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dimanche 30 août 2015

(Pr, FA) Le père perd... et gagne! - Prédication du 30 août, « La stratégie subtile de Jésus »

Lectures:  Luc 15, 1-10; Luc 15, 11-24; Luc 15, 25-32

Vous êtes chez des connaissances, en visite. Tout à coup, vos hôtes commencent un discours virulent contre les chrétiens, en disant que, de toute façon, “ceux qui vont au culte sont des hypocrites, ils n’y assistent que pour observer le chapeau de leur voisine” etc, vous connaissez le refrain! Alors, que faites-vous?
 


Moi aussi, je me pose souvent la question... Ça dépend...

- Dire fermement qu’on n’est pas d’accord? Mais souvent, alors, l’autre durcit sa position, le ton monte, et on finit par se fâcher... Chacun repart avec son opinion encore plus profondément ancrée, et avec aussi le sentiment que l’autre est un imbécile!

- À l’inverse, éviter de répondre? Parler d’autre chose? Approuver plus ou moins lâchement son interlocuteur? On ne l’aidera pas non plus à dépasser ses préjugés, et on gardera en plus une bien piètre image de soi!

Heureusement, Jésus nous donne un excellent exemple. Il s’est trouvé quelquefois dans des situations semblables. Bien plus dramatiques d’ailleurs, car, là, c’était sa vie même qui était en jeu! En contredisant les traditions juives, il savait qu’il risquait la mort.

L’évangile de Luc, au chapitre 15, nous raconte une de ces controverses. Les scribes et les pharisiens s’indignent contre Jésus, à cause de ses fréquentations: car il partage le repas de collecteurs d’impôts ou de prostituées, il touche des lépreux et des mourants, tous considérés comme impurs. Ces contacts mettent Jésus lui-même en état d’impureté. Et, au lieu d’offrir des sacrifices pour obtenir le pardon du Seigneur, pour se purifier, voilà que c’est lui-même qui pardonne les autres, et qui se prétend fils de Dieu!

Pour un bon scribe ou pharisien, c’est aussi intolérable que pour vous un pasteur qui cambriolerait ses paroissiens. Inacceptable! Révoltant!

Que fait Jésus, ce jour-là? Il n’entre pas dans la polémique. Il ne fuit pas non plus la discussion. Mais il leur raconte une histoire. Mieux encore, il leur raconte trois histoires! Et c’est là sa subtilité:  avec ces trois contes, Jésus propose aux scribes et aux pharisiens un cheminement, un cheminement qui peut déboucher sur un progrès dans l’échange, au lieu d’un affrontement stérile.

Première histoire: c’est du tout proche, du connu. Beaucoup de scribes et de pharisiens sont de la campagne, et possèdent des bêtes. Ou en tout cas viennent d’une famille terrienne. “Si quelqu’un parmi vous a cent moutons...”, situation courante. La joie du berger qui retrouve sa brebis, ils connaissent bien. Ils s’identifient facilement à cet homme et à sa fête.

Notez que ce n’était pas du tout extraordinaire de laisser les 99 moutons dans leur pâturage: ils y sont en sécurité, ils ne sont pas abandonnés. Ce qui est mis en évidence, ici, c’est la joie: celle du berger qui ramène sa brebis; et de même celle qu’il y a, au Ciel, pour un seul pécheur qui commence une nouvelle vie!
 


Deuxième histoire: “Si une femme...”; également une situation courante. Mais plus ménagère, plus féminine. Pourtant, Jésus ne s’adresse pas à des dames! Il est toujours en train de répondre à la polémique des pharisiens.

Le schéma est le même: un objet perdu; on le cherche; on le trouve; et on souligne la joie, également par deux fois, “puisque ce qui était perdu est retrouvé”.

Il n’y a que deux petites différences entre la parabole de la pièce d’argent et celle de la brebis: l’objet perdu est un sur dix, au lieu de un sur cent; et la propriétaire est une femme. Ces deux différences éloignent très doucement les pharisiens de leur domaine à eux; ils doivent faire un plus grand effort pour s’identifier à la maîtresse de maison, à ses voisines et à leur joie. Mais il le font, cet effort, à cause de la première histoire, si parallèle à la seconde.

Ce deuxième conte nous entraîne doucement, sans violence, vers le troisième, celui qui appellera à changer de perspective.
 


Troisième parabole donc: celle du fils prodigue perdu, ou plutôt celle des deux fils; parabole qui va, en fait, décrire le changement de perspective chez ces fils à l’égard de leur père. On est à nouveau entraîné dans une situation parallèle, bien que nettement moins courante. En plus, la proportion devient ici de un sur deux!

Un père voit partir son fils cadet; ce jeune homme se perd; puis il revient à la maison, accueilli par son papa qui déclare: “Mon fils était perdu, et je l’ai retrouvé!”. Et encore une fois, on souligne la joie des retrouvailles, avec le festin, la musique et le veau gras. Ce schéma presque identique pour les trois paraboles est d’ailleurs souligné par les titres de la traduction en français courant: le mouton perdu et retrouvé; la pièce d’argent perdue et retrouvée; et le fils perdu et retrouvé.

Vous avez remarqué? Notre histoire ne s’intéresse absolument pas aux détails tels que cette bizarre demande d’héritage du cadet, et quel sera son statut après son retour. L’essentiel, il est à nouveau dans cette invitation adressée aux scribes et aux pharisiens, invitation à s’identifier au père, heureux de retrouver son enfant, et qui l’accueille dans la fête, sans poser de conditions, sans même réfléchir: il n’écoute que son coeur!

