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dimanche 15 novembre 2015

(Pr, SB) “Hors de moi vous ne pouvez rien faire”... Vraiment?

Prédication du 15 novembre 2015 -  Jean 15, 1-8, Esaïe 51, 1-3

La Bible est riche d’images terriennes. En particulier, la vigne y est à l’honneur. Dans l’Ancien Testament comme dans le Nouveau, la communauté des croyants est souvent comparée à une vigne, soignée, chérie, protégée par son Créateur: le vigneron majuscule!

Alors moi, pasteur; moi dont le père terrestre était justement vigneron, je savoure ces images si réalistes. Car le travail sur nos ceps et nos sarments n’est pas simple: protéger des maladies, du mildiou, des parasites... Et aussi des rôdeurs, et puis des maraudeurs (à deux ailes ou à deux mains!). Se faire du souci pour les éléments qu’on ne maîtrise pas: le gel, le sec, la grêle... Oui, le “métier” de Dieu ressemble étonnamment à celui de nos vignerons!

Mais savez-vous, je n’ai pas encore mentionné une activité importante à la vigne: c’est de couper! Depuis la taille, en hiver, jusqu’aux vendanges, il faut savoir manier le sécateur. En passant par: éplaner, puis rebioller, puis biocher; voire sacrifier des grappes... Il s’agit d’empêcher le cep de disperser ses forces en végétation inutile, pour que le raisin puisse mûrir, et que le vin soit meilleur.

Le travail de la vigne demande de savoir bien couper. Pas étonnant, dès lors, que l'évangile utilise cette image pour parler de notre vie. En effet, celle-ci est faite de coupures, de déchirements; de tailles et de biochages. "Je suis le cep, dit Jésus, et vous les sarments".

Dans les 8 versets de Jean que nous avons entendus, il y a 2 images différentes, 2 comparaisons qu'il faut veiller à ne pas embrouiller. D'abord, Jésus affirme que c'est Dieu qui taille, qui émonde et qui purifie (le même verbe en grec veut dire tout ça). Dieu, comme un vigneron, nous travaille et nous façonne, pour nous empêcher de disperser nos forces en branches inutiles, pour que les fruits de notre foi puissent mieux mûrir, et que le résultat en soit meilleur.

Et puis, il y a une seconde image, lorsque Jésus appelle ses disciples à demeurer en lui; donc à rester fidèles à ses paroles, à sa volonté, à ses rêves pour nous.
 



Concentrons-nous un instant sur la première comparaison. Elle est si connue que nous ne réalisons  souvent pas à quel point elle peut poser problème; et un immense problème, même: Dieu taille, il coupe les sarments qui ne portent pas de fruits, et il les enlève...

Imaginez comment peut réagir à cela quelqu'un qui doute, ou qui a tendance à culpabiliser. Il risque bien d'entendre ce verset comme une condamnation de son manque de foi, ou de ses "péchés"; se sentir rejeté par Dieu. Ce qui est bien entendu à l'opposé de l'ensemble du message de l'évangile! Peut-être d'ailleurs avez-vous, vous-même, réagi ainsi?

Cette difficulté fait dire à beaucoup de pasteurs que ce passage est imprêchable aujourd'hui. Qu'il faut en tout cas éviter de le lire à l'occasion de baptêmes, ou de services funèbres... enfin, partout où nous pouvons parler à des gens qui ne sont pas 100 % certains d'être sauvés... À moins de supprimer à la lecture les phrases qui, comme ce terrible verset 6, mentionnent les sarments enlevés et jetés au feu!
 



Pour mieux comprendre ce passage, j'ai envie de faire trois remarques:

1° D'abord, souvenons-nous que Jésus s'adresse ici aux 11 disciples. Même Judas est déjà sorti! Donc, le Christ parle à des gens entièrement convaincus. Il n'aurait pas dit cela devant d'autres personnes.

Jésus emploie cette image pour fortifier les 11 avant l'épreuve de Vendredi saint. Pour les assurer qu'ils sont dans le vrai, et qu'il ne leur faut pas douter du bien-fondé de leur choix. Cette comparaison n'est valable que pour eux, les disciples, et c'est la trahir que de l'appliquer à des gens qui sont en marge d'une vie de foi solide; ce n'est pas pertinent. Un peu comme dans un parti politique, où on ne va pas parler de la même manière selon qu'on s'adresse à des militants qu'on veut galvaniser, ou à des gens de l'extérieur, pas tout à fait convaincus.

