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lundi 1 décembre 2025

(Pr) La patience et l’espérance - 1er décembre 2025


Lectures: Jacques 5, 7-11; Matthieu 13, 33.

Patience. Le mot n’est pas très à la mode. Dans une société stressée, dans un monde où le temps s’emballe, où la vie est une course-poursuite, dans un temps où nous n’avons plus le temps d’attendre, eh bien! les appels de la Bible à la patience nous semblent plutôt déplacés. Désuets. Démodés.

Patience. Parfois pourtant, nous n’avons pas le choix. Des évènements nous forcent à attendre: la maladie; l’expérience du deuil, ou de la séparation; les handicaps du grand âge; la vie dans un établissement médicalisé… 

Prendre patience… Ce sont aussi parfois des évènements heureux qui le demandent: la construction d’une amitié, ou d’un amour; l’attente d’un bébé, et même la lente création d’une relation entre parents et enfant, quand il est arrivé. La patience fait partie du jeu des relations humaines.

Mais qu’est-ce que la Bible veut nous dire autour de ce thème? Est-ce qu’elle nous appelle, comme on le dit souvent, à une patience passive, résignée, dans le style: «Tu souffres? Console-toi: au Ciel, tu seras heureux. Alors… patiente!»

Une religion qui affirmerait cela serait pleinement l’opium du peuple, selon le mot de Karl Marx, c’est-à-dire une consolation artificielle, comme la drogue. Une espèce de «truc» pour que les plus défavorisés ne se révoltent pas.

Dans la Bible, le passage principal concernant la patience se trouve dans la lettre de Jacques, au chapitre 5. Écoutons-le dans une traduction la plus fidèle possible.

«Soyez persévérants, frères, jusqu’à ce que le Seigneur vienne. Voyez comment le paysan prend patience en attendant que la terre produise les récoltes dont il a besoin: il travaille patiemment jusqu’à la maturité des derniers fruits.
Vous aussi, soyez persévérants. Gardez courage, car la venue du Seigneur est proche.
Ne vous jugez pas les uns les autres, ne vous plaignez pas d’autrui: ce n’est pas à vous de vous juger.
Frères, souvenez-vous des prophètes qui ont parlé au nom du Seigneur. Prenez-les comme modèle de persévérance dans l’adversité, on les déclare heureux parce qu’ils ont tenu bon. 
Vous avez aussi entendu parler de la patience fidèle de Job, et vous savez ce que Dieu lui a accordé à la fin. Car le Seigneur est plein de bonté et de bienveillance.»


Je vous propose également un verset de l’évangile selon Matthieu, au chapitre 13:

«Jésus leur dit une autre parabole: ‘Le Royaume des cieux ressemble au levain qu’une femme prend et mélange à 25 kg de farine, jusqu’à ce que toute la pâte ait levé.»


(après le cantique:)

 


Nous sommes en 1989. Un scandale secoue l’Angleterre. Rassurez-vous, pas d’histoire de galipettes ou de corruption. Ce qui avait déclenché la polémique, c’était le nouveau portrait officiel de la reine Elisabeth. Sur cette photo, ô horreur, on pouvait voir que la souveraine, 63 ans alors, avait des cheveux blancs! qu’elle avait aussi des rides sur le front! et même quelques plis sur le cou! Réaction ulcérée de beaucoup d’Anglais qui n’acceptaient pas de voir les signes de l’âge sur Sa Majesté.

Le temps qui passe est une des choses les plus difficiles à admettre. Il fait partie de nos propres limites, celles qui nous empêchent d’être le personnage idéal de nos rêves. Nous trouvons qu’il va trop vite. Ou trop lentement. Nous sommes si souvent en train d’attendre, ou en train de regretter.

«Soyez persévérants, mes frères», dit l’apôtre. La lettre de Jacques nous invite  à une approche du temps qui ne soit ni piétinement d’impatience ni résignation passive. Ni fuite en avant ni nostalgie d’un passé révolu. «Soyez persévérants, jusqu’à ce que le Seigneur vienne».

C’est une lettre pour ce temps de l’Avent, ces quatre semaines qui nous conduisent à Noël.

On ne sait même pas si son auteur est un juif ou un chrétien. En tout cas, l’épître ne mentionne jamais Jésus, ni les apôtres, ni l’Église. Il est probable qu’il s’agisse d’un juif qui attend le Messie. Comme nous, qui revivons, chaque dimanche de l’Avent, l’attente, l’ouverture à la naissance du Christ.

