Lectures bibliques: Esaïe 40, 1-8 ; 1 Corinthiens 15, 35-38 + 42-44
On le dit souvent: « On est bien peu de chose »... Le prophète Esaïe, lui, l’exprime avec ces mots: « Les humains sont fragiles et passagers, précaires, comme l’herbe des champs. Vous le savez: l’herbe sèche; la fleur se fane... »
Aujourd’hui, les savants nous apprennent que nous sommes faits surtout de vide! (ce qui est effectivement bien peu de chose!). Et que, si on supprimait tout ce vide en nous, nous ne serions pas plus gros que le point que je mets à la fin de ma phrase.
L’herbe sèche; la fleur se fane. Et notre fragilité humaine, nous la sentons cruellement, face à la mort. Comme c’est vrai, ce que chantent les Trois cloches de J-V Gilles: « Car toute chair est comme l’herbe, elle est comme la fleur des champs. Épis, fruits mûrs, bouquets et gerbes, hélas tout va se desséchant... »
L’herbe sèche; la fleur se fane. Mais le verset d’Esaïe ne s’arrête pas là. Et je vous invite à le suivre jusqu’au bout, lorsque vous pensez à votre fin (ou à celle d’un.e proche): L’herbe sèche; la fleur se fane, mais la parole de Dieu demeure éternellement. Autrement dit: il y a une autre réalité que ce corps mortel... Il y a une autre espérance que celle de la santé et des biens matériels... Il y a une autre dimension que ce monde éphémère et fragile.
Comme l’exprimait si bien St-Exupéry: « L’essentiel est invisible pour les yeux. On ne voit bien qu’avec le cœur. » Et Jean d’Ormesson le précise ainsi: « Il y a quelque chose de plus fort que la mort, c’est la présence des absents dans la mémoire des vivants. » Et c’est vrai, nous le sentons bien: tant qu’une seule personne pensera à nous, tant qu’un seul cœur battra à cause de nous, nous resterons vivants, mystérieusement. Comme Jojo, l’ami de Jacques Brel, à qui le chanteur dit: « Six pieds sous terre, je t’aime encore, Jojo, six pieds sous terre, tu n’es pas mort! »
Ce qu’annoncent ainsi les poètes, c’est ce que nous soufflait déjà la Bible. Car, si nous restons vivants dans le souvenir de celles et ceux qui nous ont aimés, nous restons vivants d’autant plus dans l’infinie mémoire de Dieu, lui qui nous aime de manière absolue. Passionnément. Oui, avec Passion!
Parce que, même dans la vallée de l’ombre de la mort, il marche avec nous. Solidaire de nos souffrances, en Christ. Voulant sans cesse nous en décharger. Nous rendre plus libres. Et heureux.
Nous restons vivants. On ne sait pas comment, ni de quelle façon ça se passe. La Bible ne le dit pas. En esprit, peut-être. Dans une autre dimension, probablement. D’une manière qui nous échappe, ça, c’est sûr!
Et surtout, malgré la séparation physique, nous restons reliés. Nous continuons de vivre, mais autrement, comme dans une dimension différente. Il n’y a plus de « pourquoi », là - haut, c’est le temps des réponses. Il n’y a plus de malentendus, plus de conflits; plus de séparations, de frontières créées par l’âge, la timidité ou les hiérarchies... il n’y a plus que de l’amour, de la réconciliation, de la paix.
Oui, l’herbe sèche; la fleur se fane, mais la parole de Dieu demeure éternellement. Sa parole d’amour et de pardon, ses promesses de nous sauver sans conditions, elles demeurent, même quand tout passe et s’en va. Elles restent vivantes et agissantes, nous le savons grâce à la vie et à la mort de Jésus, lui qui a toujours été tout entier respect de chacun(e), force d’espoir et de paix... porte grande ouverte sur le Paradis!
Après la mort, Dieu nous accueille dans ce monde nouveau qui nous attend. Un monde dont on ne sait rien, sauf qu’il n’y a plus de maladie, ni de souffrance... Plus d’injustice ni de larme: il n’y a que de l’amour; de la lumière et de la paix. Chacun est connu par son nom. Accueilli, respecté de manière parfaite. La Bible appelle cela Résurrection.
Dans la première lettre aux Corinthiens, l’apôtre Paul image cette vie nouvelle par la comparaison avec une graine. Celle-ci est tellement différente de la plante qui va pousser qu’on ne peut pas imaginer la fleur à partir de sa semence. De même ce que nous deviendrons : on ne peut pas le savoir avec nos intelligences limitées d’ici-bas. Mais ce qui nous est promis, c’est qu’après la mort nous serons aussi différents de ce que nous sommes aujourd’hui que la fleur de sa graine. Mille fois plus beaux, plus lumineux, plus vrais que dans ce corps terrestre !
Je prie que cette espérance puisse nous soutenir et nous donner un sens profond, face à la mort. Et face à la vie ! Comme le raconte aussi cette jolie histoire d’enfant, qui sera notre conclusion :
“Isaline courut au fond du jardin. Grand-Papa, lui, marchait lentement à cause de ses vieilles jambes et de ses rhumatismes. Chaque année, vers l’anniversaire d’Isaline, le cerisier était couvert de magnifiques fleurs blanches. C’était son arbre préféré.
Mais voilà qu’aujourd’hui, le cerisier avait disparu!
- Où est passé le cerisier? demanda Isaline, étonnée.
- Il est tombé, répondit Grand-Papa. Tu sais, il était très vieux... Il est mort.
Isaline serra la main de Grand-Papa. Ils se regardèrent.
- Mais, fit Isaline, toi aussi, tu es très vieux. Tu vas mourir?
Elle se souvenait comme elle avait pleuré quand son petit chat était mort. Elle aimait tant son Grand-Papa...
- S’il te plaît, Grand-Papa, ne meurs pas!
-Tout ce qui est vivant doit mourir un jour, répondit le vieil homme. Même si cela rend triste. Mais la mort est un nouveau commencement.
Déjà, Grand-Papa s’était mis à creuser le sol avec sa bêche.
- Oh, fit Isaline, regarde: un dirait un noyau de cerise!
C’était bien un noyau de cerise, fendu par le milieu. Un germe sortait de cette fente.
- C’est une jeune pousse en train de s’enraciner dans le sol, expliqua Grand-Papa. Elle va grandir, et devenir un nouveau cerisier. Dans quelques années, l’arbre fleurira et donnera de belles cerises comme tu les aimes.
Isaline sourit, consolée:
- On va le replanter, Grand-Papa?”
Amen
Jean-Jacques Corbaz






