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dimanche 19 octobre 2014

(Co, Pr) Le match. Elie l'emporte, Elie s'emporte!

Narration du 19 oct. 2014
«Le match. Elie l'emporte, Elie s'emporte!» - 1 Rois 18


Lectures: Esaïe 30, 8-11; Luc 9, 51-56; Ephésiens 5, 8-11


Résumé de l’épisode précédent. En quel Dieu croyons-nous? L’étonnante aventure d’Elie essaie de répondre à cette question, pas simple du tout. Qui est-il? Quel Dieu adorons-nous?

L’histoire avait commencé lorsque le Seigneur YHWH avait envoyé Elie devant Achab, le roi d’Israël, principal responsable de la mode des idoles. En effet, sa femme, Jézabel, était païenne, adepte de Ba’al.

Elie avait accusé: “Le pays entier adore les faux dieux, Ba’al et Ashéra. YHWH, le vrai Dieu, en est ulcéré. Il va donc faire cesser la pluie. Il ne tombera plus une goutte d’eau en Israël!”

Achab n’avait rien répondu. Elie s’était caché, d’abord près d’un torrent, puis à l’étranger, à Sarepta, en Phénicie. Toujours, YHWH avait veillé sur lui. Il l’avait nourri, et s’était montré un Dieu de vie, un père qui aime ses enfants les plus fragiles, les plus démunis. La veuve et l’orphelin avaient bénéficié de cette bénédiction.

Et puis soudain, Dieu avait parlé, à nouveau. Il avait dit à Elie: “Lève-toi, retourne vers Achab, car je vais faire revenir la pluie!”

Elie avait donc quitté Sarepta, et s’était mis en marche vers Israël. Et c’est là que nous le retrouvons, sur le chemin, en direction de Samarie.

Partout où il passe, le paysage est désolé, la terre craquelée, les arbres morts, les oueds asséchés. Ça et là, des cadavres d’animaux, et des ossements; et partout, le “zonnement“ insupportable des mouches. Elie croise des groupes d’enfants, de vieillards, les joues creuses, les yeux enfoncés dans les orbites. Ils vont, le ventre vide, poussés par la faim et la soif sur les chemins de l’errance.

Sur la route, Elie voit aussi des poteaux sacrés dédiés aux Ba’als; panneaux colorés alléchants, qu’il découvre avec stupeur, puis colère! On peut y lire:
Demandez le salut!
Qualité de vie au Club Eden!
Corps de rêve grâce à BodySlim!
Assurances pour le bonheur éternel!

Et, un peu plus loin:

Vous qui cherchez la paix du coeur, la vérité, la guérison, le succès, nous vous invitons ce soir aux jeux des Ba’als!

Ces panneaux New-Age qui jalonnent la route d’Elie traduisent l’aspiration des gens: l’attente d’une vie réussie et tranquille, le désir d’être aimé et reconnu, le besoin de stabilité et de sécurité. Chacun(e) souhaite le bonheur, le paradis sur terre.

Tout en avançant, Elie voit encore de temps en temps des restes d’autels de YHWH à moitié en ruines. Ils lui rappellent ceux qui avaient jalonné la route d’Abraham. On peut y lire:
La mort, c’est être séparé de Dieu.
La vie, c’est vivre de Dieu
Tu es libre de choisir, de dire Oui ou de dire Non.
Vivre la vie que Dieu te propose est un chemin de risque sur lequel tu rencontreras l’inattendu.

Elie sent monter en lui une sainte colère contre cette ordure de Jézabel, qui pousse à l’adoration des faux dieux. Colère aussi contre le peuple qui se laisse entraîner sans discernement. Tout en marchant, il se met à crier: “Dieu, mon Dieu, où es-tu? Réponds-moi, Seigneur, réponds-moi!”


Tout-à-coup, Elie tombe sur Ovadya, le chef du palais. Effrayé, Ovadya se met à genoux devant Elie et s’écrie: “Que fais-tu? D’où viens-tu? Ça fait trois ans qu’on te cherche! À cause de ta parole malheureuse au roi, il n’est pas tombé une goutte d’eau de tous ces trois ans. Les gens risquent la mort, c’est la catastrophe!”

