Il y a dans l’air une irrationnelle allégresse, force intense contenue et qui demande à chanter. Il y a dans l’air comme un vent de promesse, souffle tiède précurseur de l’été. On se débarrasse des pulls de laine, des bottes fourrées, des sous-vêtements de grand froid. La neige, qui semblait s’incruster, indécente, se liquéfie et s’évapore comme dans un sourire. Trois jours après les moins dix, quelques degrés au-dessus de zéro semblent le Portugal en avril.
Mais c’est surtout le soleil! Celui qu’on avait presque oublié, celui qui nous négligeait perce maintenant les nuages, serein, et annonce que dans… pas possible! deux semaines, c’est le printemps!
Il y a dans l’air une joie folle, gonflée des espoirs les plus absurdes. Je cours, libéré, sur les sentiers vallonnés de ma campagne. À côté de mon chemin, des vaches me regardent avec l’air de réfléchir au temps qui passent. Mais pourquoi faut-il qu’elles aient ces yeux qui coulent, cet air si triste, à regretter les jours d’averse grise? Elles me semblent toujours affligées du même deuil, comme une mère pleure son fils parti très loin faire fortune, aux USA - vous savez, là où l’on fabrique le corned beef…
Jean-Jacques Corbaz, mars 1986
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