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dimanche 29 avril 2018

(Pr) Maudire les mécréants??!

Prédication du 29 avril 2018, « Un curé pas très catholique » 

Lectures:  1 Corinthiens 16, 19-24; Matthieu 5, 43-45; Luc 9, 51-55


Il est rare qu’on lise attentivement les salutations qui figurent à la fin des épîtres de la Bible, et qu’on prêche sur elles. Mais là, il y a un verset qui m’a sauté à la figure, c’est celui-ci: “Si quelqu’un n’aime pas le Seigneur, qu’il soit maudit”. Ouille là! J’espère qu’il vous a fait sursauter aussi!!
 
Cette phrase surprend, elle fait tache, avec le reste de la lettre, et en particulier les autres salutations, qui parlent d’amour et de baisers. Elle tranche surtout avec tout ce que nous savons de l’amour chrétien dans le Nouveau Testament! Elle nous gêne et nous interroge. Comment la comprendre?
 


Un qu’elle ne devait pas gêner, c’est un curé espagnol nommé Don Eladio Blanco Vila. Lors d’un service funèbre, il a tiré sur ses paroissiens avec un pistolet, parce que ces derniers n’étaient pas d’accord avec lui!

C’est en 1987. Don Eladio préside les funérailles d’une dame âgée. Or, celle-ci n’allait pas à l’église. En chaire, le curé déclare que la défunte n’a donc pas droit au sacrement, puisqu’elle ne pratiquait pas. Et que, dès lors, il n’ira pas au cimetière pour la mise en terre.
 
La famille et les quelque 300 fidèles murmurent et se fâchent. Mais Don Eladio n’apprécie pas cette colère, il la considère comme une offense. Indigné au point d’en oublier le commandement  “Tu ne tueras pas”, le curé sort de sa poche un revolver! Il tire cinq fois sur ses paroissiens avant d’être désarmé par la foule.

Don Eladio court alors se barricader dans la sacristie, d’où il menace la foule avec un fusil d’assaut militaire. On appelle la police pour ramener le calme... Et on découvre un véritable arsenal chez ce curé pas comme les autres. Hem! On se croirait dans un roman noir de San Antonio!! Et, vous le voyez, les musulmans djihadistes ne sont pas seuls de leur espèce...
 
  


Cette histoire s’est réellement passée, en 1987. On ne sait pas très bien s’il faut en rire ou en pleurer. En tout cas, elle révèle un état d’esprit inquiétant: penser que la foi chrétienne, c’est un ensemble de “devoirs”, qu’il faut accomplir; et croire qu’avec des menaces, par la force ou par la peur, on peut changer les gens.
 
Nous sommes bien d’accord: tout ça n’a rien à voir avec l’évangile. Même si parfois, un bout de phrase dans le Nouveau Testament lui-même va dans ce sens. Car l’intolérance est un poison répandu partout, et prêt à resurgir à l’occasion, prêt à se développer, dans un accès de colère ou de frustration, comme dans notre histoire.
 
Faut-il en rire ou en pleurer, de ce curé flingueur? Pour ma part, je vous propose plutôt d’en rire. Mais d’un rire qui se moque autant de Don Eladio que de nous-mêmes. D’un rire qui n’oublie pas nos envies de parfois imposer «notre» vérité, voire notre intolérance. D’un rire qui démasque la violence qui dort en nous, en chacun(e). D’un rire qui la révèle comme l’a fait l’événement fondateur de notre foi, la mort de Jésus sur la croix.
 
  


“Si quelqu’un n’aime pas le Seigneur, qu’il soit maudit. Maranatha (= le Seigneur vient)”. Pour les exégètes, ce verset serait un ajout de la première Eglise, tiré des liturgies de sainte cène. On sait qu’à Corinthe, le repas du Seigneur était vécu dans l’anarchie: certains bâfraient et se saoulaient alors que d’autres n’avaient que des miettes. Notre menace de malédiction était donc destinée à mettre en garde les croyants, pour éviter qu’ils ne prennent la communion sans être conscients de l’immense cadeau que nous fait Jésus, quand il meurt pour mettre fin à la spirale de la violence.
 
De plus, il faut se souvenir que cette injonction date d’un temps où il était vital pour les premiers chrétiens de bien baliser les limites qui les séparaient des païens. On vivait alors dans une société où l’intolérance et l’exclusion étaient la norme. J’ose croire que ce n’est plus le cas aujourd’hui, grâce à l’enseignement du Christ. Euh... Même si j’ai des doutes, parfois, quant à notre capacité de nous comporter en êtres évolués...
 
Pour ma part, je ne peux pas maudire celui (celle) qui n’aime pas le Seigneur. Le Dieu en qui je crois, c’est celui qui, par la bouche du Christ, réprimande les disciples quand ils voulaient appeler le feu du ciel sur les villes infidèles. Jésus, oui, a versé son sang pour détourner de nous cette malédiction, pour la prendre sur lui à notre place. Et c’est ce qui lui permettra d’oser nous demander cette énormité, oui, cet appel hors normes: “Aimez vos ennemis”.
 
Depuis Vendredi Saint et Pâques, la violence et la haine ont été condamnées à mort! Au matin du tombeau vide, Dieu a semé les graines d’un avenir différent, de relations nouvelles entre les humains. Dieu travaille en nous, par son Saint-Esprit, pour que meurent en nous les tentations d’imposer par la force ou par la peur notre vérité, si juste soit-elle; pour que naisse en nous une qualité de dialogue et d’écoute: qu’on se parle, sans se tirer dessus!
 
Tolérance. Tout le monde en parle, de la tolérance. Tout le monde est d’accord avec la tolérance. Peut-être même Don Eladio et ses frères... Le problème, c’est quand on arrête d’en parler pour la vivre, la tolérance. Le hic, c’est quand les frustrations et le stress s’accumulent; et tournent en colère mal maîtrisée. Alors, parfois, ça explose: une gifle, une insulte, que souvent après on regrette. Et puis, une fois tous les coups de canon, c’est le drame. Peut-être qu’un Don Eladio sommeille en chacun(e) de nous?
 
Merci donc de veiller sur nos colères, sur nos vexations, sur l’intolérance qui nous chatouille, parfois. Merci de veiller sur nos germes de violence. Veiller dessus, ça veut dire pour moi oser les regarder en face, avec le Christ qui m’aide à rester fort. Ça veut dire pour moi les remettre à Dieu, les laisser se transformer au soleil de la Tendresse majuscule qui nous est donnée, gratuitement, grâce à Jésus.
 
Essayer de désamorcer nos germes de violence. Et aussi, bien sûr, de prévenir celles des autres! Autour de nous, et dans le monde. Comme le disait déjà Dieu à Caïn, au tout début de la Bible: “La violence est comme un monstre tapi derrière ta porte. C’est à toi d’en être le maître. Domine-la!”
 
Et ici, chers amis, il faut encore dire, une énième fois, que nos contemporains font souvent fausse route. Car si mes frustrations, car si les injustices et les brimades que je subis peuvent réveiller le Don Eladio qui roupille en moi, combien davantage encore les humiliations que subissent certains, au hasard les musulmans chez nous, risquent d’attiser l’incendie et de provoquer des explosions comme on en a trop vu... L’intolérance provoque en retour l’intolérance, et seuls les extrémistes en profitent. Merci d’y veiller aussi! Comme disait Dieu: “La violence est pareille à un monstre tapi derrière ta porte. C’est à toi d’en être le maître... Domine-la!”.
Amen                                          


Jean-Jacques Corbaz 

  

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