Ovadya conduit Elie au roi. Et dès qu’il aperçoit le prophète, Achab hurle:
- Ah, te voilà, porte-malheur d’Israël, oiseau de mauvais augure! C’est ta faute, cette sécheresse!

- Non, répond Elie. Ce n’est pas moi, le porte-malheur, c’est toi. Toi et le peuple qui avez abandonné le Seigneur pour suivre les Ba’als. Ecoute, voici ce que nous allons faire: rassemble tout le peuple autour de moi, sur le Mont Carmel. Je leur parlerai. Et la pluie alors reviendra.

Aussitôt, Achab envoie des messagers dans tout le pays. Et le peuple s’interroge: c’est qui, cet Elie, qui commande à la pluie? Certains sont pleins de violence: cette catastrophe, ces gens en danger de mort, c’est de sa faute. Tuons-le! Certains paniquent: si Elie est revenu, que va-t-il nous arriver, maintenant? D’autres encore se taisent; leur lassitude est si grande, ils ont tant souffert, que peut-il leur arriver de pire?

La nouvelle se répand, de ville en ville, de village en village. Et des foules se mettent en route. Qui poussés par la curiosité; qui par l’espoir que puisse cesser la famine; qui par soumission au roi tout-puissant...

Arrivé au Mont Carmel, Elie voit rassemblés les 450 prophètes du Ba’al et les 400 prophètes d’Ashéra. Ils sont propres, bien nourris, en bonne santé; un clergé sûr de lui, en tenue d’apparat. Et en face, une foule fatiguée, meurtrie, avec des tuniques usées, aux couleurs fanées; ils ont le visage maigre, les yeux creux. Des enfants pleurent et s’accrochent aux habits de leur mère. De ci de là, des animaux efflanqués traînent, à la recherche désespérée d’une touffe d’herbe.



Elie sent bouillonner sa colère. Ses yeux lancent des éclairs. Il vocifère, bras tendus vers la foule: “Mais enfin, jusqu’à quand balancerez-vous d’un pied sur l’autre? Si c’est YHWH qui est Dieu, suivez-le! Et si c’est Ba’al, adorez-le!”

Le peuple ne répond pas. En face, les prophètes de Ba’al ont un sourire narquois.

“Mais répondez!” crie Elie. Silence...

Le peuple ne répond pas, parce qu’il ne veut pas choisir. Parce qu’il ne peut pas choisir. Deux dieux protègent mieux qu’un seul, pas vrai? Et puis, la vie est ainsi faite que chacun des dieux y joue son rôle, impossible d’en éliminer un sans tout remettre en cause, sans tout bouleverser...

Ce silence fait souffrir Elie davantage encore. Les larmes aux yeux, il crie: “Mon Dieu, où es-tu? Réponds-moi. Réponds-moi!”

Et cette fois, sa décision est prise: c’est à YHWH de relever le défi. Alors, se tournant vers le peuple, Elie annonce: “On va voir qui est le vrai dieu. Je vous propose un match! Un test! Voici la règle du jeu: chaque camp va prendre un taureau, le préparer et l’installer sur un autel, mais sans y mettre le feu. Puis chacun à son tour priera son dieu. Et le dieu qui enverra le feu sur le taureau, ce sera le vrai dieu.



Le peuple semble se réveiller. Il scande: “D’ac-cord, d’ac-cord!”. Un peu partout, des paris s’organisent: “Je mise tant sur Ba’al!” - “Et moi tant sur YHWH!”

Les prophètes du Ba’al préparent tout dans les règles: l’autel, le taureau; du bois bien sec. Ils commencent leurs prières, la foule se tait peu à peu. Tous observent, et attendent. Les prophètes crient: “Ba’al, Ba’al, réponds-nous! Ba’al, envoie le feu!”

Un sourire sur les lèvres, Elie regarde la scène: “Votre dieu, il dort. Ou bien il est sourd, plus fort! Ou alors il est en vacances!”

La foule s’amuse, et répond: “Il-dort, il-est-sourd. Plus-fort!”