Jésus ne parle qu'à des sarments qui portent du fruit ("Vous, vous êtes déjà taillés par ma parole" dit-il) - car il faut les préparer à l'émondage ô combien douloureux de la croix!

2° Deuxième remarque: il serait entièrement faux de se sentir, à partir de ces versets, autorisés à séparer nous-mêmes les bons des mauvais, les vrais des faux. C'est Dieu qui taille, et personne d'autre! Les anathèmes, les excommunications et autres malédictions ne sont pas de notre ressort, fussions-nous chefs d'Eglise!

3° Dernière remarque sur ce point: quand il affirme "Hors de moi, vous ne pouvez rien faire...", Jésus dit aussi "Restez unis à moi". Nous sommes déjà dans la seconde comparaison. Ce n'est plus Dieu qui coupe, mais ce sont les croyants qui sont encouragés à rester dans la communion; à ne pas se couper du Christ. "Dans les épreuves, vous serez tentés de vous séparer de moi, dit Jésus. Or il est vital pour vous, pour l'Eglise, de demeurer attachés au cep". Il y a une sève qui coule de la souche aux sarments, et qui seule peut donner la vie; et qui seule peut donner de porter du fruit utile. Cette sève, c'est bien sûr le Saint-Esprit, le souffle du Christ pour nous. "Je suis le cep, et vous les sarments".

Là encore, souvenons-nous que Jésus parle aux seuls 11 disciples. Il ne dirait jamais à des tièdes "Hors de moi, vous ne pouvez rien faire"! Le bon sens nous le dit bien: hors du Christ, on peut faire des quantités de choses très utiles et positives! Mais ici, il s'agit de porter les fruits de l'Eglise, les fruits du Saint-Esprit; les fruits communautaires décrits dans la suite de ce passage: l'amour fraternel entre chrétiens; la joie qui reflète celle du Ressuscité; le témoignage missionnaire; la prière; le service à la communauté chrétienne; et le fait de tenir bon dans les persécutions. Soit tout ce qui est mentionné dans les versets 9 à 20 (je vous invite à les relire tranquillement chez vous).

La deuxième comparaison complète ainsi la première, chacune corrige ce que l'autre pourrait avoir de trop restrictif: d'abord, portez du fruit, car la sève de l'Esprit vous nourrit dans un but autre que vous-mêmes! Et ensuite, restez unis au Christ, car il est la meilleure source de forces intérieures et de courage pour la mission que vous recevez. Les deux mouvements sont étroitement liés, et il y a un va-et-vient continuel entre eux: rester en Christ permet de porter du fruit; et porter du fruit nous rattache plus étroitement au Seigneur. Chacun de ces temps est la conséquence de l'autre.



 



Je termine par trois questions, que je laisse à votre méditation:

- Que signifie rester attaché au Christ et porter du fruit dans notre situation de chrétiens engagés et convaincus aujourd'hui? (un peu comme Jésus, je ne m'adresse pas aux autres, ce matin, excusez-moi s'il y en a dans cette église qui ne se sentent pas concernés!!). Que signifie rester attaché au cep? À notre époque d'individualisme à tout crin, il y a du pain sur la planche, il me semble!

- Et puis, quelles priorités ce passage appelle-t-il pour notre paroisse, en ce jour d'Assemblée? Quels fruits allons-nous cultiver ensemble?

- Enfin, cette image de la vigne ne nous invite-t-elle pas à tailler, à couper, non pas pour rejeter des personnes mais pour façonner notre paroisse, et notre Eglise, de manière à ne pas disperser nos forces en branches inutiles, pour que les fruits de notre foi puissent mieux mûrir, et que le résultat en soit meilleur?

Vaste programme, comme disait le Général!

On le sait: tout ce qui ne tue pas rend plus fort. C’est ainsi que le Père nous conduit à maturité, à travers les souffrances. Sachant que celui qui nous précède sur ce chemin-là, c’est son Fils. Modèle de nectar, après avoir été taillé de toutes parts, sur la Croix. Vin de notre fête! Amen                                     


Jean-Jacques Corbaz



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