Ce cadet revenait à la maison poussé par la faim, prêt à s’écraser pour trouver un emploi décent. Il demandait un statut de domestique. Or le père ne s’intéresse pas à la justice, à combien tu as droit, au pourquoi, au comment. Il n’est pas juste: il aime!
 


Happy end? Ben non. Car il y en a un qui ne trouve pas son compte dans ce retour. C’est le frère aîné. Le plus jeune est rétabli dans tous ses droits (c’est ce que signifient les symboles de l’anneau et des sandales); alors, c’est l’autre qui trouve injuste! Lui, il a toujours obéi; toujours bossé; toujours été là; toujours été honnête. Et voilà ce chenapan qui reçoit autant... mais non: encore plus que lui! Avec la fête en prime! C’est inacceptable. Révoltant.

C’est presque une quatrième histoire qui nous est racontée ici. La plus intéressante, dans le débat avec les pharisiens. Celle qui est décisive. L’aîné s’indigne. Il refuse d’entrer dans la maison pour la fête. À son tour, il se coupe du père. Ce dernier, pense-t-il, est un homme sévère, qui ordonne, qui fait travailler, qui administre... Il devrait être équitable. Il devrait punir le cadet. La colère de l’aîné et ses préjugés sur son père le perdent!

Et alors, une seconde fois, papa sort de la maison et court vers le fils perdu. Il écoute son indignation, et il laisse parler son coeur en l’invitant à entrer. Pas seulement pour festoyer, mais pour retrouver son cadet, et du même coup reprendre sa place dans la famille: “Ton frère est retrouvé”, dit le père. Alors que l’aîné avait dit: “ton fils que voilà...”. Non! Pas pas mon fils, mais ton frère! Viens fêter, viens être heureux avec nous, avec ton frère!

Du coup, les scribes et les pharisiens se retrouvent impliqués jusqu’au chignon! Car évidemment, leur attitude envers les percepteurs d’impôts et les prostituées ressemble beaucoup à celle du fils aîné pour son cadet!

Si Jésus avait commencé par cette histoire, il n’y aurait eu aucune hésitation: les pharisiens se seraient sentis attaqués, culpabilisés; et le dialogue aurait été bloqué.

Mais voilà que, par cette suite de contes, les scribes ont été amenés à voir les choses avec l’oeil du père, et non celui de l’aîné. Comme les deux fils de la parabole, les pharisiens sont invités à changer de regard sur le Père céleste; ou plutôt à entrer dans sa perspective à lui: celle d’un homme qui aime ses enfants passionnément, encore plus qu’un père terrestre; encore plus qu’une femme ses pièces d’argent; encore plus qu’un berger ses moutons... Immensément plus heureux de les retrouver quand, sur le chemin de la maison, survient l’occasion de les embrasser.
 


Je suis impressionné par la réponse de Jésus. Emerveillé par le temps, la disponibilité; l’ingéniosité, la patience qu’il montre envers ses opposants. Il ne leur fait pas la morale, mais il les amène, sans violence, à voir les choses autrement!

Les 99 justes, les 99 moutons, le fils aîné, donc les juifs eux-mêmes ne sont pas dévalorisés: il y a de la joie pour eux, cela est souligné à chaque fois. Mais cette joie existe aussi, et plus grande encore, quand quelque chose ou quelqu’un qui était perdu est retrouvé!

Et cette suite d’histoires, elle n’a pas de conclusion! Jésus ne dit pas ce que fait le fils aîné, s’il rentre ou s’il reste dehors. De même, l’évangile ne dit pas ce que font les scribes et les pharisiens, s’ils entrent dans la perspective du Christ ou non. On reste comme sur des points de suspension, avec une invitation! Une invitation qui nous est adressée aussi, lecteurs ou auditeurs de ces paraboles. Ce sera à nous, à chacun(e) de nous, d’y répondre...

Au fond, Jésus témoigne, même dans la forme de sa réponse, de tout l’amour qu’il y a dans le contenu de chaque histoire. Tout le respect; toute l’absence de préjugés.

Je suis impressionné par la réponse de Jésus. Et je me dis que peut-être, grâce à cet exemple du Christ, peut-être pourrions-nous vivre un peu mieux nos polémiques, nos différends: en essayant d’accompagner comme Jésus l’a fait nos opposants dans leurs réactions négatives, voire dans leurs colères. En tentant de débloquer la situation sans faire la morale, sans dire ce qui est bien et ce qui est mal. En nous regardant et en nous faisant regarder comme des frères, des proches, sans cesse appelés à le redevenir! Tout cela, surtout, parce que d’abord Dieu fait de même avec nous, au moment même de nos polémiques, parce que son amour est infiniment plus grand que sa justice!

À tous il nous dit: “Viens, entre fêter avec nous! Si tu es fâché, quitte ta pote et viens rejoindre ton pote!” 



 

Voilà un bel échantillon de la diplomatie de Jésus. Mais il n’a pas toujours agi ainsi. Nous savons qu’il a aussi, en d’autres occasions, invectivé les pharisiens et chassé les marchands du Temple!

Alors, que répondrait-il à vos connaissances, quand elles vitupèrent comme tout-à-l’heure sur la prétendue hypocrisie des chrétiens?

Ça m’intéresserait de le savoir! Je l’imagine bien commencer en tout cas par remarquer malicieusement qu’aujourd’hui, les dames qui viennent au culte ne portent plus guère de chapeau?
Amen                                          

Jean-Jacques Corbaz  




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