Les prophètes redoublent de cris. Ils vont jusqu’à se lacérer, se déchirer la peau pour essayer d’attirer l’attention de leur divinité... Le temps passe. Et le feu ne vient pas. La foule s’agite, et les prophètes s’inquiètent. Elie sourit.
 

“À mon tour! hurle-t-il. Regardez!”

Etonné, le peuple le voit prendre douze pierres plates pour reconstruire l’autel. Les plus âgés se souviennent des douze tribus d’Israël, et du Dieu de leurs Pères, qu’ils ont quelque peu délaissé. Elie fait creuser un fossé autour de l’autel, et ordonne de verser douze jarres d’eau sur le bois. L’eau ruisselle, ça sent le mouillé. Toute cette eau gaspillée, après trois ans de sécheresse...

Arrive l’heure du couchant. L’heure de l’offrande. Dans le silence, Elie se met à prier: “Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob,  Seigneur Eternel, fais qu’on reconnaisse aujourd’hui que c’est toi qui est notre Dieu, à tous. Ecoute-moi, et ramène vers toi le coeur de ton peuple”.

La foule, silencieuse, écoute et attend.

Soudain, un éclair éblouissant, un fracas formidable! Le feu embrase le bûcher. En un instant, tout est consumé, le bois, le taureau. Et l’eau.

La foule effrayée se prosterne, dans un grand respect: “C’est YHWH qui est Dieu! C’est YHWH qui est Dieu!”

Elie, euphorique, tout plein de sa victoire, hurle: “Attrapez les prophètes, ne les laissez pas s’enfuir!” Et ivre de son succès, il les égorge tous, 850! Il les égorge, un à un!

Il ordonne ensuite au roi de monter au sommet du Carmel. Au loin, on entend un roulement de tonnerre. Elie, tout excité, impatient, court derrière Achab.

Arrivé au sommet de la montagne, il lève les bras, comme pour attraper Dieu. Puis il se prosterne, couvert de sang et de sueur... Mais la pluie ne vient pas. Comme pour dire que personne ne peut décider à la place de Dieu. Personne, pas même Elie!

Sept fois de suite, Elie, toujours face contre terre, envoie son serviteur pour scruter l’horizon. Et ce n’est que la septième fois qu’un nuage est annoncé. Enfin. Le ciel s’assombrit, le vent se lève, et, oui, la pluie se met à tomber. Enfin!

Elie se relève, et ordonne au roi de rentrer avant que les chemins ne soient inondés. Lui-même court devant le char d’Achab, il ne sent pas la fatigue. La pluie le lave du sang de ses ennemis. Il se sent comme un taureau puissant, invincible; comme un dieu. Et les anciens, le voyant courir ainsi, se souviennent de David, quand il dansait nu devant l’arche.



Elie triomphe. Il est vainqueur sur toute la ligne!

Mais voilà, ce bel enthousiasme ne dure pas. À peine est-il arrivé à Samarie qu’il apprend que la reine Jézabel a donné l’ordre de le faire mourir. “Tu as massacré les prophètes de mon dieu, Ba’al. Demain, tu seras égorgé, toi aussi!”

Elie doit s’enfuir, seul, dans le désert. C’est à nouveau la peur, et l’errance. Courir. Se cacher.

Après plusieurs heures de cavale, il se couche sous un genêt, épuisé.
Et, sous cette couronne fleurie, qui sert à orner les défunts, désespéré, il appelle la mort.

Dans le silence, Elie pressent maintenant que ce Dieu qu’il vient de faire triompher, ce n’est pas le vrai Dieu. Que cette victoire éclatante, qui lui a tant fait plaisir, elle ne rime à rien. Est-ce que lui, Elie, aurait outrepassé les ordres de YHWH? Dieu lui avait demandé d’annoncer le retour de la pluie; mais est-ce qu’il avait aussi ordonné ce match spectaculaire? Et surtout, surtout, le massacre des prophètes de Ba’al?

Elie, perplexe, ne sait plus très bien. Il l’a emporté; mais se serait-il emporté, du coup? Qui est Dieu? Il ne sait plus vraiment.

Il lui reste encore beaucoup de choses à découvrir. À suivre, bien sûr! Amen

Jean-Jacques Corbaz


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