat. Les traditions précisaient que, ce jour-là, on n’avait pas le droit de porter plus que le poids d’une demi figue!

Ainsi, il n’y aura aucune controverse entre Jésus et les chefs juifs, au contraire des autres évangiles. Et c’est le miraculé qui va recentrer le débat en le ramenant à la personne de Jésus. Les autorités religieuses de Jérusalem sont ridicules, elles n’arrivent pas à comprendre où se joue l’essentiel!
    3) La troisième remarque nous ramène à un verset mystérieux et rebutant; mais qui va pourtant s’avérer la clé de toute l’histoire. C’est le verset qui dit: “Ne pèche plus, de peur qu’il ne t’arrive quelque chose de pire”. Spontanément, on a envie de sauter cette phrase. Si l’homme se remet à pécher, dorénavant, est-ce que ça va lui provoquer une maladie pire qu’avant?

Non, ce n’est pas du tout ça. Nous disions tout-à-l’heure que l’essentiel, dans l’évangile de Jean, c’est notre relation au Christ.  Cela nous aide à discerner que, dans ce récit, il y a une double guérison: la guérison physique, et puis celle de la foi, celle qui fait passer de la mort à la vie.

En croyant en Jésus, fils de Dieu, l’homme est guéri d’une maladie autrement plus mortelle que sa paralysie! Le pire, c’est ce dont Jésus est venu nous délivrer, c’est le fait de ne pas connaître Dieu, son pardon, sa grâce!

La guérison physique n’est pas l’essentiel, elle n’est qu’un signe du salut. L’ancien paralysé pourrait n’être encore qu’un mort-vivant, desséché non plus à l’extérieur, mais à l’intérieur. Ce serait ça, le pire! Et le péché, c’est justement de ne pas croire au Fils, qui veut nous faire passer de la mort à la vie.
(Entre parenthèses, voyez cet humour de Jean: tandis que Jésus veut nous faire passer de la mort à la vie, les chefs juifs, eux, ne rêvent que de faire passer Jésus de la vie à la mort!!
   

4) Dernière remarque. Et nouveau contraste avec Jésus. Ce que voit le Christ, c’est d’abord la longue détresse de cet homme, ces 38 ans de calvaire. Jésus savait, dit l’évangile. Un regard lui suffit pour comprendre la souffrance du paralysé.

Ce que voit Jésus, c’est la détresse de cet homme, tandis que les chefs juifs, ô ironie, ne sont attentifs qu’à la transgression de la loi. L’homme guéri a dû retomber de haut, en étant accueilli de manière aussi mesquine par les autorités de sa religion!

Le regard de Jésus sur nos misères humaines, nos souffrances, nos paralysies, c’est cela qui nous sauve, aujourd’hui comme hier.


Il faut regarder au-delà des événements, disions-nous tout-à-l’heure. Ce récit de l’évangile nous invite ainsi à voir nos vies d’un oeil neuf, au-delà de la banalité, de la grisaille parfois. Regarder nos vies avec la sympathie de Jésus pour le paralysé, et pour tous les autres qui souffrent, qui luttent, qui espèrent. En quoi peut-il nous ouvrir, nous aussi, à la Vie majuscule, avec lui?

Beaucoup d’êtres humains passent pas la souffrance, la maladie, le désespoir. Beaucoup encore s’en sortent. Mais bien plus rares sont ceux que le passage par le désert de la souffrance fait naître à une dimension nouvelle, avec le Christ; la vraie Vie.


Cette année, nous célébrons les 500 ans de la Réforme. Souvenir d’un passage décisif, mais difficile, vers la connaissance de la grâce, du pardon de Dieu en Jésus. Nous, réformés, nous ressemblons à cet impotent de Bethzatha. Guéris, remis debout par le Saint-Esprit, nous le croyons; guéris, et pourtant toujours faibles et titubants, jamais à l’abri du péché (le péché d’oublier le Christ, son amour, son salut).

“Ne pèche plus, de peur qu’il ne t’arrive quelque chose de pire”. Comme le paralysé guéri, nous rencontrons, une fois reçue la Vie, toutes sortes d’obstacles, et même (et surtout!?) des obstacles religieux! Pour l’homme de Bethzatha, c’étaient les juifs et leur courte vue. Pour nous, serait-ce peut-être une sorte de contentement de nous-mêmes qui empêcherait la grâce du Christ d’agir pleinement (“Nous sommes sauvés, donc mangeons et buvons!”)?

Puissions-nous, autour du souvenir de la Réforme, raboter un peu nos autosatisfactions, dans nos vies religieuses comme dans notre quotidien. Puissions-nous avoir, pour le monde et pour nous-mêmes, un regard qui s’inspire de celui du Nazaréen. Afin de toujours mieux passer, avec lui, de la mort à la Vie!


Nos Eglises, comme notre existence privée, n’ont pas à être réformées une fois pour toutes, pour devenir parfaites. Ce n’est pas en notre pouvoir! Vous le savez, elles ont, au contraire, à être toujours réformées à nouveau, toujours ré-illuminées par la présence du Christ. C’est ainsi seulement qu’elles pourront éviter de devenir comme les chefs juifs d’il y a 2000 ans, crispés sur le poids d’une demi figue, et passant à côté de la guérison de Dieu!

Aujourd’hui, nous sommes guéris, libérés par la puissance du Ressuscité; ce qu’on appelle la grâce. Comment allons-nous re-frayer sans cesse le chemin vers sa lumière, pour qu’y repoussent le moins possible des mauvaises herbes et des ronces? Amen                                          


Jean-Jacques Corbaz