«Soyez persévérants, jusqu’à ce que le Seigneur vienne». Et pour nous, c’est la naissance de Jésus parmi nous qui change notre manière d’habiter le temps. Parce qu’il est venu lui-même y demeurer, et s’y soumettre aux lois du temps. Aux limites des heures, des jours et des années. Jésus est venu habiter notre temps pour le travailler, comme le levain fait bouger la pâte.


C’est à cette attente-là; c’est à cette patience, qui est active et non résignée; c’est à cette persévérance que la lettre de Jacques nous invite, conformément d’ailleurs à la plupart des autres textes bibliques à ce sujet. 

Et l’exemple qui nous est proposé nous empêche clairement de nous tromper: l’image du paysan. Impossible, quand on cultive, d’accélérer la croissance de ses plantes par son agitation ou par son stress. Les choses viennent en leur temps, et les cheveux blancs aussi. Reine ou pas!

Mais l’attente du paysan n’est pas de la passivité, bien sûr. Enlever les mauvaises herbes, traiter, tailler, arroser, protéger des oiseaux ou d’autres indésirables… le travail ne manque pas. J’aime que dans la Bible, quand on nous parle d’attendre, on nous donne l’exemple de gens qui patientent en travaillant. Et non les bras croisés!

On a, dans le passé, tellement parlé de la nécessité d’être patient, pour le chrétien, qu’on a produit beaucoup de résignés, de fatalistes, de victimes de l’opium du peuple. Sans doute aujourd’hui faut-il au contraire encourager plutôt l’impatience!

Je suis d’avis qu’aujourd’hui, l’adversaire de la foi, ce n’est pas l’impatience, mais le découragement. Oui, l’adversaire de la foi, ce n’est pas l’impatience, mais le découragement. Si, comme le chantait Jacques Brel, «le monde sommeille par manque d’imprudence», on peut dire aussi que le monde sommeille par manque d’impatience. Par excès de résignation.

Les autres images proposées ensuite par l’apôtre confirment cette interprétation: les prophètes et Job, cités en exemples, ont espéré activement; ils se sont engagés de toutes leurs forces pour que ce qu’ils attendaient soit plus fort que le monde fataliste et fermé où ils vivaient. Ils ont refusé de justifier trop facilement les erreurs ou les injustices qu’ils subissaient. 

En cela, pouvons-nous ajouter en tant que chrétiens, en cela ils annoncent le Christ. Lui non plus ne s’est pas résigné à la victoire du mal. Lui aussi a refusé au présent le droit de triompher sur l’avenir. Lui aussi a refusé au destin de prendre la place de Dieu!

Même au travers de la souffrance, Dieu poursuit ses objectifs. Et les prophètes, et Job, et Jésus, par leur attente active, par leur travail patient, nous aident à faire de même!



 
Alors, frères (et sœurs), patience! Mais patience dans l’action, et pas dans l’inaction! Persévérance, espérance qui engage, voilà le message de la lettre de Jacques pour cet Avent.

Christ est à la porte, et sa venue est trop importante pour que nous restions empêtrés dans les histoires d’hier et d’avant-hier. Dans les jugements, dans les disputes contre les autres ou contre nous-même. Les culpabilités, Jésus vient les enlever. Inutile donc de les cultiver!

Par contre, puisque Jésus vient habiter le temps, il nous appelle à l’habiter aussi, avec lui. À aimer ce temps qui nous entoure, à l’accepter comme on accueille un nouveau-né dans sa famille. À aller au rythme du temps, comme on respecte le rythme d’un bébé ou d’une personne âgée, même si son temps n’est pas le nôtre.

Dieu a pris du temps pour nous! Il s’est mis à notre rythme, à notre portée, il nous laisse le temps de le rejoindre! C’est pourquoi nous, chrétiens, nous avons beaucoup moins de risques de nous décourager: car nous savons que rien, ici-bas, dans notre temps, rien n’est absolu. Rien n’est définitif. Le monde nouveau que Dieu re-crée pour nous, hors du temps, nous donne du recul. Face à l’éternité, et surtout face à un Dieu qui abandonne son éternité pour venir à notre rencontre, que représentent quelques rides et quelques cheveux blancs?

Aucun échec n’est le dernier. Aucune défaite n’est définitive, puisque Dieu travaille avec nous pour transformer la pâte! C’est pourquoi nous pouvons risquer notre vie, dans ce temps. Il nous est donné comme un champ à cultiver, un espace où faire pousser les fleurs de l’amitié, et les fruits d’un amour qui s’engage.

Je vous propose, pendant le silence et le morceau de musique qui viennent, de réfléchir à ces questions: comment remplir ce temps de l’Avent et de Noël? À qui pourrais-je donner un signe de cette présence? À qui vais-je offrir un peu de mon temps, même si je ne lui «dois» rien?
Amen

Jean-Jacques Corbaz

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